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    Serge Leroy est un réalisateur bien oublié maintenant, mais dans les années soixante-dix la critique appréciait assez ses films et le public suivait, sans toutefois que le succès fusse extraordinaire. Il s’était donné un style assez goûté en ces temps lointains, entre polar et film noir. Le film qu’il tourna avec Alain Delon à contre-emploi, Attention les enfants regardent, à défaut d’avoir un gros succès public fut considéré comme très original par la critique, justement du fait de sa noirceur.

    Ici les héros de cette histoire sont des truands à l’ancienne si on peut dire, pas vraiment méchants, et soudés encore par l’amitié. Cette amitiés chez les voyous était décidemment un thème à l’honneur en ce temps-là.

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    Bernard immobilise une jeune femme pour accéder au toit

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    Bernard et Basilio voit le train et les diamants leur échapper

    L’histoire est assez traditionnelle. Trois voyous vont tenter de s’emparer d’une valise de diamants dans le train Paris-Anvers. Pour cela, Bernard est chargé de faire diversion en s’introduisant dans un appartement pour accéder aux toits qui surplombent la verrière de la gare. Il attache la fille sur une chaise, et armé d’un fusil il se déplace sur les toits pour atteindre sa cible. Seulement, pendant ce temps, deux voyous sont aussi entrés dans l’appartement et flingue la jeune fille dont le corps va s’écraser au sol. Bernard fait signe à ses deux complices qu’il faut stopper l’affaire. Ils s’évacuent rapidement.

    Quelques mois plus tard, ils vont être tous les trois victimes d’un chantage. Bernard qui suit une étrange jeune femme, est enlevé par des gangsters américains, et un avocat d’affaires lui propose un marché, il doit casser un coffre-fort, et en échange il recevra 200 000 dollars. Mais si les trois amis refusent, ils seront dénoncés à la police et identifiés facilement car Bernard a été photographié sur les toits, en action.

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    Frank découvre le contenu de la mallette

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    Basilio est le technicien perceur de coffres

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    Frank sera tué par les vigiles

    Après une discussion animée, les trois hommes décident de réaliser le coup, l’appât du gain y est pour beaucoup, mais il y a aussi la volonté de comprendre ce qui se cache derrière toute cette salade. Ils reçoivent un acompte de 100 000 dollars dans une mallette. Très professionnels, ils ouvrent le coffre et récupèrent les microfilms, mais à la sortie de l’immeuble ils se font agresser par des voyous qui leur prennent leur butin. Ils s’en sortent difficilement, Basilio est blessé, Frank est tué.

    Quelques temps après Bernard qui cherche la mallette aux cent mille dollars, va tomber sur Cathy, la mystérieuse jeune femme qui a piégé Bernard. Bernard l’interroge, et avec elle est Basilio ils vont s’attaquer à l’avocat. Ils arriveront à leur fins, Bernard et Cathy partiront en bateau et Basilio récupérera la mallette aux billets. Mais entretemps, il aura malheureusement perdu sa femme que les truands américains auront torturée pour la faire parler. 

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    Cathy rejoindra le camp de Basilio et de Bernard 

    Serge Leroy n’est manifestement pas un très grand technicien, il multiplie les plans rapprochés et a du mal à faire le cadre correctement. Cependant, au-delà de ces faiblesses évidentes, il y a tout de même une très bonne utilisation des décors naturels, notamment le port de Saint-Nazaire, et les scènes d’actions sont très bien filmées, souvent tournées en caméra cachée au milieu de la foule.

    En pariant sur la sobriété des dialogues et en privilégiant l’action, il lorgne presque naturellement du côté de Melville. Le parallèle vient facilement, d’autant que certains acteurs comme Michel Constantin, Cathy Rosier, ou Karl Studer, appartiennent à cet univers. Ça ne traîne pas non plus en ce qui concerne le casse proprement dit, et l’attaque ratée du train Paris-Anvers est intéressante.

    On notera une sorte de bataille ente des truands français, bons vivants et finalement très humaines, et les Américains, bêtes et méchants, sans conscience et sans humanité.

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    Desbordes a menti sur tout et ne veut pas payer le travail fait 

    Il n’y a aucun grand nom à l’affiche, bien que Michel Constantin soit tout de même assez coté à cette époque. Il porte le film sur ses larges épaules. Mais le reste de la distribution est tout aussi intéressant, à commencer par le très regretté Georges Géret dans le rôle de Basilio, il amène sa hargne et sa gouaille en incarnant un joueur invétéré, ancien musicien, casseur à ses heures. Cathy Rosier dont le rôle le plus marquant a été la pianiste du Samouraï, a ici un peu plus de place, mais elle n’a guère plus de dialogue à dire. Ce n’est pas important puisqu’elle est une voleuse, un peu voyelle, la maîtresse de l’avocat aussi riche que véreux, et qui se trouve attirée par le taciturne Bernard. Deux autres très bons acteurs complètent la distribution, Adolfo Celi qui a une longue expérience de canaille de cinéma et qui est ici très bon, et Annie Cordy, la femme de Basilio, Nina en patronne de bistrot.

    L’ensemble reste intéressant malgré l’usure du temps et mérite une redécouverte.

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    Fort du succès de Compte à rebours¸ Roger Pigaut tourne un nouveau film policier. Il reprend le principe de faire tourner un peu les mêmes acteurs et donne à son entreprise une dimension où l’amitié est le centre de l’intrigue. Mais cette fois il s’agit d’une comédie qui met en scène des déclassés, un peu voyous, un peu prolos qui survivent dans un monde qui est en train d’être englouti. C’est Courbevoie, une banlieue ouvrière qui va être détruite pour laisser de la place à la modernité galopante qui se présente d’abord comme la construction de nouveaux grands ensembles.

