• Les sept mercenaires, The magnificent seven, Antoine Fuqua, 2016

    Les sept mercenaires, The magnificent seven, Antoine Fuqua, 2016

    John Sturges fut un grand réalisateur de westerns. Non seulement parce qu’il défendait à travers eux un idéal de justice, mais aussi parce qu’il n’avait pas son pareil pour allier l’analyse de caractères avec une saisie quasi miraculeuse de l’espace. Les sept mercenaires qu’il tourna en 1960, n’est pas son meilleur western. C’était déjà un remake des Sept samouraïs d’Akira Kurosawa. Il y avait quelque chose qui sonnait faux dans les méthodes de recrutement de Chris, et aussi dans le fait de faire correspondre chacun de ces dits mercenaires à des sortes d’idéal-types. Mais enfin, il y avait des acteurs formidables qui devinrent par la suite de grandes vedettes, Charles Bronson qui jusque-là était cantonné aux seconds rôles, James Coburn, et bien sûr Steve McQueen. La tête d’affiche était le grand Yul Brynner. Evidemment quand on voit la distribution du film d’Antoine Fuqua, on sent tout de suite la différence de ton et de classe.

    Les sept mercenaires, The magnificent seven, Antoine Fuqua, 2016 

    Bart Bogue terrorise la ville 

    Bart Bogue est un méchant capitaliste qui rêve d’exploiter les mines d’or qui se trouveraient à Rose Creek, une petite minière où vivent également des paysans. Pour cela il veut racheter la ville et en chasser les habitants. Comme il est très riche, il a à sa solde un grand nombre de tueurs et d’hommes de main qui terrorisent les habitants. Ils brûlent l’église, assassinent. La courageuse Emma Cullen dont le mari a été tué, se révolte et va s’adresser à un chasseur de primes Sam Chisolm, un marshal, pour qu’il vienne mettre de l’ordre dans la ville. Celui-ci va engager six autres individus, courageux et talentueux, ce qui fera bien 7. Ils vont d’abord descendre 22 personnes, membres du gang de Bogue, puis, sachant que Bogue et sa bande vont revenir, ils vont organiser la ville pour qu’elle apprenne à se défendre contre le tyran local. Celui-ci va réunir une véritable armée et attaquer. La bataille sera rude, les morts très nombreux, et parmi les mercenaires ne survivront que trois.

    Les sept mercenaires, The magnificent seven, Antoine Fuqua, 2016 

    Les sept mercenaires s’apprêtent à investir la ville 

    La trame en vaut une autre, le problème c’est qu’il n’y a pas de scénario. Aucune intensité dramatique donc. C’est un cinéma de l’effet, et ici l’effet c’est surtout le nombre de morts qu’Antoine Fuqua peut filmer. Le film aurait pu durer une heure de moins sans problème. C’est un cinéma grimaçant, hésitant entre le western à la sauce spaghetti (les longs manteaux) et le film gore. Cependant, il y a un message sous-jacent à cette entreprise, le capitalisme c’est le mal, la solidarité entre les travailleurs c’est le bien. Et cette solidarité est encore meilleure quand elle se reconnait dans le multiculturalisme. Dans cette volonté œcuménique, on remarque que la logique des quotas joue à plein. Le chef de bande est noir, et il rallie aussi bien un coréen qui connait les arts martiaux et le lancer de couteaux qu’un indien peinturluré, qu’un hispanique. Le tout est béni par le pasteur dont l’église a brûlé. Ce qui nous fait dire que lorsqu’on brûle les églises et qu’on ne respecte pas la volonté du seigneur tout va de travers. Ces bondieuseries d’un autre âge qui auraient pu être en un autre temps primé par l’Office catholique international du cinéma, enfoncent le clou en nous montrant clairement que Bogue est un mécréant qui refuse de prier, alors même qu’il va mourir. Preuve que quelque part il est bien apparenté au Diable. Je pensais que seul Clint Eastwood pouvait encore oser tourner ce genre de débilité, et bien non, je me trompais. A croire que c’est tout le cinéma américain qui patauge dans les eaux troubles de la réaction. Soyons tout de même juste le scénario se réfère à Dashiell Hammett, le peau-rouge porte le nom de Red Harvest qui, pour ceux qui ne savent pas l’anglais, signifie « moisson rouge » et qui est le titre du premier roman publié par Hammett. La référence à la ville minière tombée sous la coupe d’une milice payée par le potentat local est aussi tirée de cet ouvrage.

