• Gone girl, David Fincher, 2014

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    Sorti en même temps un peu partout dans le monde, c’est le gros succès du moment. Il démarre d’ailleurs fort bien aux Etats-Unis. Film à gros budget, le scénario est fondé sur un best seller de Gillian Flynn qui a été traduit en français chez Sonatine. C’est Gillian Flynn elle-même qui a écrit le scénario.

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    Nick Dunne et sa femme Amy ont quitté New-York pour une petite ville du Missouri dont Nick est originaire. Intellectuels déclassés, ils traversent plus ou moins bien la crise économique qui ravage les Etats-Unis. Mais Amy a disparu à la veille de leur cinquième anniversaire de mariage. Il semble qu’elle ait été agressée, on retrouvera des traces de lutte dans la maison. Nick signale des conditions suspectes de cette disparition à la police, prévient ses beaux parents et sa sœur jumelle. Dès lors sa vie va être sous les projecteurs, et rapidement, il va être soupçonné par la police d’être à l’origine de cette disparition. Des flash-back sont là pour nous rappeler combien cette rencontre fut idyllique, tout en étant très moderne puisque le couple savait aussi s’envoyer en l’air dans les rayons d’une bibliothèque.

    On se rend compte alors que Nick et Amy avaient chacun une vie secrète. Tandis que Nick évitait de sombrer dans la dépression en baisant ses petites étudiantes, Amy se plaignait de la méchanceté et de la violence de Nick. En vérité Amy n’a pas disparu, elle monte un piège pour faire condamner Nick pour meurtre. Ce qui amène celui-i à louer les services d’un grand avocat pour éviter d’aller en prison. Nick comprend dans quel piège il est enfermé et met en scène des contre-feux qui vont conduire Amy à la faute. Celle-ci qui pourtant avait tout prévu va se retrouvre seule et désemparée, ce qui la conduira dans les bras d’un ancien amant, Desi Collins, naguère éconduit, mais toujours transi. Pour ce sortir de son propre piège, Amy sera amenée à le tuer. Cela lui permettra de dédouanner son mari et de revenir à la maison, sans qu’on sache très bien comment ce couple haineux arrivera à se supporter.

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    L’histoire entre Nick et Amy démarre comme un conte de fée moderne

     

    Il y a plusieurs approches différentes de ce film. D’un côté c’est un thriller plein de rebondissements. Mais de ce point de vue c’est assez raté. Le dernier tiers du film était monté comme une suite de séquences visant à se débarrasser au plus vite de l’histoire et de ses personnages antipathiques et encombrants. D’un autre côté c’est un démontage de la comédie du mariage à l’américaine. L’objectif étant de consommer des gestes, des corps et des objets, le mariage est un spectacle que le couple se donne, avant de tourner à la guerre ouverte entre les époux. Il y a du Strinberg. Si l’homme est un rien désinvolte, c’est tout de même la femme qui porte la responsabilité de cette guerre totale, par sa volonté manipulatrice de prendre le contrôle des corps et des cerveaux. Et même si Nick est conscient de cette violence, il ne pourra finalement qu’y céder. C’est plus qu’un pamphlet contre le mariage, c’est une disection du rêve américain de la jeune fille qui sourit et qui vise à construire un foyer, à avoir des enfants et une belle maison. Tout cette comédie qui se joue autour de l’enfant, qu’on voudrait, qu’on ne voudrait pas, dont on ne saurait quoi faire finalement est le résumé de la condition de la femme à l’âge post-moderne. Heureusement que ce scénario a été écrit par une femme, sinon on aurait pu l’accuser de mysoginie. Mais il est vrai que les hommes n’ont pas assez d’imagination, ni même de perversité pour construire des vengeances aussi scabreuses.

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    Rapidement la police va soupçonner Nick

     

    Si le film se laisse voir sans ennui, force est de constater que le scénario est bancal et déséquilibré. On l’a dit, la fin est baclée, ou plutôt elle tire à la ligne, elle aurait pu en effet intervenir au moment du retour d’Amy sans que cela change grand-chose. Mais il y a autre chose, une assez grande incapacité à développer les personnages secondaires. Que ce soit Desi Collins ou la détective Rhonda Boney, ils ne restent qu’à moitié dans l’ombre. Tout cela donne un côté hésitant au film, navigant à vue entre le thriller et l’enquête policière, et le film noir mettant en scène la fatalité de la décomposition d’un couple.  

    Ce qui domine et qui fait l’unité du film, c’est tout de même c’est le mensonge : tout le monde ment, de la famille en passant par les amis ou les membres du couple. Derrière les sourires se cahce l’hyprocrisie. Et à la moindre difficulté les masques tombent et la haine remplace l’amabilité de façade. Les médias évidemment participent de mensonge généralisé, mais le public aussi qui fait mine de se passionner pour une histoire d’amour dont il ne connait finalement rien. Amy passera ainsi de « l’épatante Amy » un personnage créé par ses parents, à la perverse Amy qui rêve de liquider son mari, à la naïve Amy qui se fait rouler dans la farine par le premier couple d’escrocs venu.

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    Nick doit donner des gages publics de son amour pour Amy

     

    Un des atouts majeurs du film ce sont ses acteurs. Ben Affleck grossi pour l’occasion est excellent dans  le rôle d’une sorte de gros nounours qui découvre peu à peu le piège dans lequel il a été enfermé. Mais Rosamond Pike aussi qui mêle une fausse naïveté et une grande perversité en même temps. Mais tous les autres acteurs sont tous très bons, que ce soit Carrie Coon dans le rôle de la sœur jumelle Margo, ou Tyler Perry, l’avocat retors et sûr de lui et bien entendu Kim Dickens dans celui de la détective qui doute d’un peu tout ce qu’elle voit.

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    Amy bricole sa vengeance dans son coin

     

    La mise en scène proprement dite pose plus de problèmes. Certes Fincher n’a jamais été un grand réalisateur, il confond souvent image bien léchée et mouvement fluide de caméra avec un style particulier et peronnel. De style il n’y en a pas, et Gone girl ressemble comme une goutte d’eau à d’autres films du même genre, des images bleutées, des lumières qui trouent l’espace nocturne, des oppositions furtives entre la maison luxueuse et les quartiers sordides où se sont regroupés les rejetés de la société de consommation.

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    Nick a besoin d’un avocat retors pour s’en sortir

     

     

    Le caractère bâtard du film, ses hésitations entre film noir, critique sociale et thriller, laisse comme un goût d’inachevé, même si on peut le voir.

    « Dans la souricière, The trap, Norman Panama, 1959Haines, The lawless, Joseph Losey, 1950 »
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