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Les faucons de la nuit, Nighthawks, Bruce malmuth, 1981.
Il fut un moment où Sylvester Stallone tenta de se séparer de son image de brut de épaisse et sans cervelle, et de s’essayer à des rôles plus complexes avec des scénarios plus élaborés. Le peu de succès qu’il rencontra dans cette voie le ramena naturellement à de plus simples ambitions. Nighthawks fait partie de cette veine-là. Ce film a plusieurs intérêts, outre qu’il est la marque d’une époque particulière où New-York était une ville qui sombrait dangereusement dans la décrépitude, il traite de la question du terrorisme comme support d’un film noir.
Le soir venu, dans les rues de New-York Da Silva traque les petits malfrats
Da Silva et Fox sont deux flics affectés à la traque dans la rue des petits délinquants que très souvent ils provoquent pour les prendre en flagrant délit et les coffrer. Mais comme à New-York débarque un terroriste de gros calibre, Wulfgar, qui a fui la traque policière en Europe, ils vont être mutés dans une unité antiterroriste nouvellement formée. Là ils vont apprendre ce qu’ils doivent savoir de la lutte contre le terrorisme dans des leçons accélérées. Bientôt Wulfgar va être repéré, mais comme il a changé de figure grâce à la chirurgie esthétique, il est difficile à coincer. Il se planque chez une femme qu’il a draguée dans une boîte de nuit et qui ignore tout de ses activités, mais qui mourra rapidement pour avoir découvert ses secrets. Pourtant en faisant les tours des boites de nuit, Da Silva et Fox vont tomber sur Wulfgar. Une poursuite sanglante dans les rues puis dans le métro va s’ensuivre, mais Fox sera blessé et Wulfgar réussira à prendre la fuite. Avec l’aide d’une jeune femme terroriste, Shakka, Wulfgar va prendre en otage des membres de l’ONU dans une cabine téléphérique bloquée au-dessus de l’Hudson. Les négociations sont entamées pour que des terroristes soient libérés contre les otages. Wulfgar exige d’avoir Da Silva comme interlocuteur. Les choses ne tournent pas très bien pour Wulfgar et Shakka, cette dernière est abattue et Wulfgar s’enfuit une fois de plus pour se rendre chez la femme de Da Silva.
Wulfgar débarque à New-York pour faire des attentats
Le scénario original devait servir de trame à un troisième épisode de French connection. Il en restera quelque chose évidemment avec ces flics patrouillant dans les coins dangereux de New-York et la relation d’amitié qui persiste entre eux. Une partie de l’intérêt du film réside là, justement dans ces rues newyorkaises en décrépitude. Mais l’opposition entre les deux flics est cette fois doublée d’une opposition entre un tueur terroriste et le flic Da Silva. Celle-ci avance sans trop l’approfondir que tous les deux mènent finalement le même type d’action, sauf que l’un est dans le camp de la révolution et l’autre du côté de la loi et de l’ordre. Si le terrorisme est décrit comme étant relié au Moyen-Orient, il n’est guère spécifié pour autant. Est-ce lié à la cause palestinienne ? Est-ce lié à la révolution socialiste mondiale ? On ne le sait pas. Il y a des commanditaires qui ont beaucoup d’argent, mais on ne sait pas qui ils sont. Le personnage de Wulfgar, dit-on, aurait été calqué sur celui de Carlos. Mais tout cela reste très vague et ne devient plus qu’un prétexte pour un film d’action. On remarque que Shakka est une terroriste décalée qui revendique des attentats au nom de la défense des opprimés, alors qu’elle-même, d’origine marocaine, vient d’un milieu aisé.
Le lieutenant Mufano annonce à Da Silva qu’il est muté
La réalisation est signée Bruce Malmuth, un réalisateur obscur qui a surtout œuvré dans la publicité. Nighthawks est sa seule œuvre remarquable et remarquée. En vérité il n’est que l’assistant de Sylvester Stallone qui est le maître d’œuvre du film. En effet, non seulement il a réécrit en partie le scénario, mais il a dirigé lui-même directement plusieurs scènes. A son actif on met la poursuite de Wulfgar qui démarre dans les rues de New-York, traverse les travaux de creusement du métro pour se retrouver finalement dans le métro lui-même. Il y a d’autres scènes intéressantes cependant, comme la recherche de Wulfgar à travers la tournée des boites de nuit, ou les scènes du début qui détaillent la lutte de Da Silva et de Fox contre les petits dealers et les délinquants en tous genres. Notamment le piège qu’ils montent pour attirer des voyous sous un pont avant que la patrouille de la police ne fasse capoter l’affaire. Il y a donc une bonne utilisation de l’espace, particulièrement en ce qui concerne New-York, c’est moins intéressant pour Londres ou Paris. L’utilisation du téléphérique coincé au-dessus de l’Hudson est moins bien appréhendée puisqu’en effet on devrait trembler un peu plus pour les otages suspendus au-dessus du vide.
Da Silva Fox traque Wulfgar dans le métro
L’interprétation est fondée sur deux oppositions, l’une entre Sylvester Stallone et Billy Dee Williams, connu à cette époque pour sa participation à deux épisodes de Stars war. Stallone s’est affublé d’une barbe façon Serpico, et d’une paire de lunette, sans doute pour se donner une allure de personne ordinaire. D’ailleurs il n’exhibera pas ses muscles à l’écran. Il joue de la sobriété, son rôle est presque muet. Il ira jusqu’à se déguiser en femme pour tromper l’ennemi. Mais comme il s’agit d’un film d’action au fond ça n’a guère d’importance. Billye Dee Williams fait acte de présence, sans plus. Rutger Hauer dont c’était le premier rôle aux Etats-Unis, apporte un peu de complexité dans le rôle de Wulfgar. C’est le personnage le plus bavard du film. Il anticipe un peu ce qu’il sera plus tard dans le film au succès colossal, Blade runner. Sa présence équilibre très bien celle plus monolithique de Stallone. Les personnages féminins sont sacrifiés. Pourtant Persis Khambatta dans le rôle de Shakka aurait mérité un peu plus d’attention, elle a un charisme particulier qui à ma connaissance n’a pas été pleinement utilisé. Lindsay Wagner qui est sensée interpréter Irène la femme de Stallone, est complètement transparente. On retiendra des seconds rôles, Nigel Davenport, l’acteur britannique qui joue Hartman, le spécialiste du terrorisme anglais qui vient donner la leçon aux Américains ! Et puis Joe Spinell, vieil ami de Stallone, qui joue le rôle convenu du chef de Da Silva, un brin amical, un brin colérique.
Wulfgar prend une vieille femme en otage
C’est un des rares films de Stallone qu’on peut voir et qui, sans être un chef-d’œuvre, tient la route plus de trente ans après. C’est d’ailleurs un des films que Stallone préfère dans sa lourde filmographie. Notons que cela n’a pas été un succès au box-office, bien que le film ait couvert ses frais et que la critique a été plutôt bienveillante.
Wulfgar a kidnappé des membres de l’ONU dans un périphérique
« Cape et poignard, Cloak and Dagger, Fritz Lang, 1946Et tournent les chevaux de bois, Ride the pink horse, Robert Montgomery, 1947 »
Tags : New-York, Sylvester Stalone, Néo-noir, Rutger Hauer, terrorisme
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