• Le festival de Cannes 75ème édition

    Le festival de Cannes 75ème édition

    Le jury du 75ème festival de Cannes 

    Comme on le sait, si on suit mes petites chroniques, je regarde principalement des films qui ont un certain âge, et quand je me risque à regarder des productions récentes, le plus souvent je le regrette. Voici donc la nouvelle édition de ce qui fut la grande messe du cinéma international et qui n’est plus qu’une médiocre sauterie, doublée dans les coulisses d’un marché de l’image en mouvement. La sélection est globalement peu attrayante, orientée principalement vers les festivaliers et les critiques du cinéma. Et cela fait maintenant quelques années qu’il en est ainsi. Les films qui représentent le cinéma français ressemble à une chronique de Télérama, le genre bonne conscience qui vise un public étriqué qui se réduit de plus en plus au fil du temps et de la pandémie. En effet, les salles ne survivent plus qu’avec des films d’une vulgarité affligeante, des daubes de super-héros, les autres films plus intimistes ou qui se donnent à penser, n’intéressent plus qu’un public de critiques qui ne payent même pas leur billet d’entrée ! On vous dira que le cinéma n’est pas en crise, qu’il y a de l’argent grâce aux nouvelles plateformes et qu’un écran en salle vaut bien un autre écran sur son smartphone. C’est du moins ce que croit ou fait semblant de croire Dominique Boutonnat qui fut nommé directeur du CNC par hasard ou par amitié politique, ou les deux en même temps[1]. Comme si le fait de penser un film pour le grand écran pouvait se réduire par la grâce des plateformes friquées des multinationales à des écrans de faible dimension. De l’argent en effet, il y en a beaucoup, Netflix produit des grosses daubes comme The Irishman, peut être le plus médiocre film de la paire Scorsese-De Niro, pour près de 160 millions de dollars ! Même si le dollar n’est plus ce qu’il était, cette extravagance n’a pas suffi à masquer la décrépitude d’un cinéaste jadis génial. 

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    Zelensky en tenue de combat faisant la leçon de morale aux festivaliers qui bêtement l’applaudirent 

    1984, film de Michael Radford

    Le Festival s’est donc ouvert par un discours du président du jury, Vincent Lindon, qui a joué les modestes, mais surtout on a imposé aux festivaliers une nouvelle pitrerie de l’acteur Zelensky qui a fait la leçon à cet aéropage de bobos pour leur expliquer combien le cinéma devait s’engager à fond derrière l’OTAN et les Américains dans la guerre contre la Russie. Il va sans dire que les cinéastes russes n’étaient pas invités. On est dans l’entre-soi otanien, la bienpensance occidentale qui est le camp du bien. C’est tout juste si la marionnette des Etats-Unis, en même temps qu’elle crachait sur la tiédeur des occidentaux à l’aider dans sa croisade, n’a pas réclamer directement la palme d’or, comme il a eu quasiment en son nom le Grand Prix de l’Eurovision. Il va de soi qu’on ne saurait admettre dans cette foule informe qui applaudit bêtement ce qu’on lui dit d’applaudir, qu’on puisse avoir une réflexion différente sur les événements en cours en Ukraine. On aurait pu par exemple pour éclairer nos amis festivaliers leur projeter, parallèlement à l’ordre de mobilisation de Zelensky, le film très engagé pour le coup de Igor Lopatonok et d’Oliver Stone, Ukraine under the fire, film sorti en 2016 et qui dénonçait les manœuvres de la CIA et de l’OTAN pour arriver à la guerre avec la Russie. Mais ce film étant très anti-américain, il était exclu de le faire connaitre aux ignorants qui garnissent les moelleux fauteuils du Palais des Festivals. Que le cinéma soit engagé, pourquoi pas, mais on peut s’engager aussi bien contre l’impérialisme américain, il fut un temps où c’était à la mode, que contre l’attaque de l’armée russe en Ukraine. Dans les deux cas c’est toujours un engagement comme dirait Vincent Lindon. Plus problématique est l’alignement exigé sur une seule et unique vision de la réalité. 

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    S’il n’est pas choquant que des cinéastes s’engagent politiquement, ce qui l’est moins c’est d’obliger le reste du monde du cinéma à s’aligner sur les positions particulières de l’OTAN et de son porte-voix Zelensky. Le Festival de Cannes outrepasse ici ses droits, ce qu’il a déjà fait du reste en excluant les cinéastes russes qui ne sont tolérés que s’ils abjurent leur foi dans cette nouvelle forme d’inquisition. Le Festival est donc parti pour faire la guerre à la Russie. Mais est-ce son rôle ? Se vautrant déjà dans la médiocrité des images post-modernes projetées, le voilà maintenant qu’il est présidé par une Allemande, Iris Knobloch, qui se vautre dans une forme de politiquement correct singulier qui va finir par achever, accompagnant l’Empire américain dans sa chute. Cette affaire est d’autant plus sordide que plus de la moitié du monde, à commencer par la Chine, Israël et l’Inde, ne s’est pas aligné sur les sanctions et le boycott décidé unilatéralement par les Américains et l’OTAN. Sans rendre compte, les « autorités » qui président aux destinées du Festival de Cannes procèdent exactement de la même manière que l’HUAC dans une chasse aux sorcières d’un nouveau genre.  

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    Mais aujourd’hui, dans le monde post-moderne agonisant, toutes les fêtes dites du cinéma finissent par ressembler à des grandes leçons de morale auxquelles tu as intérêt à te plier si tu veux survivre dans ce milieu de piranhas, un jour c’est le médiocre Roman Polansky qui est cloué au pilori lors de la cérémonie des Césars, un autre c’est Will Smith qui, lors de la cérémonie des Oscars, se fait bannir de la « communauté » pour avoir donné une gifle à un comique qui moquait sa femme, etc. Cette morale tous azimuts qui brasse tous les domaines de la politique à la réclame pour les transgenres, n’indique pas vraiment une élévation du niveau de conscience de ce petit milieu, mais plutôt l’arrivée d’une nouvelle inquisition. Personne ne se trouve à l’abri, les uns se feront coincer parce qu’ils ont par le passé eu des relations sexuelles douteuses ou des mots qui ont dépassé leur pensée, les autres parce que leur position politique n’est pas calée correctement sur ce que demande l’OTAN. Je pensais récemment qu’en 1965 le Festival de Cannes présentait en compétition le film de Pierre Schoendoerffer avec les très regrettés Jacques Perrin et Bruno Cremer. Je me posais la question comment aujourd’hui un tel film sur l’Indochine pourrait trouver un financement et être sélectionné. 

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    La 317ème section, Pierre Schoendoerffer, 1965

    PS

    En marge du carnaval cannois, tous se précipitent pour dire qu'ils ont été bien les premiers à dénoncer les Russes et à défendre les Ukrainiens, voilà Charlotte Gainsbourg qui n'en rate pas une, elle nous dit que si elle a bien des racines judéo-russes, elle a aussi des ancêtres ukrainiens, preuve qu'elle ne doit pas être confondue avec quelqu'un d'autre. C'est évidemment Télérama qui rapporte cette extraordinaire découverte ! Peut-être qu'un jour ces gens-là vont s'intéresser au cinéma, va-savoir.

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    [1] https://www.lemonde.fr/culture/article/2022/05/17/dominique-boutonnat-cnc-la-complementarite-des-ecrans-n-est-pas-une-menace-pour-le-cinema_6126435_3246.html

    « Jim Tully, Du sang sur la lune [1931], Le sonneur, 2021Tunnel 28, Escape from east Berlin, Robert Siodmak, 1962 »
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