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    On garde le souvenir de Sophia Loren comme une des grandes actrices du cinéma italien, en oubliant qu’elle a eu aussi une carrière internationale et qu’elle a tourné avec de solides metteurs en scène américains. Du reste lorsqu’elle tourne Le couteau dans la plaie, elle a déjà fait un film avec Anthony Perkins, Le désir sous les ormes, signé Delbert mann en 1957. Entre temps Perkins est devenu une grosse vedette en tournant Psycho d’Alfred Hitchcock.

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    Robert doit prendre l’avion pour Casablanca

     Robert et Lisa Macklin forment un couple en train de se défaire. Robert, immature et jaloux fait des scènes pas possibles à Lisa, allant jusqu’à la battre. Mais Robert doit faire un voyage au Maroc, en prenant l’avion, il contracte une assurance sur la vie au profit de Lisa. On apprend rapidement que l’avion s’est abîmé du côté de Bordeaux et qu’il ne reste plus aucun survivant. Lisa qui voulait divorcer de Robert, reste pourtant sous le choc. Mais voilà que très peu de temps après Robert réapparait. Un peu cabossé il est le seul survivant. Il envisage tranquillement d’encaisser la prime d’assurance, et de refaire sa vie avec Lisa ailleurs, au Brésil. Celle-ci accepte en pensant qu’en lui donnant l’argent, il la laissera enfin tranquille et qu’elle pourra recommencer sa vie. En attendant, elle cache Robert dans son appartement et continue sa vie, avec son travail dans un magasin de couture et avec ses amis. Pourtant les choses vont se compliquer : d’une part elle rencontre David, un journaliste curieux comme un pet, mais d’autre part, un enfant a vu Robert dans l’appartement. Cahin-caha les affaires s’avancent, Lisa va encaisser l’argent, mais elle doit toujours supporter le caractère jaloux de Robert qui n’envisage plus de la quitter et qui menace même de la dénoncer pour une escroquerie à l’assurance. La situation devient d’autant plus chaotique que Lisa semble céder aux avances de David. Bref toute cette pression l’amène au bord de la folie et elle finira par tuer Robert. Le louche David va finalement la dénoncer en découvrant partiellement la vérité.

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    Lisa doit supporter le retour inattendu de Robert

    C’est un film à mi-chemin du film noir et du thriller. Mais ceci n’excuse pas le fait que cela reste terriblement long et ennuyeux. Tous les rebondissements sont téléphonés. Et puis si le couple Macklin est à peu près clairement défini, il n’en va pas de même des autres personnages. A commencer par le louche David incarné par un Gig Young dont on se demande comment une belle fille comme Lisa peut avoir quelque attention, non seulement il n’est pas très beau, mais il est collant et désagréable au possible. Si l’ensemble est assez bien filmé, notamment les extérieurs parisiens, le rythme reste pourtant assez mou. C’est presqu’aussi mauvais que du Hitchcock du côté duquel le film lorgne.

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    Espérant se débarrasser de Robert, Lisa fait les démarches pour toucher la police d’assurance

     Je ne m’amuserais pas à faire le décompte des nombreuses invraisemblances qui plombent le récit. Par contre, l’interprétation est assez faiblarde. Gig Young est assommant, et Anthony Perkins surjoue les grands garçons mal sevrés. Même Sophia Loren à l’air de s’emmerder trois francs six sous.

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    Robert se cache dans l’appartement, mais quelqu’un l’observe

     Le film a eu un certain succès à sa sortie, du moins en France pour ce que j’en sais. Et Anatole Litvak récidivera dans le même genre en adaptant encore une histoire de femme fragile impliquée dans un imbroglio qui la dépasse. Ce sera La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil, un excellent ouvrage de Sébastien Japrisot, mais malheureusement ce sera un nouvel échec pour Litvak qui semblait avoir alors perdu un peu la main.

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    Robert rencontre Johnny sur les toits de Paris

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    Lisa pense trouver quelqu’un de compréhensif en la personne de David

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    Lisa après avoir tué Robert perd la raison

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    David pense découvrir la clef de l’énigme

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    En ce qui concerne le film noir, Russell Rouse est surtout connu pour le film assez étrange The thief, faux film d’espionnage où il ne se passe rien et où on parle encore moins puisqu’il n’y a pas du tout de dialogue. New York confidential est aussi un film noir atypique et un des chaînons qui nous mènera au Parrain de Coppola, véritable acte refondateur. Du reste de nombreux éléments qui se trouvent dans New York confidential seront repris dans Le parrain. 

