• Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !

     Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !

    « Je ne sais pas ce qui restera de moi dans cinquante ans. Probablement tous les films auront pris un coup de vieux terrible et le cinéma n’existera sans doute plus. J’estime que la disparition du cinéma aura lieu vers l’an 2020 et que dans cinquante ans environ il n’y aura plus que la télévision. Eh bien, si je peux avoir une ligne dans le Grand Dictionnaire universel du cinéma, j’en serai heureux. » Voilà ce que disait il y a cinquante ans Jean-Pierre Melville, qui malgré tous ses défauts, s’y connaissait en cinéma. On peut dire qu’il ne s’est pas trompé, malheureusement ! Les gens consomment de plus en plus d’images mais ils ne vont plus au cinéma. Certes la pandémie porte une lourde responsabilité dans cette disparition du public, les salles sont fermées, et en 2020 la billetterie est tombée en dessous de 65 millions de tickets contre 213 millions en 2019. Le chiffre le plus bas depuis la Libération. Mais en vérité le déclin du cinéma était amorcé depuis des années. La médiocrité des films tournés en France et aux Etats-Unis en atteste, et je ne parle même pas des nouvelles normes de production décrétées par les Oscars pour faire place à la diversité, noirs, LGTB ou handicapés, normes qui confondent allégrement la création artistique avec une pédagogie pour petits enfants de maternelle. Une créativité sous surveillance permanente ne peut aboutir à rien de bon, simplement à une dictature intellectuelle qui n’ose pas dire son nom et qui n’a sans doute comme équivalent que l’Allemagne hitlérienne, la France pétainiste ou la Russie stalinienne. 

    Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !

    Profitant de la crise du COVID Netflix va étendre son emprise sur le cinéma achetant des « créatifs », je n’ose même plus dire des réalisateurs, à prix d’or. Voici le malheureux Martin Scorsese qui la vieillesse venant se vend corps et âme à l’ennemi. Il avait déjà commis une erreur et un très mauvais film avec The Irishman[1], délaissant toute les ambitions de sa jeunesse pour se vautrer dans les millions de dollars. Le crime n’était pas seulement que ce film soit indigent et pénible à regarder, car après-tout des réalisateurs ont le droit à l’erreur, mais plutôt dans le fait que Scorsese ait accepté les conditions de Netflix et donc que son film soit tout simplement interdit en salle ! Scorsese a appris le cinéma dans les salles, et même dans les salles de quartier, et en se soumettant aux exigences de Netflix, il se vend effectivement. Représentant le « cinéma de qualité », c’est tout le cinéma et son histoire qu’il brade ainsi pour quelques millions de dollars de plus dont il n’a pas besoin, étant déjà très fortuné. Ce fiasco artistique n’a pourtant pas guéri Scorsese de se vendre, le voilà maintenant qu’il travaille à plein temps pour Netflix, jouant les produits d’appel pour la firme qui cherche à se donner une image à colloration artistique. Il vient en effet de terminer une docusérie de sept épisodes avec Fran Lebowitz, Prétend it’s a city, discussion a prétention esthétique et culturelle autour d’une personne emblématique du New York des sixties. Ce qui pose problème, c’est moins le contenu de la série ou son intérêt discutable que le comportement d’un homme qui jadis se présentait comme un homme de cinéma avec de grandes prétentions. Donner son argent à Netflix ou à Amazon c'est du pareil au même. c'est un suicide collectif.  

    Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !

    Un malheur n’arrivant jamais seul, voilà qu’après avoir rénové de manière contestable tout autant que moderne La Cinémathèque française, lieu emblématique de la cinématographie française, Netflix qui se déploie plus vite que la vérole et le COVID-19 sur le monde entier, vient de l’acheter. C’est une manière de l’enterrer avec un temps d’avance car en laissant croire que Netflix soutient le cinéma, Netflix démontre que le cinéma est juste une chose bonne pour le musée, un art réservé aux vieilles personnes et éventuellement à des étudiants en cinéma audacieux qui voudraient connaître l’histoire de ce métier qu’ils prétendent être le leur à l’avenir. Netflix fait sa pub en parlant des millions de dollars injectés pour l’achèvement du film d’Orson Welles, The other side of the wind, ou pour la restauration du film d’Abel Gance Napoléon, histoire de montrer qu’ils ont aussi le souci de l’art. Je ne parle même pas de vision managériale de La cinémathèque française sous la direction de Frédéric Bonnaud pour ne pas être désagréable[2].   

    Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !

    Netflix qui vampirise aussi bien Scorsese que la Cinémathèque française, inonde le marché français de son argent bien mal acquis. Ils ont financé le très politiquement correct Lupin, série en 5 épisodes plus 5 autres à venir. Ils ont aussi acheté très cher les journalistes qui jour après jour nous racontent comment cette série est nouvelle et formidable et qu’en plus elle a conquis le public américain, montrant ainsi leur esprit d’ouverture. Mais aussi ils ont donné 13 millions de dollars à Olivier Marchal pour tourner un film qui ne sera vu que par les abonnés de Netflix. Il est vrai que sans Netflix Olivier Marchal n’aurait pas trouvé 13 millions de dollars pour tourner un film très controversé sur le plan disons esthétique et redondant par rapport à ce qu’il avait fait auparavant. La question qui se pose alors est la suivante : tous ces films est-ce encore du cinéma ? En travaillant pour Netflix on aide à l’éradication des salles qui sont bien mal en point : Scorsese sait très bien que son film The irishman, tout mauvais qu’il soit, aurait bien aidé les salles à se maintenir en vie. Autrement dit nous pensons que la salle est indispensable au cinéma. Netflix contribue en tuant les salles à l’enfermement et au repli sur soi. Tout le monde s’est engouffré dans le développement des plateformes, Amazon, Salto, ou encore Disney. Il y a une telle abondance d’offres, toutes plus mauvaises les unes que les autres, qu’une grande partie d’entre elles va disparaître rapidement. Mais cette pléthore ne fait pas du mal qu’aux salles de cinéma, elle tue aussi à petit feu les petites maisons qui à travers la production de Blu ray et de DVD tentent de faire connaître dans de bonnes copies des films rares mais importants. Dans le temps le cinéma c’était une sortie en famille ou avec les copains, c’était d’ailleurs le principal loisir et le plus populaire. Aujourd’hui c’est juste un produit de consommation courante qui ne parle de rien et encore moins du reste. Ce n’est pas un hasard si les cinématographie qui existent encore un peu sont celles des pays asiatiques où la dynamique sociale et économique existe encore, face à l’immobilisme commercial et culturel de l’Occident. Ceci dit la pénurie de films récents de valeur a quelque chose de bon, en ce sens qu’on nous pouvons accorder un peu plus de temps à l’histoire du cinéma et apprendre en quoi cela a pu être un art. 

    Le cinéma est-il mort en 2020 ? Probablement oui !



    [1] http://alexandreclement.eklablog.com/the-irishman-martin-scorsese-2019-a177715326

    [2] https://next.liberation.fr/cinema/2016/02/19/le-mauvais-film-social-continue-a-la-cinematheque_1434551

    « La tête d’un homme, Julien Duvivier, 1932La fin du cinéma (suite) »
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  • Commentaires

    1
    Vendredi 22 Janvier 2021 à 19:03

    Désolé pour mon impertinence de jeune cinéphile, mais le cinéma est mort bien avant 2020 notamment le cinéma français qui ne survit qu'avec le financement des différents sponsors. Voir ma rubrique : Le cinéma ça sert aussi à faire la publicité.

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    2
    Samedi 23 Janvier 2021 à 08:37

    Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous dites, bien au contraire, sauf qu'à mon sens les plateformes de type  Netflix et le COVID sont en train d'enterrer les salles, entrainant une rupture totale d'avec l'ancien modèle. Par ailleurs, dans mon prochain billet je parle de la relation qu'il peut y avoir entre cinématographie et dynamisme économique et social d'un pays, évidemment je parle du cinéma asiatique. 

    Merci pour le lien, je ne connaissais pas ce site que je vais explorer et qui me parait très intéressant. 

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