• La belle de Paris, Under my skin, Jean Negulesco, 1950

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    S’il y a un rôle dans lequel John Garfield excelle, c’est bien celui du looser. C’est le troisième film qu’il tourne avec Negulesco, après le succès de The breaking point, déjà d’après Hemingway, mais c’est aussi l’avant dernier. On pourrait même dire que ce film annonce sa défaite. Tourné en pleine tourmente de la Chasse aux sorcières, c’est le portrait d’un homme broyé par le système et qui a tout raté et qui est condamné.

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    Le fils de Dan est aussi son gardien et sa conscience

    C’est l’histoire d’un jockey, habitué des courses truquées, qui se met presque volontairement dans les ennuis en volant presqu’ouvertement ses commanditaires qui l’ont payé pour truquer une course. Pour cette raison, il est pourchassé et doit s’enfuir d’Italie. Déjà persona non grata aux Etats-Unis, il va tenter sa chance à Paris avec son jeune fils qu’il trimballe un peu de partout avec lui au fil de ses errances.

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    Les gangsters demandent des comptes à Dan

    Là il rencontre une femme, Paule, propriétaire d’un bar et d’un cabaret, chanteuse à ses heures, qui, après l’avoir rejeté va le prendre en pitié et finalement l’aimer. Il se remet à courir et à entraîner un cheval prometteur avec l’espoir de devenir enfin quelqu’un de bien.

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    Dan et son fils arrivent enfin à Paris

    Tout serait presque simple si les gangsters qui ont de la suite dans les idées ne continuaient pas à le poursuivre afin de se rembourser de leurs pertes. Ils vont lui demander de truquer à nouveau une course, ce à quoi il se refusera, et il terminera tragiquement sa vie, mais en gardant une certaine estime de soi.

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           Un cabaret Rive Gauche typique de la vision américaine de Saint-Germain des Prés à croire que les jeunes Français sont tous barbus

    C’est le plus mauvais ou le moins bon des trois films réalisés par le tandem Negulesco-Garfield, mais cela n’est pas dû à Garfield, ni même au scénario, plutôt à la mollesse habituelle de la mise en scène de Négulesco qui n’a jamais eu le sens du rythme, ce qui prive le film de ses ressorts dramatiques. En même temps c’est du Hemingway, donc cette obsession du suicide dans la dignité. La défaite est certaine, mais faisons en sorte qu’elle soit honorable.

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    Dan a noyé son chagrin dans l’alcool et devient la proie d’une entraîneuse

    La trame fait penser à Body and soul, sauf qu’ici il s’agit de courses de chevaux et non de matches de boxe, et que finalement dans le film de Rossen Garfield ouvrait une voie optimiste et combative.

    Le film a bien vieilli et les transparences sont assez mauvaises et donnent un côté burlesque aux courses de chevaux. De surcroit, on aperçoit la doublure de John Garfield plus souvent qu’à son tour. Toutes les scènes d’extérieur censées se passer en Italie sont tournées sans John Garfield : et ça se voit. De même la vision conventionnelle de Saint-Germain des Prés avec ses cabarets enfumés, ses étudiants barbus et son jazz, ne peut être que celle d’un Américain n’ayant guère mis les pieds à Paris.

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     Malgré ses réticences Paule va aimer Dan

     On pourrait encore continuer à relever tous les défauts de ce film un rien larmoyant. Mais il est plus intéressant d’en relever les qualités. Si le film est encore visible aujourd’hui, c’est d’abord grâce à l’interprétation magnifique de John Garfield. Le rôle lui va comme un gant et lui permet d’hésiter entre colère et désespoir, entre courage et lâcheté. Certains pensent même que c’est là son meilleur rôle. C’est presque la seule raison, mais la raison importante, de revoir ce film aujourd’hui. Micheline Presle, qui ici est identifiée comme étant Micheline Prelle, est plutôt bien, elle chante même un peu. Orley Lindgren est très bien dans le rôle de Joe Butler, c’était à l’époque un habitué des rôles d’enfant, il avait incarné Rick Martin Jeune dans le film de Michael Curtiz, Young man with the horn qui fut tourné aussi en 1950. On peut aussi ajouter une mention spéciale à Luther Adler pour son interprétation de Bork, le chef des truands qui veulent la peau de Dan.

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          Dan meurt en ayant retrouvé l’estime de soi

    Comme on le comprend il n’y a hélas pas grand-chose à retenir sur le plan cinématographique de ce film, quelques bagarres, des scènes de romance entre Garfield et Micheline Presle. Et c’est bien tout.

    Un remake calamiteux de ce film a été tourné par John Erman, en 1979 avec Warren Oates dans le rôle de Dan Butler, ce produit, The old man, était destiné à la télévision, ce qui n’excuse rien.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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