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Valerie, Gerd Oswald, 1957
Voilà une rareté, bien qu’avec la numérisation accélérée des films anciens cette idée de rareté devient très relative. C’est un film noir assez singulier puisqu’en effet il se situe dans les années 1860, dans une petite ville de l’Ouest. John Garth, un riche éleveur qui s’est conduit en héros pendant la Guerre de sécession, épouse une jeune étrangère, mais quelques temps après le mariage, il tue ses parents et la blesse, la laissant pour morte. Dès lors il y aura un procès. Et durant ce procès le spectateur comme le jury va essayer de se faire une opinion aussi bien sur les raisons de ce massacre que sur le déroulement des faits proprement dits. Chacun va donner sa version, et un peu comme dans Rashomon le modèle du genre, ou dans L’outrage de Martin Ritt, l’histoire évolue avec ces différentes versions.
Garth est convié à témoigner
Ce film est donc bâti plus sur des principes de mise en scène qu’une histoire, et ça se voit. De Gerd Oswald, j’ai déjà commenté l’excellent Crime of passion avec déjà Sterling Hayden et Barbara Stanwyck, un autre film noir. Mais Valérie lui est, il faut bien le dire, très inférieur. C’est un problème de scénario, malgré la multiplication des effets, la fin de recèle aucune surprise et la psychologie des personnages n’est pas très approfondie, c’est à peine si on sait que Garth a commis des exactions en service commandé pendant la guerre, et que Valérie souffre de son statut d’immigrée récente. Par exemple on ne comprend pas pourquoi Garth ne s’intéresse pas au corps de Valérie. De même le personnage du frère est peu compréhensible.
Garth est-il un mari violent et alcoolique ou victime d’une femme sans scrupule ?
Valerie hésite un peu entre le film noir et le film de procès. Mais la lourdeur qu’on trouve généralement dans les films de procès, est escamotée rapidement par les flash-back, ce qui fait qu’on n’a pas trop le temps de s’intéresser aux arguties de la défense ou du procureur. Ce qui sauve le film c’est avant tout la mise en scène atypique d’Oswald. C’est un film sombre qui, à part quelques rares scènes où on voit des bêtes et des pâtures, ne laisse rien voir de ce que pouvait être l’Ouest profond. Avec de longs flash- back, toutes les recettes du film noir vont être convoquées, les ambiguïtés, le flou de la mémoire, une violence latente venue d’un passé lointain. Des jeux d’ombres et de lumière vont renforcer ce sentiment.
Le révérend semble très attiré par Valerie
L’interprétation est plus discutable. Sterling Hayden est très bon, capable de se montrer bon garçon, mari malheureux et pourtant attentionné, et cruel et violent avec des intonations de colère rentrée. C’est d’ailleurs cette double dimension du personnage si bien incarnée par Sterling Hayden qui sauve le film. Et c’est essentiellement pour lui qu’on conseillera de le regarder.
Les autres acteurs sont plutôt mauvais. A commencer par Anita Ekberg qui trimbale un physique robuste, finalement très irréaliste dans le rôle d’une jeune fille qui craint sa nuit de noce. Elle est plus crédible évidemment en vamp qui cherche à séduire à la fois le pasteur et le frère de Garth. Heureusement qu’elle n’est pas présente dans tout le film. Ça se gâte encore plus avec Anthony Steel qui joue le révérend et qui à l’époque était le mari d’Anita Ekberg. Il est plutôt mollasson et n’a pas l’air de croire beaucoup à son rôle de pasteur à la fois séduit par Valerie et persuadé de sa mission d’homme d’Eglise.
Garth force sa femme à boire
C’est un film à petite budget. Il a sans doute été monté suite au succès de Crime of passion. Du point de vue cinématographique on retiendra quelques scènes, comme le début quand John Garth assassine la famille Horvath sans qu’on ne voit rien. Ou alors lorsque Garth force sa femme à boire. Le rythme est soutenu, et malgré tous les défauts qu’on a évoqués, on ne s’ennuie guère. La photo est excellente aussi.
Garth tente de fuir la justice
Son frère s’opposera à lui dans un ultime duel
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