• Le gang des otages, Edouard Molinaro, 1973


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    Gilbert Nodier est un petit délinquant, il rentre, il sort de prison, commettant des agressions minables le plus souvent. Toujours un peu dépressif et violent, il finit par rencontrer en prison Serge Donati qui lui n’a rien trouvé de mieux que d’attaquer les prostituées dans le bois de Boulogne. Serge et Gilbert vont s’associer avec Maurice dont la femme, Ginette, tient un bistrot de quartier. Lors d’une agression aussi minable que les précédentes, Gilbert va être sauvé par Liliane, une prostituée dont il va tomber amoureux et qu’il va épouser. Ce quatuor va commettre des agressions un peu partout, jusqu’au jour où une prostituée que Serge avait agressée va le reconnaître chez Ginette. Elle va évidemment prévenir d’autres voyous qui vont se venger sur le bar de Ginette qu’ils mettent à l’amende. Gilbert ne l’entend pas de cette oreille et va tenter de rencontrer le chef de cette bande. Une embrouille survient et Cerutti qui tient un bordel, est tué. La police va finir par coincer le quatuor. Liliane qui est en liberté provisoire va tenter de faire sortir Gilbert et Serge en pénétrant dans le palais de justice. Ils prennent alors le juge et son greffier en otage et s’enfuit. Après une cavale désespérée, traqués par la police ils sont arrêtés presque par hasard.

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    Gilbert rentre et sort de prison 

    Ce film d’Edouard Molinaro est typique du cinéma des années soixante-dix. C’est-à-dire qu’il met en scène des petits voyous d’une manière plutôt réaliste, sans les présenter comme des sortes de héros romantiques. Ces délinquants sont assez irresponsables et ne présentent en rien un plan de carrière crédible. Gilbert lui manifeste carrément des tendances suicidaires, mais Liliane est encore plus inconscient que lui, elle n’aurait d’ailleurs pas hésité à tuer leur dernier otage, une jeune femme, sans l’intervention de Gilbert. Leur arrestation procède aussi de cette inconséquence. Ça se passe presque par hasard, ils tombent nez à nez avec une patrouille de police secours. Le scénario est dû à Alphonse Boudard qui ne peut pas s’empêcher de porter un regard très ironique sur ces petits délinquants. La scène de l’arrestation du quatuor dans une auberge à l’extérieur de Paris sera reprise par lui dans le très bon Flic story de Jacques Deray deux ans plus tard. 

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    Liliane sauve Gilbert 

    Le scénario est certes un peu paresseux, mais il ménage quelques scènes très intéressantes, très naturalistes en ce qui concerne les mœurs des petits voyous de l’époque. On dit qu’il a été inspiré d’une histoire vraie. Je le crois assez volontiers, il y a un naturalisme naïf qui ne trompe pas. Les scènes de bar, le comportement des voyous, fait d’amitié et d’inconscience dans l’imprévision des lendemains est tout à fait typique de cette époque. C’est d’ailleurs à cette époque que Mesrine défrayera la chronique. Egalement on retiendra la longue cavale finale quand le trio erre dans Paris à la recherche d’une improbable issue, fatigués, sans moyens, ils sont complètement misérables. Le portrait de Liliane aussi est très bon, cette espèce de folie qui de temps à autre s’empare des femmes et qui les pousse vers le précipice pour le plaisir de la jouissance de l’instant.

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    Liliane prostituée intellectuelle veut participer aux agressions 

    La distribution est plutôt atypique. Je crois que c’est le seul premier rôle de Daniel Cauchy qui, s’il a eu une longue habitude dans l’interprétation des petits voyous, a toujours été cantonné à des seconds rôles. Il est très bien ici, il a tout à fait l’allure du petit voyou un peu romantique, un peu énervé. Daniel Cauchy a semble-t-il été très impliqué puisqu’il est signalé comme co-producteur du film. Plus étonnant est d’avoir confié un rôle de voyelle à Bulle Ogier qui à cette époque était plutôt cataloguée comme une actrice de films d’auteur avec tout ce que cela comporte d’intellectualisme. Probablement qu’à cette époque elle cherchait à casser cette image qui la poursuivait depuis au moins La salamandre puisqu’elle récidivera dans un autre polar à la sauce des années soixante-dix en tournant l’année suivante Bel ordure de Jean Marboeuf. Elle n’est pas mal dans ce rôle, mais elle n’atteint pas les sommets comme dans les films de Jacques Rivette ou d’Alain Tanner. Le reste de la distribution est assez terne tout de même.

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    Gilbert et Liliane se marient

     Sur le plan cinématographique, il n’y a rien de marquant, mais Molinaro n’a jamais été un brillant technicien, quoiqu’il ait réalisé quelques films noirs intéressants au début de sa carrière comme Le dos au mur d’après un roman de Frédéric Dard, ou Un témoin dans la ville avec Lino Ventura d’après un roman de Boileau et Narcejac. Il y a effectivement peu de scènes bien filmées, quelques rues de Paris au moment de la cavale finale, la sortie du bureau du juge d’instruction avec les otages. L’ensemble manque généralement d’ampleur et de profondeur de champ. C’est assez criant dans les scènes qui se passent en prison, on ressent mal ce sentiment d’étouffement qui est sensé expliquer les tendances neurasthéniques de Gilbert. Mais peut-être que cela est dû à un manque de moyens.

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    La maquerelle accueille Gilbert qui veut voir Cerruti 

    Il reste au final un petit polar pas désagréable à regarder, très réaliste avec cet arrière-plan un peu misérable représenté par la lassitude des parents de Gilbert, presqu’un témoignage sur la petite délinquance des années soixante-dix quand on croyait que tout était possible. Je dirais seulement qu’il y manque un peu d’émotion.

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    Gilbert et Liliane prennent le juge en otage

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