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    Arnie dresse un plan pour éliminer

     Charlie Lupo, membre éminent de la Mafia, a des soucis avec un concurrent. Il fait donc appel à Nick Magellan pour exécuter le récalcitrant. Mission dont Nick s’acquitte parfaitement. Nick est loyal et une amitié va naître entre Charlie et Nick. Ce dernier gravit rapidement les échelons et devient l’homme de confiance de Charlie. Il va se charger de remettre au pas un membre un peu récalcitrant du syndicat. Mais Charlie a une fille, celle-ci en âge de se marier, a des difficultés dans la vie à cause de la réputation sulfureuse de son père. Nick est très attiré par elle, même s’il reste plutôt froid et ne manifeste guère son intérêt.  Charlie est aussi affublé d’une maîtresse, Iris, genre un peu connasse sur le retour, qui ne pense qu’à faire du rentre-dedans à Nick. Mais celui-ci bien respectueux des convenances ne réagit pas vraiment à ces avances.

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    Nick est admis à la table de Charlie où il fait la connaissance de sa fille

     Les choses vont se gâter lorsque les autorités judiciaires vont décider de poursuivre le syndicat et donc particulièrement Charlie Lupo. Les arrangements du syndicat sont dénoncés, ce qui entraîne des pertes énormes pour la Mafia. Pour se protéger, celle-ci éloigne me bras droit de Charlie, et se met à exécuter ceux qui peuvent lui nuire. Mais Arnie a un peu merdouillé et cela va entraîner la perte de Charlie. Car Arnie va comprendre que Nick cherche à éliminer tous les témoins des activités criminelles de Charlie et va se vendre à la justice en dénonçant tout le monde. 

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    Nick punit Sumack qui l’a pris un peu à la légère

    Dès lors la Mafia va demander à Nick de faire le ménage et de tuer Charlie. A contre-cœur Nick accepte le contrat, pensant toujours que le syndicat doit être au-dessus des intérêts personnels. Mais ce qu’il ne sait pas c’est que la Mafia va aussi le condamner et il finira le nez sur le trottoir. 

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    Arnie et Shorty ont raté leur exécution

    Si aujourd’hui l’histoire peut paraître assez banale, elle était assez originale en 1955, présentant en effet les membres de la Mafia – le mot n’est pas prononcé, on lui préfère celui de « Syndicat » – comme des êtres humains assez ordinaires, plutôt tributaires de leur métier. Certes ils manipulent une forme de violence, mais cela ne leur enlève en rien leur dimension humaine. C’est d’ailleurs sur ce point qu’on peut rapprocher New York confidential de The thief, puisque dans ce film complètement muet l’espion était bien quelqu’un de très ordinaire, suivant une routine. Même s’il y a une violence latente, l’action ne prime pas. Et d’ailleurs dans New York confidential c’est bien ce qui se passe aussi, il y a très peu d’action. Les personnages passent leur temps à bavarder. Ce film fait donc partie de cette longue chaîne de films qui vont à la fois dédramatiser la Mafia et en même temps leur ôter le prestige des films de gangsters. C’est d’ailleurs ce courant qui va se développer dans la seconde moitié des années cinquante et faire évoluer le film noir vers une description plus véridique du monde de la criminalité. 

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    Arnie menace de balancer tout le syndicat

    C’est un film donc un peu atypique, bien que les rôles soient tenus par des habitués du genre noir. Richard Conte et Nick et Broderick Crawford est Charlie. D’après ce qu’on sait il s’agissait d’un second choix, Russell Rouse voulait à l’origine engager George Raft et Paul Muni, leur refus de s’engager dans cette aventure a permis justement à Crawford et Conte de montrer tout l’étendu de leur talent, surtout Crawford qui, avec son visage asymétrique, son nez cassé, a une présence formidable et qu’à mon avis il convient de réévaluer sa place dans la saga du film noir. Richard Conte a bien plus de présence que George Raft dans le rôle d’un tueur taciturne. Si Marylin Maxwell ne présente guère d’intérêt dans le rôle d’Iris, Anne Bancroft par contre est tout à fait saisissante dans le rôle de cette fille de son père tourmentée par ses ascendances criminelles qui finira par se suicider. Elle préfigure le personnage de Connie dans Le parrain. Bien sûr comme il se doit dans ce genre de films, les seconds rôles sont tout à fait intéressants : à commencer par le géant Mike Mazurski dans le rôle de la brute Arnie ou  John Doucette dans celui de Shorty. 

