• Bandits à Milan, Banditi a Milano, Carlo Lizzani, 1968

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    Carlo Lizzani qui est décédé à la fin de l’année dernière, est souvent associé au néoréalisme italien, notamment parce qu’il a participé au scénario de Riz amer de Giuseppe de Santis. Ce n’est pas faux, mais c’est limité. Lizzani a deux particularités bien définies : d’une part il a puisé une grande partie de son inspiration dans la guerre été la Résistance à laquelle il a participé, et d’autre part il s’est très tôt, dès le début des années soixante intéressé aux formes nouvelles de la criminalité en Italie. Il est donc un des premiers réalisateurs de films noirs dans l’Italie d’après-guerre. Bien sûr toujours avec un souci de réalité qui donne un côté presque documentaire à ses films. 

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    La criminalité s’étend à Milan 

    L’histoire est relativement banale. Alors que la criminalité ne fait qu’augmenter à Milan, une bande de braqueur de banques sème la terreur par l’usage qu’elle fait de la violence. La bande de Piero est un trio plutôt soudé, auquel va venir s’ajouter un tout jeune apprenti qui rêve de millions et d’aventure. Mais leur dernier hold-up va tourner au fiasco. Ils abattent un employé de la banque. La voiture dans laquelle ils prennent la fuite est repérée, il s’ensuit une longue traque sanglante qui se terminera par la capture des quatre gangsters.

    L’originalité ne se trouve pas là, mais dans la manière de découper l’histoire et dans celle de filmer. Cela début en effet par une très longue introduction qui nous montre la police en butte à la montée de la violence et de la criminalité dans une ville en voie de modernisation rapide. De là on tombe sur des bandits qui prennent la fuite, mais l’un d’eux est arrêté et va finir par parler. C’est un des membres du gang de Piero. Dès lors on va avoir droit au récit de la genèse du gang, un historique de leurs activités. C’est l’occasion de dresser le portrait de ce curieux attelage. Piero est le chef incontesté. Il mène ses troupes d’une manière à la fois brutale et irresponsable. Sante obéit, sans se poser de questions, simplement parce que Piro est le chef et que, venant de se marier, il a besoin d’argent. Adriano c’est celui qui conduit les voitures, qui les vole aussi et qui se fait attraper par la police le premier. Et puis il y a Tuccio qui est à peine sorti de l’adolescence et qui malheureusement découvre la cache d’armes de Piero et donc qui va se trouver embringué dans ces salades.

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    Piero et son gang braque des banques, parfois plusieurs dans la même journée 

    Une fois que le décor est campé, qu’on a fait le point sur le parcours du gang, le film se consacre sur la fin du gang. D’abord le hold-up qui rate, puis la longue traque du gang par le commissaire Basevi. Le gang se sépare, puis une partie essaie de fuir Milan et se retrouve coincée dans un village, tandis que Tuccio est tout simplement cueilli chez ses parents où il est rentré se réfugier. Entre inconscience, peur et forfanterie, le gang va être détruit. Seul Piero trouvera encore la force de faire rire la galerie lors de son arrestation. Mais le gang aura entre temps laissé derrière lui un certain nombre de cadavres. 

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    Fiers de leur travail le gang prend connaissance des nouvelles 

    Lizzani ne distribue pas une leçon de morale. Et je crois que c’est cette façon très distancié de rendre compte d’un problème de société qui a assuré le succès international du film à sa sortie. Ce n’est d’ailleurs que très tard, au bout d’une demi-heure qu’on voit apparaître à l’écran le personnage central de l’histoire, Piero. Cette façon de faire ôte toute possibilité de donner une touche de romantisme à ces bandits. Mais même si on ne s’attarde pas sur la psychologie de ce gang, il y a suffisamment d’éléments qui nous permettent de les saisir dans ce qu’ils ont d’humain. Ils sont capables de rigoler, de jouir des choses de la vie. Même Piero qui s’éprend de la secrétaire qu’il a embauchée dans la fausse entreprise qu’il a montée comme couverture à ses activités illicites.

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    La poursuite se révèle difficile

    Techniquement c’est un style froid et un peu impersonnel, presque documentaire qui donne justement une personnalité particulière à la ville. Car c’est la Milan industrielle et moderne qui est finalement le vrai sujet. Milan et ses usines qu’on voit fumer dans le lointain, ses entrepôts où Piero tente de se cacher. C’est aussi une ville moderne poussée trop vite avec ses gratte-ciels comme la marque du miracle italien d’après-guerre.

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    Piero sera finalement arrêté

     Le film a été tourné en 1968, et la manière d’opérer de ce gang rappelle celle de Mesrine. D’ailleurs quand il attaque les banques, ils prennent l’accent français derrière leurs masques ! Les scènes d’action sont particulièrement réussies, que ce soit les braquages ou les poursuites en voiture, l’utilisation des décors réels est judicieuse. Il y a une scène de traque dans la campagne milanaise, un déploiement de carabiniers, qui semble avoir inspiré Jean-Pierre Melville pour Le cercle rouge. Il est très probable que Melville ait vu ce film et que c’est là qu’il ait découvert le potentiel de Gian Mario Volonte’ qui tient dans le film de Melville un rôle un peu similaire. Bien sûr il surjoue, mais c’est aussi un peu le personnage qui veut ça. Grimaçant à souhait, ricanant même,  il est assez étonnant, à la limite de la folie. Thomas Milian interprète nonchalamment le commissaire Basevi. Et le reste de la distribution est aussi très bien. En ce sens que les acteurs se fondent tout à fait dans l’anonymat de ce paysage urbain milanais.

     

    Bref c’est une réussite qui va ouvrir la voie à tout un pan du film noir à l’italienne dont Umberto Lenzi sera un des plus prolifiques représentants

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