• Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma…, Hachette, 1985

      Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma…, Hachette, 1985

    Gene Tierney fait partie de cette longue cohorte d’actrices que le système hollywoodien a martyrisées : Frances Farmer, Marylin Monroe, ou encore Heddy Lamarr. Devenue rapidement à cause de sa beauté, une star de premier plan, elle dut affronter une série d’épreuve arrivée au sommet de la gloire. Mineure elle commença à gagner beaucoup d’argent, mais comme son père s’en servait pour combler ses déficits, elle fut dans l’obligation de lui faire un procès, alors même qu’elle avait été élevé dans une tradition vieillotte qui, entre autres, visait à célébrer la famille comme le dernier refuge de la civilisation. Mais sur le plan personnel elle fut aussi presque toujours attiré par des abrutis de première qui la consommaient comme un trophée. Elle se maria ainsi avec une sorte de pou, Oleg Cassini, un faux aristocrate, mais un vrai escroc qui collectionnait les vedettes, passant de Grace Kelly à Gene Tierney par exemple. Il se prétendait être une sorte de champion des élégances et d’ailleurs il finit par se faire un petit nom dans la mode. Mais entre deux disputes, Oleg Cassini lui fit un enfant. Or cet enfant naquit à moitié sourde et à moitié aveugle. Déficience mentale, Gene dut la placer dans une institution. 

    Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma…, Hachette, 1985 

    Avec son premier mari Oleg Cassini 

    Elle eut également des relations impossibles avec John Kennedy qui pour des raisons de haute politique ne pouvait épouser une actrice de cinéma. Il eut aussi le même type de relations avec Marylin Monroe, pensant qu’un mariage avec une star de cinéma serait un handicap auprès de ses électeurs. Marylin Monroe ne s’en remit pas, et Gene Tierney regrettait cette désinvolture. Egalement elle fréquenta le névrosé Howard Hughes, puis le fétard Ali Khan qui avait été marié avec Rita Hayworth qui elle aussi connut des tourments à n’en plus finir. A croire qu’elle choisisait toujours des rôles de femme-martyr. Avec les hommes, elle semblait avoir une grande capacité pour tirer le mauvais numéro. Tout cela ne l’empécha pas pourtant de faire dans les années quarante et au début des années cinquante une carrière exceptionnelle. Gene Tierney, c’est en effet l’héroïne de Laura, Leave her to heaven, son rôle préféré, The ghost and Mrs Muir, Shangai gesture, Where the sidewalk ends, ou encore Night and the city. Son physique élégant, calme et passionné se mariait à merveille avec le film noir. Rien que les films que nous venons de citer suffisent à la classer tout en haut du panthéon des actrices remarquables. Il serait cependant erroné de ne voir en Gene Tierney qu’un physique exceptionnel, c’était aussi une excellente actrice, elle le montra dans des rôles compliqués comme celui d’Ellen dans Leave her to heaven[1], ou dans celui de Lucy Muir dans The Ghost and Mrs Muir de Joseph Mankiewicz qu’elle illuminait de toute sa grâce. Elle a tourné avec de très grands réalisateurs : Otto Preminger, Joseph Von Stenberg qu’elle décrit comme une sorte de pendant masculin au personnage de Norma Desmond dans Sunset Boulevard, Joseph Mankiewicz, John Stahl, John Ford, Fritz LangHenry Hathaway, William Wellman ou encore Jules Dassin et Michael Curtiz. Une belle performance.

    Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma…, Hachette, 1985

    Mais, sous contrat avec la Fox, elle ne se préoccupait pas vraiment de bien choisir les films dans lesquels elle jouait. Et puis elle commença à perdre la tête. Elle fait d’ailleurs le rapprochement entre son histoire et celle de Frances Farmer qui fut aussi internée et qui après son internement travailla comme employée dans un hotel. Gene Tierney travailla comme vendeuse dans une boutique de prêt à porter pour un tout petit salaire, alors qu’elle était habitué à vivre dans un luxe extravagant en ce qui concernait ses toilettes et ses bijoux.

    Une grande partie de son livre est consacrée consacrée à la fréquentation des hôpitaux psychiatriques qu’elle a visités. Cette description des souffrances de Gene Tierney ferait passer Shock corridor de Samuel Fuller pour une aimable bluette. Il y avait d’ailleurs en ces années là une véritable fascination pour la psychanalyse et la psychiatrie, dans ses représentations filmiques aussi bien que dans la pratique. Elle subit 32 séances d’électrochocs qui la laissèrent sur le flanc. Et en réalité, elle ne se rétablit jamais vraiment et s’éloigna des studios après 4 ans de fréquentation de ces établissements de psychiatrie brutale. Elle nous dit que finalement elle se retrouva un peu avec son nouveau mari, Howard Lee. C’est un ouvrage touchant qu’elle a écrit, sans jamais vraiment se plaindre, sans non plus incriminer le métier qu’elle avait choisi avec enthousiasme et qui pourtant lui amena énormément de déconvenues. Elle appartient à la légende de l’âge d’or d’Hollywood dont elle regrettait la disparition. Contrairement à de nombreux ouvrages d’anciennes stars de cinéma, celui-ci n’est pas convenu, il possède une belle densité.

    Elle ne s’attarde guère cependant sur les films qu’elle a tournés et sur les acteurs et les réalisateurs qu’elle a cotoyés, les dépeignant souvent avec beaucoup de tendresse et très rarement avec rancœur ou méchanceté. On apprendra entre autres choses que Tyrone Power tomba amoureux d’elle, mais qu’elle le repoussa bien qu’elle le trouva gentil, beau et attentionné, elle lui préféra à cette époque le sinistre Ali Khan. Le portrait d’Howard Hughes vaut le détour, elle le décrit comme un homme sensible, complètement fêlé, mais aussi comme quelqu’un de très sale. Elle semble dire qu’entre eux il ne s’est rien passer de concret, c’est tout à fait possible, sachant qu’elle avait été élevée avec une certaine forme de morale à l’ancienne. Elle parait avoir été à la recherche de quelque chose d’impossible et de mal définit, aussi bien dans la vie qu’au cinéma. En tous les cas cette autobiographie qui est plus une recherche d’identité qu’autre chose, rend la figure de Gene Tierney plus attachante encore. 

    Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma…, Hachette, 1985 

    Gene Tierney et Howard Hughes



    [1] http://alexandreclement.eklablog.com/peche-mortel-leave-her-to-heaven-john-stahl-1945-a147921856 

    « L’énigme du Chicago express, Narrow margin, Richard Fleischer, 1952Assurance sur la mort, Double indemnity, Billy Wilder, 1944 »
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