• The sunchaser, Michael Cimino, 1996

    The sunchaser, Michael Cimino, 1996

    Brandon « Blue » Monroe est un jeune délinquant qui a tué son beau-père. Il a un cancer en phase terminale. Bien que prisonnier, il a droit à des soins qui l’amènent à rencontrer le docteur Reynolds, éminent cancérologue promis à un brillant avenir. Mais Blue qui sait qu’il va mourir rapidement, décide de s’échapper en prenant le Dr. Reynolds en otage. Il poursuit le but de revenir en territoire navajo où se trouve selon lui un guérisseur en haut d’une montagne sacrée. Au fur et à mesure du voyage, Reynolds et Blue vont finir par s’apprécier et passer par-dessus leurs préjugés de classe si on peut dire. Reynolds va tout faire pour aider Blue jusqu’à la fin de son voyage. Il cambriolera la pharmacie d’un hôpital, il volera une voiture, et ira même jusqu’à porter Blue sur son dos pour lui faire terminer son chemin.

     The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Le docteur Reynolds hérite d’un patient peu ordinaire 

    C’est le dernier long métrage de Michael Cimino, celui qui mit un point final à sa carrière de réalisateur. Ce n’est pas un scénario extraordinaire, il y a même dans cette histoire quelque chose d’un peu convenu. Cependant c’est un film intéressant qui dégage une sincérité certaine. C’est à la fois un road movie, avec la rencontre de personnages pittoresques et une analyse des fractures sociales qui font que l’Amérique est ce qu’elle est : un territoire sur lequel les citoyens sont incapables de se comprendre. Reynolds et Blue ne sont pas issus de la même classe. Le premier est riche et brillant, il a une famille, une belle maison. Tout lui réussit. Blue au contraire est né sous une mauvaise étoile. Illettré, il s’est élevé tout seul dans la rue et ne connait la vie qu’à travers son adhésion aux gangs de rues. Reynolds sera effaré de traverser le ghetto où Blue l’amène pour retrouver ses amis et reprendre des forces avant de partir vers la montagne sacrée. Mais il va finir par comprendre et par apprendre de Blue qui est en théorie bien moins instruit que lui. Cette épreuve fera ressortir son humanité.

    The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Reynolds doit aider Blue à se défaire de ses menottes 

    Les oppositions ne s’arrêtent pas cependant à celles des personnages principaux, elles se poursuivent aussi entre le mode de vie urbain frelaté et la magie de la nature dès lors qu’ils vont pénétrer dans le territoire navajo. Cimino essaie d’éviter la naïveté de cette opposition en regardant les navajos comme faisant partie aussi de l’Amérique corrompue : c’est par exemple le vieux guérisseur qui fuit les sbires du trésor, ou encore cette femme indienne qui roule dans une voiture haut de gamme, ou les navajos qui poursuivent les mustangs mais qui pourtant comprennent très bien la langue dominante, l’anglais. L’ensemble forme un puzzle de communautés très disparates et opposées que rien finalement ne peut ressouder. Il y a là quelque chose de désespéré, et la seule solution est celle que choisi Blue, s’exiler dans le rêve d’une vie spirituelle comme antidote à la trop grande dureté de la vie matérielle. En même temps que l’idée d’une grande nation s’effrite à travers ce que voit Reynolds, c’est la totalité de son savoir qui est remis en question, aussi bien par les certitudes de Blue en ce qui concerne le guérisseur que par la rencontre avec la vieille hippie qui les prendra en stop sur le bord de la route. La curiosité de l’attelage formé par Reynolds et Blue vient aussi du fait que la société s’applique à les retrouver, d’abord parce que tout le monde pense que Blue a pris le docteur en otage, mais ensuite parce que la police les menace finalement tous les deux.

     The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Dans la station-service ils font des provisions 

    L’interprétation repose sur le duo Woody Harrelson – Jon Seda. Le premier qui est toujours un excellent acteur a pour particularité dans la vie réelle d’être le fils d’un véritable tueur à gages – Charles Harrelson – qui s’accusa lui-même d’avoir participé à l’assassinat de Kennedy ! Il est encore une fois très bon dans ce rôle qui le transforme d’un homme un peu égoïste et arrivé en un être humain qui fera tout pour satisfaire les derniers désirs de son patient. D’abord craintif et apeuré, il va devenir tout au long du film un être révolté aussi bien contre lui-même que contre son ravisseur et contre son éducation bourgeoise. Jon Seda est bien moins intéressant, il reste plus monolithique dans son jeu et dans son comportement. On reconnaitra aussi dans un petit rôle Ann Bancroft qui interprète Renata la vieille hippie à la fois roublarde et crédule. Mais le reste de la distribution n’est pas particulièrement intéressant, Alexandra Tydings joue Victoria la femme un peu creuse de Reynolds. Très décorative, elle incarne le vide de celles qui n’ont rien de mieux à faire que de dépenser l’argent que gagnent leurs maris. On peut saluer au passage un souci de vérité en ce qui concerne la faune des ghettos, et regretter aussi un peu que les bikers soient si caricaturaux dans leurs vêtements comme dans leur comportement prévisible. Le personnel médical est bien choisi et donne cette image d’une Amérique qui a aussi les moyens matériels de se soigner et d’entretenir sa forme physique, une Amérique repue et satisfaite qui donne volontiers des leçons de vie aux pauvres peu éduqués par nature.

    The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Blue veut rejoindre la montagne sacrée 

    Ce serait un mensonge que de dire que ce film est un chef d’œuvre. Mais il conserve beaucoup de scènes très justes et émouvantes, notamment quand Reynolds s’empresse de sauver d’une mort immédiate Blue. Les scènes d’action sont assez nombreuses et soutenues, bien filmées, elles utilisent toujours parfaitement les mouvements de caméra : quand nous sommes dans la montagne ou dans le désert, il y a de nombreux mouvements de grue qui donnent de la profondeur de champ, mais quand il s’agit de scènes de rue, dans le ghetto, Cimino utilise des travellings plus simples et plus près du sol. Le film n’est pas exempt de scène superflues comme ces rappels un peu trop nombreux de la maladie et de la mort du frère de Reynolds. Tournées en noir et blanc ces scènes sont assez faibles.

     The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Dans le désert ils vont croiser une vieille hippie 

    Le film fut un échec commercial et critique. Considéré comme mauvais il ne fut même pas distribué en salle aux Etats-Unis. Mais en le revoyant vingt ans après on se rend compte que dans l’ensemble il tient assez bien la route. Cet échec mit un terme à la carrière de réalisateur de Cimino. Il présente même une certaine cohérence avec le reste de la filmographie pessimiste du réalisateur, ce goût pour les losers, cette analyse des fractures ethniques de l’Amérique.

     The sunchaser, Michael Cimino, 1996 

    Un vieil indien apparaît en haut de la montagne sacrée

    « L’assassinat de Trotsky, The assassination of Trotsky, Joseph Losey, 1972Jean Contrucci, L’affaire de la Soubeyranne, Lattes, 2015 »
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