• Jacques Perrin s’en est allé, lui aussi

     Jacques Perrin s’en est allé, lui aussi 

    La ragazza con la valigia, Valerio Zurlini, 1960 

    Quelques jours après Catherine Spaak, Jacques Perrin s’en est allé à son tour. C’était un homme discret, mais au bout du compte il a fait une très belle carrière, à la fois comme acteur et comme producteur. C’était un homme de fidélité qui ne gérait pas sa carrière en fonction du box-office ou des recettes potentielles qu’il pouvait en attendre. Au début de sa carrière, il jouait toujours des rôles d’adolescents un peu fragiles, son physique s’y prêtait. Barré en France, il trouva lui aussi son bonheur en Italie en 1960, il avait à peine dix neuf ans, il fut engagé par Valerio Zurlini pour donner la réplique à Claudia Cardinale dans La ragazza con la valigia. Il tourna encore avec Zurlini dans Cronaca familiare, un drame poignant, très travaillé au niveau des couleurs. Il était au côté de Marcello Mastroianni dont il était le jeune frère en train de mourir. C’est un magnifique film sur tous les plans, avec un traitement de la couleur très singulier, un film qui mériterait d’être redécouvert.

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    Cronaca familiare, Valerio Zurlini, 1962 

    Etant très fortement engagé en Italie, il tourna aussi sous la direction de Mauro Bolognini, dans La corruzione. Puis il se retrouva avec Catherine Spaak dans Calda vita, un drame un peu niais basé sur un trio improbable dans une ile isolée. Mais il était excellent, et Catherine Spaak aussi d’ailleurs. 

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    La calda vita, Florestano Vancini, 1964, avec Catherine Spaak 

    Revenu en France il tourna dans la 317ème section de Pierre Schoendoerffer en 1965. Il était un jeune lieutenant qui au côté de Bruno Cremer, incarnant un vieux baroudeur, tentait de ramener cette 317ème section de l’enfer de la cuvette de Dien Bien Phu. Le film fut fort justement remarqué à Cannes, c’est un des meilleurs films sur la Guerre d’Indochine qui ne cherche pas à expliquer quoi que ce soit, mais qui parle juste des soldats impliqués dans cette malheureuse débâcle. Il tournera encore plusieurs fois avec Pierre Schoendoerffer, toujours cette fidélité qui semble parcourir son engagement dans le cinéma. 

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    La 317ème section, Pierre Schoendoerffer, 1965 

    Mais entre temps il rencontra Costa Gravas avec qui il allait tourner plusieurs films. Le premier qu’ils firent ensemble fut Compartiment tueurs d’après le roman éponyme de Sébastien Japrisot où il était accompagné de nombreuses vedettes, Yves Montand, Simone Signoret, Michel Piccoli entre autres. Le film construit sur un petit budget fut un énorme succès. Ensuite il participa Un homme en trop, toujours de Costa Gavras, basé sur le même principe d’une kyrielle de vedettes parmi lesquelles il fallait trouver le coupable d’une dénonciation de résistants aux Allemands. Il y avait Michel Piccoli, Claude Brasseur, Jean-Claude Brialy. Entre temps il avait joué dans Les demoiselles de Rochefort de Jacques Demy aux côtés de Catherine Deneuve et de Françoise Dorléac. Il va retrouver Costa Gravas sur Z, un film très ambitieux sur le plan politique. Très marqué à gauche, condamnant la Grèce des colonels, c’est Jacques Perrin qui le produisit lui-même, se donnant un simple petit rôle de photographe. Là encore il y avait des vedettes de premier plan, Yves Montand, Irène Papas, Michel Piccoli ou encore Jean-Louis Trintignant. Le film eut un succès immense en France comme à l’étranger, ce qui est assez rare pour un film très politique. Il rapporta une fortune à Jacques Perrin qui prit goût ensuite à la production. 

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     Le désert des tartares, Valerio Zurlini, 1976 

    On pourrait penser que la carrière de Jacques Perrin a été marquée par une longue méditation sur la condition de soldat et sur la guerre. En 1977, il retrouvait Zurlini pour une adaptation luxueuse du roman de Dino Buzzati, Il deserto dei tratari. Il était le jeune lieutenant Drogo. Le film fut un échec ruineux, malgré ses qualités esthétiques évidentes.  

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    Le Crabe-Tambour, Pierre Schoendoerffer, 1977 

    Je ne sais s’il était engagé à gauche comme tendraient à le prouver ses amitiés avec Costa Gavras ou à droite si on se réfère à sa relation avec Pierre Schoendoerffer, mais on sait qu’il aimait la nature et l’océan, il est officier de réserve de la Marine, avec le grade de capitaine de frégate, cela se verra dans sa manière de filmer l’océan, il réalisera un film Océans en 2009 qui aura un bon succès, mais en 1982 il s’était déjà fortement impliqué en 1982 dans le film de Christian de Chalonges, Les quarantièmes rugissants. Entre temps il reviendra à des histoires de soldats. D’abord dans Le crabe-tambour de Pierre Schoendoerffer en 1976, ce film très mélancolique et nostalgique était une grande réussite parce que s’il parlait de la mer, il parlait aussi de la guerre et du passé, mais aussi de la fidélité à sa mémoire. Jacques Perrin était le mystérieux Crabe-Tambour au côté de Jean Rochefort et de Claude Rich qui trouvaient là des rôles qui les éloignaient des habituelles comédie, ce qui leur permettait de démontrer leur talent.  

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    L’honneur d’un capitaine, Pierre Schoendoerffer, 1982 

    Il n’en avait pas fini avec l’armée. Il avait tourné sous la direction de Raoul Coutard qui avait été le directeur de la photo sur La 317ème section. C’était La Légion saute sur Kolwezi, d’après un roman de l’ancien de l’OAS, Pierre Sergent. Il tenait le rôle de l’ambassadeur Berthier, et pour l’occasion retrouvait Bruno Cremer. Puis il retrouva Pierre Schoendoerffer une nouvelle fois pour L’honneur d’un capitaine qui abordait la question de la guerre d’Algérie et de la torture. C’est un récit en flash-back qui part d’un procès intenté par la veuve d’un capitaine pour laver son honneur. 

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    Le juge, Philippe Lefebvre, 1984 

    Mais Jacques Perrin participa aussi à quelques films noirs intéressant, en 1980 Une robe noire pour un tueur de José Giovanni où il jouait un agent des renseignements chargé des basses besognes des politiciens. Puis, en 1984, Le juge de Philippe Lefebvre, inspiré par l’assassinat à Marseille du juge Michel. Une fois de plus il jouait du contraste entre sa détermination courageuse, et sa stature assez frêle. Peu à peu il quitta le devant de la scène en tant qu’acteur, se contentant de petit rôle, il réservait son énergie à la production de films. Ses documentaires comme Microcosmos ou Le peuple migrateur furent de grands succès. Il produisit aussi de la fiction, notamment le film de Christophe Barratier, Les choristes qui eut un succès retentissant. 

    Je ne le connaissais pas, mais sa carrière d’acteur, de réalisateur et de producteur, dessine le portrait d’un homme d’engagement et de fidélité. Saluons-le !

    « Adieu à Catherine SpaakColère noire, La città sconvolta: caccia spietata ai rapitori, Fernando Di Leo, 1975 »
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