13 Mars 2015
Ces derniers temps Frédéric Dard auteur de romans noirs, différents des San-Antonio, se retrouve mis à l’honneur. Dominique Jeannerod avait mis dans sa présentation des romans de la nuit l’accent sur le fait que Dard était sous son nom véritable au Fleuve Noir un des rares écrivains français à s’inscrire dans une tradition américaine, influencée entre autre par James M. Cain. La machine fut lente à démarrer. En 1951 il publia le très médiocre Du plomb pour ces demoiselles. Puis, en 1956, s’inspirant de la pièce qu’il avait écrite pour le Théâtre du Grand Guignol, ce fut Les salauds vont en enfer. Pour qui sait lire, il était évident que le roman était directement écrit à partir de la pièce.
Justement Hugues Galli, Thierry Gauthier et Dominique Jeannerod ont eu l’excellente idée de publier le texte intégral de la pièce dans une édition critique. Ce n’est pas seulement une manie de collectionneur, c’est également une manière de souligner l’importance de l’œuvre dramatique de Frédéric Dard. Avant d’ailleurs de se faire un nom en tant que romancier, il eut ses premiers succès à la scène avec l’adaptation de l’œuvre de Simenon, La neige était sale. Cette œuvre dramatique de Dard est considérable, officiellement elle compte vingt pièces jusqu’en 1986. Il y en a certainement plus avec quelques titres signés Frédéric Valmain ou Eddy Gilhain. Il donna avec la complicité de Robert Hossein une nouvelle jeunesse au théâtre du Grand Guignol. Les salauds vont en enfer est une œuvre clé, non seulement parce qu’elle a été dans l’ordre une pièce de théâtre, un film puis un roman, mais parce qu’elle marque l’avènement d’un style singulier, reconnaissable par son ton rapide et désabusé, une forme de neurasthénie. Il va de soi qu’une publication intégrale de l’œuvre dramatique de Frédéric Dard serait tout à fait nécessaire, malgré des hauts et des bas. En attendant cette publication tombe à pic.
A partir de 1956 Frédéric Dard trouve sa vitesse de croisière. Il publie environ 4 San-Antonio par an et 4 Frédéric Dard dans la collection Spécial police. Et comme ça jusqu’au début des années soixante. Les Frédéric Dard marchent d’ailleurs très bien, aussi bien que les San-Antonio, et ils ont l’avantage de pouvoir s’adapter facilement au cinéma. Cette prolifération lui permet de peaufiner un style et une thématique. Parmi les réussites de cette période il y a C’est toi le venin que Dominique Jeannerod a inclus dans sa sélection des « romans de la nuit ». Ce roman fut adapté au cinéma par Robert Hossein en 1959 qui avait déjà porté à l’écran Les salauds vont en enfer. C’est une réussite et ce fut un grand succès public aussi bien pour le film que pour la musique.
A cette époque beaucoup de jeunes réalisateurs font leurs classes dans le film noir, notamment Louis Malle ou Edouard Molinaro. Ce dernier adaptera en 1958 un autre roman de Frédéric Dard, Délivrez nous du mal sous le titre Le dos au mur. Les ans ont passé et il est assez facile de voir quels sont les films qui sont encore visibles aujorud’hui. Ascenceur pour l’ échaffaud de Louis Malle reste surtout pour son extraordinaire musique. Mais Toi… le venin possède une beauté formelle que la réédition de ce film en version Blu ray fait très bien ressortir. En tous les cas elle montre que Robert Hossein possédait tout à fait les qualités d’un grand metteur en scène de cinéma. La version Blu ray donne à voir une très belle image, et en outre on a en prime une interview de Marina Vlady.
Ci-dessous on trouvera le texte de Frédéric Dard qu’il écrivit sur Robert Hossein au moment de la mise en scène des Salauds vont en enfer au Gran-Guignol