• Divorce houleux – boulevard d’Athènes

     boulevard d'athenes

    La loi autorisant le divorce est toute fraiche en 1887 et Blanche Alphan, 27 ans, compte bien l’inaugurer pour se débarrasser de son tyran d’époux. Elle quitte le domicile conjugal, se réfugie chez sa sœur à Lyon avant de se faire embaucher au Grand Hôtel de Bordeaux et d’Orient, boulevard du Nord (aujourd’hui boulevard d’Athènes. Prosper Alphan, le mari, ne l’entend pas de cette oreille et piste la fugitive. Le 2 juillet, Blanche aperçoit son mari rôder autour de son lieu de travail et se cache alors dans la lingerie de l’hôtel. Alphan craque, la rattrape et lui tire cinq balles à bout portant. Il est assez maladroit et une seule atteint son but, ne causant qu’une blessure légère. Quant au sixième projectile, il se le réserve et cette fois ne manque pas sa cible : sa tête.

    Extrait de Guide du Marseille des fatis divers, Le cherche midi, 2006

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    Il camorrista est un film sur la vie de Raffaele Cutolo. Celui-ci est une sorte de héros négatif qui, en affrontant les anciennes familles de la Camorra, va déclencher une guerre de plusieurs années qui fera plusieurs milliers de morts dans la région de Naples.  Adapté d’un ouvrage à succès de Giuseppe Marrazzo qui n’a malheureusement pas été traduit en français, ce film, assez long, il dure près de 3 heures, a été produit par Silvio Berlusconi et a donné lieu également à une version télévisée qui dure plus de cinq heures. Cette production à gros budget  est en même temps la première réalisation de Guiseppe Tornatore. Celui-ci, d’origine sicilienne, plus connu en France pour ses films mélancoliques comme Cinema Paradisio, ou Ils vont tous biens, avait déjà travaillé sur le sujet de la mafia puisqu’il avait co-écrit le scénario de l'excellent Cent jours à Palerme.

    Comme toujours avec ce genre de film, il faut démêler ce qu’il y a d’intéressant dans le scénario de la mise en scène. Le sujet est facilement attractif, l’ascension d’une personnalité bien réelle comme celle de Cutolo, la guerre des Camorras, suffisant presque à satisfaire la clientèle. Le film se passant sur plusieurs décennies, il rappellera aisément Le parrain. Ce n’est pourtant pas ce qui en fait son intérêt. Le film de Tornatore s’inscrit dans la longue lignée des films italiens qui ont pour but de dénoncer la mafia et ses cousines, la Camorra ou la ‘Ndrangheta. Le boss Cutolo n’est pas du tout glamour. Par le côté sordide et dégénéré du caractère de Cutolo, il est plus proche du film qu’on tirera du livre de Saviano, Gomorra. 

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    Cutolo est un personnage assez extraordinaire, mi fou, mi génie criminel, il a construit l’essentiel de son pouvoir alors qu’il était en prison pour un crime assez débile. C’est en prison qu’il sera appelé le professeur du Vésuve. Même s’il semble qu’aujourd’hui Cutolo n’ait plus guère de pouvoir, il est toujours en prison et a eu un fils en 2007, rejeton qu’il a conçu depuis sa cellule !

    Il est donc le fondateur d’une nouvelle Camorra (Nueva Camorra organizzata – NCO) qui devint une véritable armée de plusieurs milliers de soldats ! Le film est bien documenté, très réaliste dans la description des rouages de la corruption. Construit sur des moments très forts, par exemple les tractations entre Cutolo et les Brigades rouges, il ne cache rien de la confusion des genres entre le pouvoir politique de la Démocratie chrétienne et celui des différentes mafias. 

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    Le vrai Rafaelle Cutolo

    Le principal défaut du scénario est d’aligner les scènes de genre et de manquer de continuité. Le caractère heurté du découpage nuit beaucoup. Mais cela vient peut-être du fait que je n’ai vu que la version filmée et non pas la série télévisée. C’est ainsi que le personnage de la sœur de Cutolo n’est pas très fouillé, alors qu’elle est un élément clé de la prise du pouvoir passagère d’il professore.