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    Iris drague ouvertement Nick

    On saura gré bien évidemment à Russell Rouse de ne pas avoir fait de cette hsitoire un film d’action où les fusillades et les morts se multiplient, ou encore de ne pas avoir donné une dimension mythique à la Mafia comme à la justice qui est censée lutter contre elle.

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    Nick aime Katherine, mais il n’ose pas le manifester

    Malgré toutes ces qualités, le film comporte un certain nombre d’insuffisances pour en faire un grand film. Le premier point est le côté un peu théatral. En effet, non seulement les plans en extérieur sont très réduits – probablement à cause d’un budget resserré – mais en outre le film est plutôt bavard, explicatif, même si Nick est censé être plutôt du genre taiseux. Egalement on peut reprocher à Russell Rouse qui est aussi responsable du scénario, de s’être un peu dispersé, de ne pas avoir choisi un angle d’attaque sûr. Qu’est-ce qui est important ? L’amitié entre Nick et Charlie ? L’histoire d’amour avortée entre Katherine et Nick ? Ou au contraire la chute du syndicat face à la détermination de la justice.   

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    Après le ratage d’Arnie, Nick fait le ménage

     C’est un film important dans l’évolution de la représentation du crime organisé, possédant un rythme soutenu, il mérite un peu plus qu’un détour.

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    C’est un film qui n’a pas une bonne réputation. Et c’est également le remake de 20000 years in Sing Sing réalisé en 1932 par Michael Curtiz et interprété par Spencer Tracy. Ce sont les mêmes scénaristes qui ont travaillé pour les deux films.

    Basé sur le récit de l’ancien directeur de prison de Sing Sing, c’est l’histoire d’un petit voyou qui, condamné à une lourde peine pour un vol commis avec une arme à feu va finir sur la chaise électrique. Tom Gordan travaille pour des gangsters qui ne se mouillent guère. Par contre, lui est une grande gueule qui défie le monde entier et ne prend guère de précaution. Sa vie est toute tracée de sa naissance miséreuse, son absence d’affection familiale, jusqu’à sa capacité de se faire manipuler par de plus malins que lui. Il va donc tomber pour un cambriolage, mais il est soutenu par Kay qui l’aime et qui espère bien qu’il retrouvera le droit chemin. Elle prendra d’ailleurs des risques pour l’aider, mais c’est justement cela qui mènera Tom à sa perte. En effet, en voulant l’aider, elle se met dans les pattes d’un avocat véreux, Crowley, qui va chercher à abuser d’elle. Pour échapper à son emprise, elle sautera en marche d’une voiture.

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    Tom va se rebeller contre la prison et ses règles     

    Cet accident la laisse à l’hosto entre la vie et la mort. Le directeur de la prison autorise Gordan à aller la voir en lui faisant promettre qu’il reviendra. Mais voilà, Gordan tombe sur Crowley, se bat avec lui, et Kay le tue. Personne ne voulant croire que c’est elle qui l’a butté, Gordan est condamné à la chaise électrique.

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    Tom et Rockford préparent une évasion

    C’est un film humaniste, à la fois militant contre la peine de mort, et pointant du doigt l’inconséquence des médias qui attise la haine de la foule en désignant des coupables sans autre forme de procès. On peut le rapprocher du film de Robert Siodmak, La proie tiré du roman de Henry Edward  Helseth, roman qui sera aussi adapté par José Giovanni sous le titre d’Un aller simple. Cependant, il reste assez difficile à juger. S’il comporte de très bonnes séquences, il paraît un peu fait de bric et de broc, hésitant à se centrer sur son sujet, la peine de mort et la prison. Trop de digressions éparpille l’attention du spectateur. Mais si le premier tiers est assez raté, les scènes de prison, la révolte de Tom, la fin vers la chaise électrique, sont extrêmement bien faites et tiennent en haleine.  Il y a même une certaine ambiguïté bien venue dans le personnage du directeur de prison qui cherche à briser Tom, à l’uniformiser, à le fondre dans la masse des prisonniers. Ayant mis Tom à l’isolement pendant plusieurs mois, celui-ci finira par accepter de travailler dans les ateliers de la prison pour échapper à la cruauté de son sort. Mais Tom n’est pas forcément sympathique : arrogant et vicieux, il se croie un peu au-dessus des lois. C’est pourtant un pauvre garçon, rongé par le doute, portant la fatalité de son existence comme un fardeau que seul l’amour de Kay peut l’aider à supporter. 

