• Les bâtisseurs de l'Empire, Empire rising, Rivages, 2006

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    L'Empire state building, construit pourtant au moment de la Grande dépression, est devenu un symbole du capitalisme triomphant, son  nom même semble renvoyer aussi à l'empire américain. Pourtant c'est un ouvrage sombre et mélancolique qui n'a rien de triomphant.

    Mais d'emblée Thomas Kelly annonce la couleur en dédiant son ouvrage aux ouvriers qui sont morts justement dans ce travail dangereux, et les conditions dans lesquelles il a été construit sont celles d'une société corrompue. Dans Le ventre de New York Thomas Kelly racontait la dangerosité du travail des ouvriers du caisson qui creusaient des tunnels en dessous de la ville dans des conditions difficiles. Ici c'est dans les airs que ça se passe puisque l'édifice s'élève à près de 400 mêtres de hauteur. S'il ne fallait pas être claustrophobe pour travailler sous la terre, il ne fallait pas non plus avoir le vertige pour s'employer à édifier cette tour monstrueuse, et comme le dit Broidy, les personnes normales ont le vertige. 

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    C'est donc dans un univers d'hommes, de vrais hommes, qu'on va se retrouver. Un univers qui plaît manifestement à Thomas Kelly. Pas tant qu'il apprécie l'édifice en lui même, mais plutôt parce que cette construction demande de l'habileté, du courage, et aussi de la solidarité entre les équipes. Les conditions d'emploi sont pourtant sauvages, et les ouvriers qui luttent pour leur émancipation sont réprimés par des bandes armées qui vont jusqu'au meurtre. Mais les ouvriers sont bien contents de travailler tant l'embauche à cette époque est rare et qu'il est facile de sombrer dans la misère si on n'a pas de travail.

    C'est un roman difficile à résumer tant les personnages sont nombreux et les péripéties éclatées. C'est un roman choral, organisé autour de la romance entre Briody, ouvrier le jour, mais combattant de l'ombre la nuit pour la cause d'une Irlande libre, et Grace, la maîtrise de Johnny Farrell, l'homme qui fait la pluie et le beau temps à la mairie de New York. Dans l'ambiance de la fin de la Prohibition, il n'est question que de trafics et de rackets. Les bandes mafieuses cherchent à se tailler une place, qu'elles soient italo-américaines, ou d'origine irlandaise, ou encore juive. Et pour cela elles sont prêtes à entrer en collusion avec le capitalisme qui a pignon sur rue et qui évidemment est tout aussi malhonnête.

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    Lewis Hine a pris sur le vif les photos de la construction 

    Au moment où débute la construction de l'Empire state building, Roosevelt prépare sa campagne électorale qui le mènera à la présidence où il sera réélu trois fois, engageant aussi bien une politique nouvelle sur le plan économique, le New Deal, qu'ensuite le pays dans la guerre contre les puissances de l'Axe. Roosevelt est présent dans le livre, dès le début. On voit bien où vont les sympathies politiques de Kelly, homme engagé très à gauche. Pour lui les Républicains ne sont que des canailles qui ont menés l'Amérique au désastre. Cependant il n'est pas naïf, et il sait aussi que le parti démocrate était aussi un parti corrompu. Ainsi au début de notre histoire, on assiste à des scènes de blanchiement d'argent sous la houlette du maire de l'époque James Walker et de son âme damnée le mélancolique Johnny Farrell. Celui-ci a perdu 100 000 $ et une partie de l'histoire tourne autour de la quête de cette somme.

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    Ce sont les années de la prohibition, où pourtant l'alcool coule à flots. Marquées par la violence et la cupidité, c'est une sorte de folie qui aspire ces années newyorkaises, mais la crise est là, et cette cupidité flamboyante va cesser.

    Grace et Briody trangressent les lois, mais ils ne sont pas fondamentalement mauvais, pour des raisons diverses, ils sont entraînés dans une course sans fin qui les transforment en criminels. 

    Thomas Kelly excelle a décrire le travail, son exaltation et sa dangerosité, il n'y a plus beaucoup d'écrivains qui s'y risquent aujourd'hui, mais il a aussi du talent pour exprimer la violence d'une époque tragique.

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    Les droits d'adaptation du livre ont été vendus à Warner Bros, et Guy Ritchie devrait en être le réalisateur, ce qui n'est pas vraiment encourageant.

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    Jimmy Walker maire de New York au moment de la construction de l'Empire State Building 

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    Owney Madden un des rois de la pègre newyorkaise dans les années trente, surnommé le tueur


    « Difficile adaptation de Jim Thompson Le guet-apens, The getaway, Sam Peckinpah, 1972Le destin est au tournant, Drive a crooked road, Richard Quine, 1954 »
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