    L’essentiel du film se passe en prison, avec des scènes convenues de meurtre, de délation et de soumission. La réalisation laisse un souvenir ambigu. D’abord parce que l’image n’est pas belle, peu soignée, ensuite, parce que Ben Gazzara en fait des tonnes. Même si Cutolo avait tendance à faire le clown pour amuser la galerie, il ne semble pas qu’il roule des yeux comme un illuminé. Mais on a comme compensation le fait que le film utilise les décors réels et misérables de Naples. Une scène intéressante est celle d’un gamin qui se croit poursuivi par la police dans les vieilles rues de Naples et que la foule encourage à courir encore plus vite.

    L’interprétation n’est pas non plus remarquable. Les deux principaux acteurs ne sont pas italiens, Ben Gazzara était américain, et Laura del Sol qui n’est pas mal, mais sans plus, est espagnole. C’est un peu gênant parce que le doublage en italien de ces deux acteurs est parfois en léger décalage.

    Le film n’a eu aucun succès à sa sortie et a dû être retiré des écrans après des poursuites judiciaires. Mais quelques années plus tard, grâce à la version télévisée, il devint un film culte qui a marqué, comme le signale d'ailleurs Roberto Saviano dans Gomorra, les esprits et le langage des voyous de la Campanie qui ne se sont pas aperçu que le film mettait avant tout en scène une conception plus que misérable de l’existence.    

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    Même si Il camorrista n’est pas un film qui n’a pas la qualité des films de Damiani ou que Gomorra sur le plan artistique,  il en reste néanmoins intéressant pour tous ceux qui s’intéresse à l’aspect sordide de ce que sont les mafias.

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  • Roberto Saviano dont j’aime particulièrement les ouvrages, écrit ceci :

     

    « Ceux qui prétendent que c’est immoral, qu’il ne peut y avoir d’existence humaine sans éthique, que l’économie doit avoir des limites et obéir à des règles, ceux-là n’ont pas réussi à prendre le pouvoir, ils ont été vaincus par le marché. L’éthique est le frein des perdants, la protection des vaincus, la justification morale de ceux qui n’ont pas su tout miser et tout rafler… La logique de l’entrepreneuriat criminel et la vision des parrains sont empreintes d’un ultralibéralisme radical. Les règles sont dictées et imposées par les affaires, par l’obligation de faire du profit et de vaincre la concurrence. Le reste ne compte pas ».

    Extrait de Gomorra, p. 139-140, Gallimard, 2007.         

    La Camorra a trouvé des affaires juteuses dans le traitement des déchets, que ceux-ci proviennent des ménages ou des industries du Nord. Pour conserver ces marchés, ils ont engagé la guerre des ordures avec les pouvoirs publics. Il va de soi qu’ils l’ont gagnée.

    Mais si ce phénomène est bien connu pour Naples, il existe aussi à Marseille, depuis que celle-ci n’a plus de maire. Là aussi c’est un marché juteux et pour le conserver tous les chantages sont bons.

    Aujourd’hui que la déconfiture de Marseille est en voie d’achèvement, cette ville ressemble de plus en plus à Naples, avec des meurtres quasi-quotidiens, et des quartiers entiers à l’abandon. Mais les deux villes comptent aussi des riches, mêmes des très riches… et bien sûr des sites touristiques imprenables !!

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    Ordures à Marseille

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    Ordures à Naples

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    Boulevard Testanière Deux balles pour le cocher

    Clara, jeune beauté, se marie à 15 ans avec un gentil cocher plus âgé, Louis Varre. Le couple file le parfait amour jusqu’au jour où le naïf époux comprend que sa femme mène la grande vie avec des amants plus jeune dès qu’il a le dos tourné. Cette première crise conduit à la séparation en 1887. Clara s’installe dans une petite maison du 26 où elle continue à fréquenter l’un de ses amants, Borel. Le 6 juillet 1888, le mari, ivre, vient demander de l’argent à celle qui est encore son épouse. Viré sans ménagement, Louis s’en va en proférant des menaces. Le soir même, vers 21 h 30, il revient à la charge, après avoir picolé toute la journée, et trouve Clara en train de laver du linge dans la buanderie. S’armant d’une hachette, il déclare en bafouillant : « Donne-moi l’argent, aussi bien il faut en finir, je vais te tuer. » Ce qu’il ignore, c’est que Clara, vivant seule dans ce quartier isolé, se déplace en permanence avec un revolver. Elle lui tire alors deux balles mortelles dans la tête. Condamnée à huit ans de réclusion criminelle en décembre suivant, elle demande à purger sa peine à Nouméa. Quant à son pauvre amant, Borel, qui nie, tout au long de l’enquête, sa participation au crime et qui n’était même pas sur les lieux, il écope tout de même de cinq ans.

