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Sofilm, Septembre-octobre 2021
Faisons un peu de réclame pour la revue Sofilm. Gratuite évidemment ! C’est une revue qui se veut généraliste, qui tente de s’écarter de l’académisme de la critique des Cahiers du cinéma ou de Positif, sans sombrer dans les travers du magazine Premier qui ressemble à peine à un catalogue. La dernière livraison qui vient de sortir est d’excellente qualité. D’abord une interview assez longue et intéressante de Tom McCarthy dont le film Stillwater se passe à Marseille dans nos fameux Quartiers Nord. Il détaille comment il a travaillé sur terrain et avec une équipe très largement française. Nous reparlerons de ce film très intéressant un peu plus tard ; dans quelques jours, lors de sa sortie. Ce film a été apprécié à Cannes, à mon sens à juste titre, s’écartant de la médiocrité générale du cinéma contemporain, qu’il soit français ou américain d’ailleurs. On apprendra que le tournage à Marseille proprement dit dura presque deux mois, le reste se passant à Stillwater même et en Studio et que Tom McCarthy fut très influencé par les romans de l’auteur communiste marseillais Jean-Claude Izzo.
Matt Damon et Tom MacCarthy sur le tournage de Stillwater
Le second intérêt de ce numéro est le grand dossier que la revue consacra à Sidney Lumet. Elle a raison, ce réalisateur doit être réhabilité. Certes toute son œuvre n’est pas excellente, il y a des ratages, mais elle est cohérente, tant du point de vue thématique que du point de vue cinématographique. Car si Lumet est apprécié le plus souvent pour son engagement très à gauche contre les injustices de toutes sortes, s’il a réalisé des films remarquables autant qu’amers sur les errements de la police et de la justice, c’était aussi un réalisateur extrêmement précis, consciencieux et sobre, soucieux du rythme comme du cadre. Il filmait très bien New York et en général les cadres urbains. Sean Connery tourna dans cinq de ses films, il en était très fier, considérant que c’est ce qu’il avait fait de mieux, et nous partageons cet avis. C’est un réalisateur de premier plan et s’il a commencé sa longue carrière à la fin des années cinquante, il fut typiquement un réalisateur des années soixante-dix.
Sidney Lumet et Sean Connery sur le tournage de The offence
Enfin il y a un article sur John Sayles, réalisateur dont la cinémathèque va célébrer l’œuvre en octobre prochain. C’est un « indépendant » comme on dit dont j’ai commenté positivement Matewan, sans doute son chef d’œuvre[1] et Lone star[2]. En France il n’est guère apprécié de la critique, sans doute parce qu’il utilise pour s’exprimer les codes du cinéma traditionnel américain qu’il maitrise parfaitement. Cela lui permet, un peu comme Sidney Lumet si on veut, de développer des sujets très engagés, tout en étant capable de raconter une histoire et de ne pas emmerder le spectateur. J’aime bien son approche qui ressemble aussi un peu à celle de Bo Wideberg avec un intérêt évident pour les rapports entre la ville et la campagne comme sujet de la lutte des classes.
Il y a aussi un hommage à Marie-France Pisier que j’aimais bien malgré – ou à cause, va savoir – de son côté grande bourgeoise égarée chez les saltimbanques, et qui est décédée tragiquement il y a maintenant dix ans, ce qui nous rappelle combien la vie passe si vite.
« Le carrefour de la mort, Kiss of death, Henry Hathaway, 1947La dernière rafale, The street with no name, William Keighley, 1948 »
Tags : Revue, cinéma, Sidney Lumet, Tom McCarthy, John Sayles
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