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    Rockford rate son évasion et mourra

    Cette ambigüité se retrouve dans le comportement de Tom par rapport à Kay, il espère quelque chose d’elle, tout en voulant qu’elle se détache de lui, mais il s’aperçoit bientôt qu’il n’a qu’elle dans la vie. Elle-même n’est pas très nette non plus et ses tentatives pour sauver Tom en se rapprochant de Crowley paraisse aussi ambigües que désespérées.

    Le scénario possède ainsi beaucoup de finesses qui sont peut-être un peu masquées par des dialogues trop abondants et une mise en scène trop directe. Le personnage de Rockford, son ironie, son intelligence, donne un ton décalé au film, il est plus intéressant que celui stéréotypé de Mike. Il mourra d’ailleurs dans des conditions assez bizarres, se suicidant quasiment en se jetant dans le vide.

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    Kay reste fidèle à Tom et vient le voir au parloir

    Si les scènes du début, la rue, le hold-up, le cabaret, sont assez quelconque, bien que traditionnelles pour un film noir, vite expédié – le film est assez court – il n’en est pas de même pour la prison. C’est un peu plus soigné, les décors sont plus travaillés. Bref c’est sur cet aspect que Litvak a fait porter tous ses efforts. L’évasion ratée de Rockford, la façon dont il va grimper dans les étages dans une fuite folle et sans espoir, est tout à fait remarquable. Et bien sûr on remarquera la discrétion avec laquelle est filmée la marche de Tom dans le couloir de la mort.

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    Cette crapule d’avocat pense qu’il va se faire faire un avantage par Kay

    L’interprétation est de first qualité. John Garfield en tête, mais aussi Ann Sheridan, la scène finale où les deux amants se font leurs adieux est tout à fait poignante. Pat O’Brien est toujours égal à lui-même dans ce rôle de cureton patient et obstiné qui veut remettre dans le droit chemin les brebis égarées. Burgess Meredith est très bon dans la peau de Rockford, une sorte d’intellectuel égaré dans un monde d’idiotie.

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    Tom s’en ira dignement vers la mort

    Bref si ce n’est pas un chef d’œuvre, c’est tout de même un film très intéressant, marqué par l’engagement physique, quasi animal de John Garfield.

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    S’il y a un rôle dans lequel John Garfield excelle, c’est bien celui du looser. C’est le troisième film qu’il tourne avec Negulesco, après le succès de The breaking point, déjà d’après Hemingway, mais c’est aussi l’avant dernier. On pourrait même dire que ce film annonce sa défaite. Tourné en pleine tourmente de la Chasse aux sorcières, c’est le portrait d’un homme broyé par le système et qui a tout raté et qui est condamné.

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    Le fils de Dan est aussi son gardien et sa conscience

    C’est l’histoire d’un jockey, habitué des courses truquées, qui se met presque volontairement dans les ennuis en volant presqu’ouvertement ses commanditaires qui l’ont payé pour truquer une course. Pour cette raison, il est pourchassé et doit s’enfuir d’Italie. Déjà persona non grata aux Etats-Unis, il va tenter sa chance à Paris avec son jeune fils qu’il trimballe un peu de partout avec lui au fil de ses errances.

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    Les gangsters demandent des comptes à Dan

    Là il rencontre une femme, Paule, propriétaire d’un bar et d’un cabaret, chanteuse à ses heures, qui, après l’avoir rejeté va le prendre en pitié et finalement l’aimer. Il se remet à courir et à entraîner un cheval prometteur avec l’espoir de devenir enfin quelqu’un de bien.

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    Dan et son fils arrivent enfin à Paris

    Tout serait presque simple si les gangsters qui ont de la suite dans les idées ne continuaient pas à le poursuivre afin de se rembourser de leurs pertes. Ils vont lui demander de truquer à nouveau une course, ce à quoi il se refusera, et il terminera tragiquement sa vie, mais en gardant une certaine estime de soi.