     

    Extrait de Angélique Schaller et Marc leras, Guide du Marseille des faits divers de l’antiquité à nos jours, Le cherche midi, 2006.

     

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    Encore un ouvrage de Camilleri qui a 80 berges passées écrit encore plus vite qu’on arrive à le lire et sans que cela nous lasse ou qu’il paraisse vieux et emprunté. Mais Zù Cola est un ouvrage très mince et on n’a donc aucune raison de se passer de le lire. Je dois dire que j’ai eu du mal à trouver cet ouvrage, tant il semble que L’écailler souffre encore d’une mauvaise distribution.

    L’ouvrage porte le sous-titre de « nouvelles », en vérité ce sont plutôt des notes sur la Sicile du passé, du temps que Camilleri était jeune. Le meilleur de ce petit ouvrage est bien sûr le texte qui donne le titre au recueil. C’est un monologue tenu par Nicola Gentile, mafieux chassé des Etats-Unis, un des premiers à avoir organisé sérieusement le trafic de drogue. Rien que pour ce texte, le recueil mérite le détour. C’est évidemment très drôle, mais cela représente aussi la façon dont la mafia s’est transformée au fil du temps. Tant qu’elle conservait des racines rurales, elle avait une certaine forme d’humanité. C’est ce que pense Camilleri, mais c’est ce que pensent les Siciliens d’Agrigente que j’ai rencontrés.

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    Fiche du FBI sur Nick Gentile

     

    Un peu plus loin justement on découvre la procession de San Calogero. C’est un saint extraordinaire, le patron d’Agrigente et de sa région, mais comme il est noir, africain, même si en règle générale sa barbe est blanche, ce Saint bien particulier a des odeurs de souffre. Il ne plait pas tellement aux hautes instances de l’Eglise, mais c’est un Saint vénéré par la population car il représente l’abondance, c’est lui qui aurait, selon la légende, ramené la prospérité agricole après des années de pénurie. Ce Saint généreux donne encore son nom aux enfants mâles qu’on baptiste et curieusement un de mes amis siciliens s’appelle Calogero Montalbano ! La description de la procession par Camilleri vire à la farce grotesque, entre l’Eglise et le parti communiste, qui, ne l’oublions pas était à la fin de la Seconde guerre mondiale extrêmement puissant en Sicile au point qu’on a pu penser que la Sicile allait basculer dans le camp des rouges et demander son indépendance par rapport à l’Italie. Si l’éminence d’Agrigente qui préside la procession a été mutée dans l’île pour ses accointances mussoliniennes, les communistes tiennent tout de même à ce que leur Saint soit tout à fait intégré et approuvé par l’Eglise, ce qui donne lieu à des tractations croquignolesques.

    L’avant dernière nouvelle traite de la disparition de Judas, c’est une sorte d’enquête sur ce qu’en avait raconté Leonardo Sciascia, qui par parenthèse est aussi de la même région de Sicile que Camilleri. Ce n’est pas du vrai Judas, si l’on peut dire, dont il s’agit, mais d’un acteur qui l’interprète dans une représentation du Mortorio. Camilleri corrige Sciascia, et au passage il met en boîte un peu toutes les personnalités come Escher, qui se penchèrent sur cette question. C’est évidemment très drôle, mais cette nouvelle servit ensuite à l’écriture d’un roman, La disparition de Judas, paru chez Métaillé en 2005, roman qui fait son apparition dans un autre roman de Camilleri, avec Montalbano cette fois, Le champ du potier, variation sur l’idée de trahison.

    En tous les cas, le style reste du Camilleri, c’est-à-dire que c’est très drôle, finement ironique, et … instructif.

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