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    Ils envoient un message clair à Bogue 

    La distribution frise la nullité complète. Mais on peut dire que ça vient d’Antoine Fuqua lui-même qui ne sait pas empêcher ses acteurs de cabotiner. Ils sont livrés à eux-mêmes et en rajoute dans les rictus et les sourires entendus. Denzel Washington ne fait pas grand-chose, Chris Pratt et Etan Hawkes sont carrément ridicules. De ce désastre n’émerge qu’un peu la belle Haley Bennett dans le rôle d'Emma, la seule qui croit qu’il faut donner un peu d’épaisseur humaine à son personnage.

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    La bataille fait rage

    Ajoutons pour faire la mesure que la photo est franchement laide, elle déforme les couleurs pour donner un ton pastellisé – on pourrait dire javellisé -  à l’ensemble. Le film a bénéficié de très gros moyens, le budget était de 90 millions de dollars. Et pourtant malgré cela, Antoine Fuqua n’arrive jamais à saisir l’espace de la petite ville, ni celui de la nature qui l’entoure. Il a beau multiplier les angles de prises de vue, user et abuser de la grue, rien n’y fait, le film reste plat.

    Des scènes ridicules il y en a, ne serait-ce que pour boucler un scénario bâclé. Par exemple l’affrontement final entre Sam et Bogue au milieu de l’église qui a brûlé. Ou encore le personnage de Jack Horne, joué par le malheureux Vincent D’Onofrio, qui passe son temps à tuer des gens à coups de hachette. Entre temps ce tueur d'indiens aura appris à en tolérer un à ses côtés.

    Si le modèle de John Sturges n’était pas grandiose, il avait cependant un certain charme. Le film d’Antoine Fuqua sera rapidement oublié. Produit de circonstances pour amuser les tous  petits et les grignoteurs de pop corn, il a tout de même rapporté pas mal d’argent aux studios qui l’ont produit. Il a fait à peu près le même score que le film de Tarantino, Les 8 salopards, bien qu’il ait coûté deux fois plus cher. Par contre la critique américaine a été cruelle avec ce film, alors qu’en France on a un peu plus de tolérance pour les navets. La preuve ? On croit en France que Clint Eastwood et Quantin Tarantino sont des réalisateurs importants ! 

     

    Certains me reprocheront ma diatribe et surtout d’avoir perdu deux heures de mon précieux temps, au motif qu’on n’a pas besoin de mettre le nez dedans pour savoir que la merde ça ne sent pas très bon ! Mais j’ai le défaut d’être curieux.

    Remarquez que l’affiche des 8 salopards est assez similaire à celle de cette nouvelle mouture des 7 mercenaires. Les deux films étant aussi mauvais l’un que l’autre[1], prétentieux et bien-pensant et se moquant allègrement de leur public, on en conclura que le western est un genre difficile pour les réalisateurs à la mode d’aujourd’hui. Mais n’est-ce pas tout le cinéma américain qui est sur la pente déclinante ? Il est vrai que rares sont les films dont les titres sont des numéros qui sont une réussite. Je n’ose même pas imaginer ce que sera le prochain film à numéro du cinéma hollywoodien ! Sans doute un remake des 12 salopards, mais réduits à 6 pour faire plus moderne et rogner sur le budget !

     Les sept mercenaires, The magnificent seven, Antoine Fuqua, 2016

     

     

     


    [1] Voir ma critique du film de Tarantino : http://alexandreclement.eklablog.com/quentin-tarantino-les-8-salopards-the-hateful-8-2016-a119824480

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