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Nouvelles en vrac de Frédéric Dard
La dernière livraison du Monde de San-Antonio est particulièrement intéressante. On y trouvera un excellent article de Thierry Gauthier sur les origines du personnage de Pinaud, et cela est en rapport avec la publication de Réglez lui son compte, le premier San-Antonio. Une très belle enquête qui nous plonge dans le milieu de l’édition populaire dans l’immédiat après-guerre. Notre ami Thierry Gauthier est particulièrement en veine cette année, il a relu Les yeux sans visage – ce roman qui a donné naissance au superbe film de Georges Franju[1], et il confirme ce que j’ai mis en avant plusieurs fois[2], c’est bien Frédéric Dard qui l’a écrit. On y trouvera aussi un autre très bel article sur la généalogie de Frédéric Dard sous la plume de Lionel Guerdoux, il en arrive à la conclusion étonnante selon laquelle le père de San-Antonio serait en cousinage avec le président Félix Faure dont la mort a été aussi particulière que saisissante !
Comme c’est Noël, j’en profite pour vous rappeler que Lionel Guerdoux a publié l’an dernier avec Philippe Aurousseau un très bel ouvrage qui réunissait en fac-similé les premiers articles, contes et nouvelles de Frédéric Dard, c’est une très belle idée de cadeau à mettre sous le sapin[3] pour ceux qui ne l’ont pas encore.
Je rends grand grâce ici encore plus volontiers à ce travail que je suis en train de préparer un recueil de nouvelles de Frédéric Dard pour le Fleuve noir et que sans le travail de Lionel Guerdoux et Philippe Aurousseau, cela n’aurait pas été aussi facile. Il aura pour titre – suggestion de l’ami Albert Benloulou – Des nouvelles de moi. On en reparlera.
Frédéric Dard aimait le cinéma et il a travaillé énormément pour ce média. En ce moment je revisite les films noirs d’Otto Preminger que j’aime beaucoup. Parmi ceux-ci, il y a l’excellent The man with the golden arm, sortie en 1955. Et bien que je connaisse ce film depuis longtemps, je ne m’étais pas aperçu jusqu’alors que c’est là la source de l’ouvrage de Frédéric Dard C’est toi le venin, et par suite celle de la très belle adaptation de Robert Hossein[4], comme quoi on en apprend à tout âge ! C’est intéressant du point de vue de la généalogie de l’œuvre.
The man with the golden arm, Otto Preminger, 1955
Dans les deux cas, c’est l’histoire d’un homme saisi entre deux femmes, l’une faussement handicapée et tyrannique, l’autre bienveillante qui fera tout pour sauver un homme en perdition. Les deux fausses handicapées termineront leur parcours criminel par une chute radicale qui les éloignera de leur fauteuil.
Le fauteuil à roulette est une arme redoutable, Frédéric Dard le recyclera dans San-Antonio met le paquet[5], avec une autre jeune femme qui simule la maladie et se réfugie dans cet instrument barbare. Et cet ouvrage se terminera avec une défénestration semblable à celle qu’on trouve dans le film de Preminger. Evidemment si le film de Preminger est bien à l'origine du roman de Frédéric Dard, C'est toi le venin, il ne s'agit pas d'un plagiat, ni même d'une variation sur un même thème, les deux sujets restent très différents.
Toi le venin, Robert Hossein, 1959
[1] http://alexandreclement.eklablog.com/les-yeux-sans-visage-georges-franju-1960-a128163102
[2] Alexandre Clément, Frédéric Dard, San-Antonio et la littérature d’épouvante, Les polarophiles tranquilles, 2010.
[3] http://alexandreclement.eklablog.com/lionel-guerdoux-et-philippe-aurousseau-berceau-d-une-oeuvre-dard-frede-a127485814
[4] http://alexandreclement.eklablog.com/toi-le-venin-robert-hossein-1959-a117526410
[5] Un excellent San-Antonio, du moins au point de vue de l’intrigue, Fleuve noir, 1959.
Tags : Frédéric Dard, Le Monde de San-Antonio, Otto Preminger, Robert Hossein, Lionel Guerdoux
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