• La nuit du lendemain, The night of the following day, Hubert Cornfield, 1968

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    Hubert Cornfield est un réalisateur méconnu dont les films n’ont eu guère de succès. Pourtant il a tourné plusieurs films noirs qui sont comme une étape dans la voie d’une stylisation de ce genre. The night of the following day est une des rares œuvres de Cornfield qui est encore dans les mémoires à cause de la présence au générique de Marlon Brando.

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    La fille de Monsieur Dupond arrive à Orly 

    Les films précédents de Cornfield n’ont jamais eu beaucoup de succès, celui-ci n’en aura pas plus. Sorti en 1968, Marlon Brando est au creux de la vague et il n’arrivera pas à relancer sa carrière avant Le parrain et son immense succès. C’est pourtant un film intéressant qui cherche à utiliser les codes du film noir dans une approche esthétique un peu nouvelle. Réalisé en France, cette volonté d’épurer le récit s’inscrit dans cette tendance inspirée de La Nouvelle Vague et qui mise sur un côté plus intimiste des relations entre les différents protagonistes plutôt que sur un suspense dont l’issue est évidemment prévisible.

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    Bud contacte le père 

    Pourtant le scénario est une adaptation d’un ouvrage de Lionel White, Rapt, publié en France à la série noire. Un auteur spécialisé dans les histoires de truands et qui a donné de nombreux sujets pour le grand écran, notamment The killing de Stanley Kubrick, ou Bande à part de Jean-Luc Godard. Lionel White est un grand auteur de romans noirs au style épuré. Un peu oublié aujourd’hui, au moins la moitié de ses romans n’a pas été traduite et c’est fort dommage car il y a dans ses histoires quelque chose de profondément désespérée et surtout une absence d’empathie pour ses héros.

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    Vi sniffe

    La fille de Monsieur Dupond qui revient des Etats-Unis, débarque en France et est kidnappée par une petite équipe de truands américains composée de quatre personnes, Bud, Leer, Wally et sa sœur Vi qui est aussi la maîtresse de Bud. Ils la séquestre dans une petite maison isolée sur une plage de Normandie dans l’attente de toucher la rançon. Cependant les choses s’enveniment assez vite. Leer se révèle brutal, Vi se drogue, mais Bud continue par amitié pour Wally qui dans le temps l’a sorti de prison. La suite va voir non seulement Leer s’opposer au reste de la bande, mais Vi adopter une conduite incohérente qui risque à tout moment de faire échouer l’opération. L’issue sera dramatique puisque pour protéger leur fuite les gangsters devront affronter les armes à la main la police, et Bud devra aussi éliminer Leer.

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    Bud donne ses instructions

    Tout va reposer sur la mise en scène et sur la direction d’acteurs. Les décors sont épurés, quelques images de Paris, la place d’un petit village avec son unique café et la maison sur la plage. L’image est belle, les scènes tournées sous la pluie, et  de nuit, accroissent cette idée d’enfermement des protagonistes du drame. Car c’est à l’équipe de ravisseurs que Cornfield s’intéresse. De la fille été de Monsieur Dupond on ne saura rien. Et si on s’intéresse à la bande des ravisseurs, c’est plus dans leur dynamique interne qu’en ce qui concerne les états d’âme ou la psychologie. La longue séquence de la remise de la rançon suivant un plan extrêmement compliqué est à cet égard significative.

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    Bud fait part de ses inquiétudes à Wally

    L’utilisation des acteurs est également très particulière. Marlon Brando est plutôt mutique. Il est affublé d’une curieuse perruque blonde. On ne sait pas si c’est pour le rajeunir ou pour lui donner une allure équivoque. Est-ce cela qui a dissuadé les spectateurs de venir le voir ? Son jeu est un peu hystérique, certains ont avancé que cela était dû aux problèmes qu’il avait avec l’alcool à cette époque.  Richard Boone évidemment joue Leer, le mauvais méchant. Mais il est étrangement en retrait. Peu présent à l’écran, il figure plus une menace potentielle qu’une réalité objective. Rita Moreno qui joue Vi, l’amante de Bud, était à l’époque aussi la maîtresse de Marlon Brando. C’est manifestement elle qui a le plus de vie, même si elle apparaît tourmentée. Il y a aussi Jess Hahn et sa silhouette massive. Il est bien connu en France pour avoir joué de très nombreux seconds rôles dans des films policiers français. On oublie souvent qu’il était aussi un très bon acteur, bien plus subtil qu’il n’y paraît. Il est très bon ici, navigant entre froide détermination et mélancolie face à l’échec programmé de ce coup qui doit être le dernier.

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    Bud est menacé par le sinistre Leer 

    L’utilisation d’acteurs français dans le reste de la distribution, l’emploie de certains dialogues en français, vise a donné une certaine authenticité au propos, mais également aide à se démarquer du style noir à l’américaine. Il y a une manière de filmer que Cornfield revendique ouvertement européenne et plus spécifiquement française.

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    Bud doit affronter Leer

    Les critiques de ce film sont souvent sévères, trop sévères à mon sens, s’attardant un peu trop sur les invraisemblances du scénario. Pourtant la volonté d’aller vers une autre esthétique du film noir est très intéressante et s’inscrit dans le renouveau de ces films noirs en couleurs qui vont fleurir à la fin des années soixante, comme par exemple le magnifique Point Blank. La psychologie est de moins en moins au rendez-vous, et la volonté de prendre de la distance avec les codes tout en les utilisant donne au propos une singularité évidente. La dernière scène va tout à fait dans ce sens, avec la reprise de l’ouverture du film. Il semble que ce film a inspiré le film de Robert Hossein, Point de chute, film qui, malgré – ou à cause de – la présence de Johnny Halliday n’aura pas plus de succès.

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    Leer possède mille ruses

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    Bud retrouve la fille de monsieur Dupond dans un triste état

    « Le jeu de la vérité, Robert Hossein, 1961Le compte à rebours, Roger Pigaut, 1971 »
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