• Le fin mot de l’histoire, Get a load of this, James Hadley Chase, [1942], 1989

     Le fin mot de l’histoire, Get a load of this, James Hadley Chase, [1942], 1989

    Peu de lecteurs s’intéressent aux nouvelles surtout dans le domaine du « noir ». Le format court est pourtant très intéressant parce qu’il favorise l’ellipse, laissant bien plus de champ finalement au lecteur pour se faire une opinion personnelle et jouer avec les éléments que l’écrivain lui fournit. James Hadley Chase est un de ces auteurs de romans noirs qui a donné beaucoup de sujets au cinéma pour une cinquantaine de films dont au moins une trentaine pour la France qui était le marché le plus porteur pour ses œuvres. Eva de Joseph Losey[1] étant certainement le film le plus abouti tiré d’un de ses ouvrages. Produisant des récits à la chaîne, quatre-vingt-dix romans, s’il ne perça jamais vraiment sur le marché américain, il fit la fortune de la Série noire. Pas d’orchidées pour miss Blandish est le troisième numéro. Pour autant cet auteur qu’on a dit être une simple couverture pour écouler le surplus des œuvres de Graham Greene[2], n’est toujours pas reconnu comme un auteur véritable, il reste cantonné à l’image d’un romancier bas de gamme, même s’il a des défenseurs. Peut-être le fait d’avoir truffé les traductions de ses romans publiés à la Série noire l’a-t-elle déservi. George Orwell le détestait et le trouvait vulgaire, flattant les bas instincts de son public, préfigurant une forme de fascisme[3]. Mais il est vrai que son style était souvent très relâché, du moins pour ce qu’on en sait à travers les traductions de Gallimard.

    Evidemment tout n’est pas bon chez ce romancier, il y a même du franchement mauvais. Mais il y a des perles, Pas d’orchidées pour miss Blandish ou encore cette suite décalée La chair de l’orchidée. Son style qui empruntait au hard boiled était plus que direct, et surtout très violent avec beaucoup d’érotisme encore que cet érotisme passerait inaperçu aujourd’hui. Thomas Narcejac, un des grands maîtres français du roman noir, et grand défenseur de Frédéric Dard au Grand prix de la littérature policière, le détestait et le trouvait même dangereux[4]. Mais ses ouvrages se vendaient très bien. Mais Frédéric Dard à l’inverse disait le plus grand bien de lui et lui donnait le statut d’un maître du roman noir.  Il adaptera d’ailleurs Pas d’orchidées pour Mis Blandish et La chair de l’orchidée au théâtre pour Robert Hossein. Dard écrira lui aussi une grande quantité de nouvelles, sous son nom, et sous des pseudonymes divers et variés[5]. Les nouvelles dans les années quarante étaient une source de revenus de complément très appréciée. 

    Le fin mot de l’histoire, Get a load of this, James Hadley Chase, [1942], 1989 

    Le recueil Le fin mot de l’histoire contient 14 récits de longueur et de qualité très variable. Publié en 1942 en Angleterre, après que Pas d’orchidée pour miss Blandish fut devenu un énorme succès, il n’a été traduit et publié par Gallimard qu’en 1989. La lenteur et la désinvolture de cette maison qui s’amusait à caviarder les romans des grands auteurs américains, Raymond Chandler, Charles Williams, Jim Thompson, et j’en passe, m’étonneront toujours. C’est un concentré de la thématique chasienne si on veut. L’alcool, le viol, les femmes fatales, mais aussi Cuba et la révolution avec ses généraux lubriques autant que cruels. Un œil exercé reconnaitra dans Auto-stop une parenté directe avec Eva dans la mise en place d’un trio, avec un homme riche qui sera directement le jouet d’une femme cupide et criminelle, été puis bien sûr la pluie qui force les protagonistes de l’histoire à se retrouver dans la même maison. A fleur de peau est une première mouture de La chair de l’orchidée. Comme on le voit ces nouvelles, bien qu’elles aient une valeur en elles-mêmes, sont aussi des sortes d’ébauche pour une œuvre à venir.



    [1] http://alexandreclement.eklablog.com/eva-joseph-losey-1962-a204146352

    [2] Thierry Cazon et Julien Dupré, L'étrange cas du docteur Greene et de mister Chase, Edition du Lau, 2014.

    [3] Essais, articles, lettres, Éditions IVREA, 1995

    [4] Thomas Narcejac, La Fin d'un bluff : Essai sur le roman policier noir américain, Le Portulan, 1949  

    [5] Frédéric Dard, Des nouvelles de moi, Fleuve noir, 2021. 

    « Les rats de caves, The subterraneans, Ranald MacDougall, 1960Où est passé Tom ?, José Giovanni, 1971 »
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