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           Un cabaret Rive Gauche typique de la vision américaine de Saint-Germain des Prés à croire que les jeunes Français sont tous barbus

    C’est le plus mauvais ou le moins bon des trois films réalisés par le tandem Negulesco-Garfield, mais cela n’est pas dû à Garfield, ni même au scénario, plutôt à la mollesse habituelle de la mise en scène de Négulesco qui n’a jamais eu le sens du rythme, ce qui prive le film de ses ressorts dramatiques. En même temps c’est du Hemingway, donc cette obsession du suicide dans la dignité. La défaite est certaine, mais faisons en sorte qu’elle soit honorable.

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    Dan a noyé son chagrin dans l’alcool et devient la proie d’une entraîneuse

    La trame fait penser à Body and soul, sauf qu’ici il s’agit de courses de chevaux et non de matches de boxe, et que finalement dans le film de Rossen Garfield ouvrait une voie optimiste et combative.

    Le film a bien vieilli et les transparences sont assez mauvaises et donnent un côté burlesque aux courses de chevaux. De surcroit, on aperçoit la doublure de John Garfield plus souvent qu’à son tour. Toutes les scènes d’extérieur censées se passer en Italie sont tournées sans John Garfield : et ça se voit. De même la vision conventionnelle de Saint-Germain des Prés avec ses cabarets enfumés, ses étudiants barbus et son jazz, ne peut être que celle d’un Américain n’ayant guère mis les pieds à Paris.

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     Malgré ses réticences Paule va aimer Dan

     On pourrait encore continuer à relever tous les défauts de ce film un rien larmoyant. Mais il est plus intéressant d’en relever les qualités. Si le film est encore visible aujourd’hui, c’est d’abord grâce à l’interprétation magnifique de John Garfield. Le rôle lui va comme un gant et lui permet d’hésiter entre colère et désespoir, entre courage et lâcheté. Certains pensent même que c’est là son meilleur rôle. C’est presque la seule raison, mais la raison importante, de revoir ce film aujourd’hui. Micheline Presle, qui ici est identifiée comme étant Micheline Prelle, est plutôt bien, elle chante même un peu. Orley Lindgren est très bien dans le rôle de Joe Butler, c’était à l’époque un habitué des rôles d’enfant, il avait incarné Rick Martin Jeune dans le film de Michael Curtiz, Young man with the horn qui fut tourné aussi en 1950. On peut aussi ajouter une mention spéciale à Luther Adler pour son interprétation de Bork, le chef des truands qui veulent la peau de Dan.

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          Dan meurt en ayant retrouvé l’estime de soi

    Comme on le comprend il n’y a hélas pas grand-chose à retenir sur le plan cinématographique de ce film, quelques bagarres, des scènes de romance entre Garfield et Micheline Presle. Et c’est bien tout.

    Un remake calamiteux de ce film a été tourné par John Erman, en 1979 avec Warren Oates dans le rôle de Dan Butler, ce produit, The old man, était destiné à la télévision, ce qui n’excuse rien.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Ce film est fait pour ceux qui douteraient que Roger Corman est un bon cinéaste. Petit film fauché, passé quasiment inaperçu à sa sortie, c’est un excellent film noir. Le sujet est assez simple. Dans une petite ville du sud des Etats-Unis, au moment où le Congrès vote des lois sur la fin de la ségrégation, un agitateur d’extrême droite va venir semer le trouble et tenter de générer une violence qui finira par démontrer que les lois nouvelles sont mauvaises puisqu’elles sèment le désordre et la violence. Il s’agit d’empêcher que les écoliers blancs et noirs soient mélangés dans une même école. Cramer est un opportuniste séduisant, un provocateur professionnel qui a choisi le combat raciste. On ne sait pas vraiment quelles sont ses convictions profondes. Son mode d’être est la manipulation. Comme il manipule les foules, il manipule une jeune adolescente qu’il séduit, ou encore la femme de son voisin. Les tensions deviennent de plus en plus fortes, le journaliste qui se découvre une conscience sociale est battu, il perd un œil, le pasteur noir est assassiné dans l’attentat contre son église. Mais comme cela ne semble pas suffirre, Cramer va inciter Ella à faire croire qu’un jeune noir a tenté de la violer. Mais tout cela finira relativement bien, sauf pour Cramer qui devra quitter la ville.

