• 12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959

    12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Ça commence un peu comme Les salauds vont en enfer, avec une évasion qui utilise le gardien de la prison en simulant une bagarre entre les prisonniers. Les trois évadés doivent se rendre dans un port près de Toulon pour embarquer. Ils doivent d’abord retrouver Barbara qui leur remettra l’argent pour le passage. Madame César doit leur fournir les passeports. Mais Barbara n’a plus l’argent, il lui a été confisqué par Monsieur Blanche un photographe qui la fait chanter, comme il fait chanter un peu tout le monde. Le jeune Kopetsky qui dans le passé avait été l’amant de Barbara a été blessé. Il doit être rapidement caché sur le bateau. Il croit encore que celle-ci est amoureuse de lui. Mais elle ne l’aime plus. Elle n’aime pas non plus l’horrible Monsieur Blanche, mais malgré son désenchantement, elle va tomber amoureuse de Serge parce que celui-ci est tombé sous son charme sans la connaître, alors que Kopetsky n’arrêtait pas de lui parler d’elle ! Barbara va décider de partir avec les trois hommes et pour cela elle l’idée assez saugrenue il est vrai de faire chanter un jeune homme qui est en train de conclure un mariage d’argent. Le prétexte pour le faire chanter est qu’il a manifesté le désir d’elle, et même si rien n’a été consommé, Barbara propose de faire éclater un scandale. Lucette la riche fiancée qui veut épouser Maurice pour sa beauté va céder. Pendant ce temps Fourbieux va se trouver empêtré dans sa relation avec Armand, le cousin gendarme de Madame César. Dès lors tout tournera de travers, Monsieur Blanche va tuer Serge, Armand va arrêter Fourbieux, et Kopetsky va mourir. Seule Barbara pourra fuir.

     12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Les évadés ont volé un camion de bétail 

    On reste très circonspect quant au sens d’un tel scénario. L’histoire part dans tous les sens, comme si elle avait été bricolée sur un coin de table. Le film hésite entre la tragédie – la mort promise de Kopetsky – la farce – les relations sexuelles de Madame César avec tout ce qui passe à sa portée, et le drame – l’impossible amour de Serge et Barbara. Tout le monde faisant chanter tout le monde, on finit par se perdre dans le labyrinthe des raisons des uns et des autres. Pour couronner le tout les gendarmes sont parfaitement ridicules, même si Armand fait preuve de ruse pour coincer le pauvre Fourbieux. Il faut dire qu’il s’agit d’une coproduction franco-germanique, sans doute dans le but d’améliorer les relations franco-allemande. Avec toute la lourdeur de ce genre d’entreprise. La greffe d’une histoire d’amour passionnée entre Serge et Barbara ne prend pas vraiment, et pas seulement parce que les acteurs qui les incarnent sont mauvais. Mais plutôt parce que c’est en décalage avec la situation initiale. Cependant on reconnaitra à travers cette figure d’un amour maladif des relents de la thématique dardienne. L’homme valide qui pense prendre la place dans le cœur de la maîtresse de celui-ci est un thème qu’on retrouve dans Les salauds vont en enfer. L’enfermement de la bande dans un lieu assez clos rappelle quant à lui la trame du Tueur triste. On ne voit pas vraiment Boileau-Narcejac, si on connait bien leur œuvre, écrire ce genre de choses. Et d’autant plus que s’y mêlent ces scènes loufoques avec le gendarme ou avec les extravagances sexuelles de madame César. Le mari cocu qui pénètre dans la chambre conjugale pour y trouver l’amant de sa femme en train d’utiliser son rasoir, ça c’est clairement du Dard, à la manière des contes plus ou moins érotiques qu’il publiait dans Oh ! par exemple. Mais bien évidemment je peux me tromper, c’est plus des intuitions dont il s’agit que d’autre chose.

     12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Le débonnaire Fourbieux arrive chez les César 

    Si le scénario sent le bricolage hâtif, que dire de la réalisation ! Les visages sont déformés, les plans très statiques. Il n’y a presque rien à sauver. Sauf peut-être quelques idées : d’abord l’histoire du camion avec les moutons comme moyens de passer inaperçu, l’atelier du photographe véreux. Tout le reste est plat et ressort d’un folklore mal assimilé. En effet l’action se passant au moment du 14 juillet, il y a un bal, mais Geza  Radvany est incapable d’en tirer quelque chose : le bal est filmé sans perspective, au milieu des danseurs, les gros plans sont bien trop nombreux pour que la mise en scène reste fluide et efficace. Même les moments dramatiques ne reflètent aucune véritable tension, par exemple la mort de Serge passe presque inaperçue. Et puis les scènes de saoulerie avec le gendarme Armand n’en finissent pas de durer. On n’aura même pas droit à des plans d’ensemble du port ou du bateau qui s’en va : l’utilisation des décors naturels de la Côte d’Azur est inexistante. Cela donne un côté étriqué et maladif au film qui ne pardonne pas. Le fait que s’emmêlent des histoires de niveau différent font qu’on abandonne toujours quelque chose en chemin. C’est un problème de montage autant que de découpage. Mais Geza Radvanyi n’a jamais été reconnu pour son esprit de finesse. Il est connu en France pour y avoir tourner Mademoiselle Ange avec Romy Schneider et Henri Vidal, et aussi La case de l’oncle Tom, adaptation européenne du classique américain. 

    12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959  

    Monsieur Blanche est un photographe qui exerce le chantage 

    Pour ce qui concerne l’interprétation, c’est tout autant problématique. Il y a le couple Serge et Barbara joué par Hannes Messemer et Eva Bartok, deux acteurs raides et sans relief qui n’expriment strictement rien que leur absence de talent. Laurent Terzieff qui était à cette époque le jeune premier romantique qui monte, a rarement été aussi mauvais, alors qu’il n’a qu’un petit rôle. Guy Tréjean dans le rôle du gendarme en rajoute des tonnes et ennuie. Mais il y a d’autres acteurs tout de même intéressants. D’abord bien sûr Lino Ventura qui donne une leçon à tous ces acteurs soit disant chevronnés mais qui jouent sans naturel, comme on le faisait au théâtre dans les années d’avant la guerre. Et c’est justement dans cette comparaison qu’il fait la preuve qu’il a été un très grand acteur. A lui seul il fait que le film est presque regardable. Gert Froebe est également très bon dans un genre de rôle qu’il reprendra plusieurs fois : le salopard rusé et pleurnichard, cocu et rancunier. Il était lui aussi un grand acteur. Enfin il y a le couple César, incarné par Suzy Prim qui était aussi la productrice du film, et Lucien Raimbourg. Bien qu’ils poussent un peu le film du côté de la comédie de boulevard, ils lui insufflent une vie qui lui manque le plus souvent.

     12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Serge va se révéler amoureux de Barbara 

    C’est donc un film raté qui aurait pu contenir quelques idées intéressantes de film noir, mais qui est plombé aussi bien par un scénario paresseux que par une mise en scène défaillante. On le conservera dans nos mémoires cependant pour sa place particulière dans l’histoire du film noir à la française. Notez aussi que c’est une des rares incursions de Léo Ferré dans le registre de la musique de film.

     12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Armand veut copiner avec Fourbieux

     12 heures d’horloge, Geza Radvany, 1959 

    Kopetsky a reçu trois balles dans la peau et va mourir

    « Ce soir… les souris dansent, La melodia misteriosa, Juan Fortuny, 195Les yeux sans visage, Georges Franju, 1960 »
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