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    Adam Cramer est un beau parleur séduisant

    C’est évidemment un film de combat. Un film de gauche si on veut. Les oppositions sont assez tranchées entre les ploucs du Sud qui ne demandent qu’à être manipulés par un beau parleur arrogant et sûr de lui, et les plus instruits – le journaliste, ou le directeur du collège – qui représentent la conscience et le savoir. Mais si ce n’était que cela le film ne serait que moyennement intéressant. Or il y a bien autre chose. D’abord le portrait d’un homme, Cramer, plutôt séduisant, propre sur lui, qui tient de l’agitateur politique et du prêcheur. On trouve très souvent dans les films américains ces portraits de faux-jetons, qui visent à emporter les foules grâce à leurs capacités oratoires, Elmer Gantry de Richard Brooks, Wise blood de John Huston, avec chaque fois des interrogations sur les raisons de ce type de conduite. Ici c’est le simple Sam Griffin qui va révéler la lâcheté et la bassesse de Cramer.

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    Il sait flatter la foule et l’amener vers la violence

    L’histoire est adaptée d’un ouvrage de Charles Beaumont qui fut un gros succès de librairie. L’auteur, plutôt spécialisé dans les récits de science fiction, il est le créateur de la série télévisée The twillight zone, joue du reste un petit rôle dans le film de Corman, il est le directeur du collège qui prend fait et cause pour les nouvelles anti-ségrégation.

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    Les premières éditions américaine et anglaise de l’ouvrage de Charles Beaumont

    Le film possède de nombreuses qualités. D’abord cette manière de rendre compte de la passivité mais aussi de l’agressivité latente de la foule. C’est très bien réalisé, avec des contre-plongées mettant en lumière la puissance de persuasion de Cramer, ou de longs travellings parfaitement enchaînés lorsque les jeunes noirs parcourent la ville pour se rendre au collège et croisent nécessairement les jeunes blancs comme dans une sorte de ballet bien réglé.

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    Les vieilles ficelles du KKK sont utilisées pour térroriser les nègres

    Le rythme est enlevé, et si la fin optimiste du film est un peu téléphonée, cette faiblesse est largement compensée par la vérité quasi-documentaire de la description des lieux et des mentalités qui prévalaient à cette époque dans le Sud. Il est à noter que le scénario évite la complaisance d’une violence spectaculaire. Le sujet se prêtait assez bien à mettre en scène la violence de la foule bornée, mais cela est évité, le réalisateur préférant mettre l’accent sur les relations de passivité de cette foule vis-à-vis de son leader qui pourrait la mener n’importe où.

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    La jeune Ella est troublée par les violences infligées à son père

    Les acteurs sont tous très bons. A commencer par William Shatner qui deviendra ensuite célèbre dans la série Star Trek. Il représente très bien ce mélange de lâcheté et de séduction inquiétant. Il avait une nervosité, une mobilité faciale qu’il perdra ensuite. Mais tous les acteurs sont très bons, même si ce sont des acteurs de seconde zone, c’est-à-dire des seconds rôles sans trop de glamour. Cela va très bien avec le fait qu’il s’agit de personnes ordinaires. Robert Emhardt trimballe sa lourde silouhette pour jouer le rôle d’un potentat local. On donnera une mention spéciale à Leo Gordon qu’on reverra ensuite dans L’arme à gauche de Claude Sautet.

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    Joey est accusé d’avoir tenté de violer Ella

    Quelques scènes restent marquantes, comme cette confrontation entre Sam Griffin et Adam Cramer, le premier hésitant manifestement à tuer le second, puis choisissant de lui démontrer combien sa lâcheté lui enlève toute valeur. Egalement cette foule qui s’apprête à lyncher le nègre Joey, sous le regard rigolard des petits enfants qui s’amusent de la rudesse avec laquelle Shipman le dresse. Ce qui est sans doute le mieux rendu est l’incompréhension des gens du sud, la propre famille de McDaniel, dans le bouleversement qu’amènent les nouvelles lois.

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    Shipman se pose en dresseur de nègres

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          Sam Griffin va faire capoter le plan machiavélique de Cramer

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