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    Ils sont tous réunis autour d’Albert qui a repris ses études d’électronique pour contourner un système d’alarme sophistiqué

    L’histoire est construite autour d’un casse qui doit permettre à des amis de longue date, peu professionnels à vrai dire, de mettre la main sur trois milliards de bijoux. Comme on le sait, chez les truands, il y a plusieurs catégories. Les militaires qui n’hésitent pas à attaquer les fourgons blindés ou les banques, armés jusqu’aux dents, la force physique est leur atout. Il y a aussi les scientifiques, ceux qui possèdent une avance technologique qui permet de percer les secrets des portes blindées et des systèmes d’alarme, et puis il y a les bricoleurs, les manuels qui utilisent le système D pour détourner un peu d’argent. C’est à cette dernière catégorie que nos héros appartiennent. Leur lieu de rassemblement est le bistrot de Lulu cerné par les engins de terrassement qui bientôt l’en chasseront, elle s’est mise à la colle avec Julien qui bricole comme colleur d’affiche. Gus est un brin maquereau sans l’être et vit avec Minouche, une strip-teaseuse. Et puis il y a Albert sa mère avec qui il vit. Celle-ci commerce dans la brocante. Pierrot et José, un salarié dans l’industrie du bâtiment complètent cette fine équipe.

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    Par les futurs égouts des nouveaux bâtiments ils pénètrent dans la tour qui contient les diamants

     

    Ils vont réussir cependant à monter leur coup, mais pour cela, ils devront utiliser les ressources d’un truand de plus grande envergure, Monsieur Raphaël. En fait ce sont les hommes de Raphaël qui appliqueront les idées de notre bande, mais celle-ci lui dérobera le butin qu’ils vont essayer de bazarder directement à leur propriétaire. C’est en fait celui-ci qui se révèlera le plus voleur de tous puisqu’il ne les paiera qu’en faux billets. Néanmoins, ils récupéreront une petite partie de la somme promise finalement sans trop souffrir de cet échec, car l’argent n’est pas le plus important dans la vie.

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    Lulu est chargée de charmer Monsieur Raphaël

     

    Le film de Pigaut cherche d’abord le divertissement et les scènes humoristiques sont abondantes, que ce soit dans la présentation des combines moisies de Pierrot et de Gus, ou dans l’exposé des relations entre Albert et sa mère. Bien sûr il y a aussi un peu de la nostalgie pour cette banlieue parisienne qui se meurt en se transformant au pas de charge, mais cette nostalgie c’est aussi une façon de mettre en avant des valeurs de solidarité et d’amitié qui s’en vont au fur et à mesure que les vieilles maisons sont détruites par les engins de terrassement. Typique des années soixante-dix, il y a un côté choral qu’on retrouve dans des films comme ceux de Claude Sautet, Vincent, François, Paul et les autres ou Max et les ferrailleurs qui datent de la même époque. Evidemment ce n’est pas la peine de la dire Pigaut n’est pas Sautet dont le propos est un peu différent. Il est d’ailleurs assez curieux que ce type d’approche de la réalité sociale fondée sur une logique de groupe autour de notions aussi simples que l’amitié et la solidarité ait complètement disparu aujourd’hui des écrans.

    Manifestement, il y a aussi la volonté de faire une comédie un peu dans le style du Pigeon de Monicelli.

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    Le coffre embarqué, ils tentent de l’ouvrir

     

    Les acteurs sont très nombreux, et il est difficile d’en retenir plus particulièrement un parmi les autres. Michel Bouquet pour une fois ne joue pas un bourgeois ou un flic antipathique, mais un déclassé d’une autre sorte, puisque sa mère l’entretien dans l’idée qu’il est un aristocrate qui doit tenir son rang. Ce fut aussi un des dernières prestations de la charmante Dany Carrel sur grand écran. Ils tiennent tous assez bien leur place et semblent avoir pris du plaisir dans cette entreprise à se retrouver ensemble. Françoise Rosay est la mère de Michel Bouquet, ou plutôt d’Albert. Gabriele Ferzetti incarne Monsieur Raphaël, le truand embourgeoisé et  méprisant pour les plus petits que lui. On reconnaitra dans un rôle très secondaire Victor Lanoux dans une de ses premières apparitions sur le grand écran.

    Il n’y a non plus pas grand-chose à dire sur la manière dont c’est filmé. C’est un peu plat bien sûr, Pigaut n’est pas un technicien, mais c’est compensé par une capacité à se saisir des décors extérieurs et par un enthousiasme communicatif et sans prétention.  3-milliards-6.png

    Ils seront grugés par les bourgeois

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    Roger Pigaut réalisa un certain nombre de films policiers, un peu noir, qui connurent au début des années soixante-dix un certain succès. Comptes à rebours est le premier de la série. Le scénario est signé, comme pour les deux suivants André-Georges Brunelin qui venait de donner un scénario à Alain Delon, Jeff, un film qui eut peu de succès, mais qui n’en possède pas moins des qualités. Dans la mesure où Brunelin vise un certain naturalisme, il ne s’embarrasse pas de subtilités plus qu’il n’en faut.

     

    C’est une histoire assez traditionnelle d’un voyou, Nolan, qui s’est bloqué 10 ans de cabane pour avoir attaqué un fourgon blindé avec ses complices et son frère qui est resté sur le carreau. Sortant de prison, il veut se venger. Parmi les quatre complices, il ne sait lequel est le donneur, mais à défaut de le savoir, il se propose presque de les tuer tous les quatre. Ce sont maintenant des truands rangés des voitures qui ont une belle position, notamment ils possèdent un cercle de jeux qui semble rapporter gros. Pour apaiser les choses, une réunion est décidée chez Léa et Juliani, un vieux truand qui est aphasique. La réunion tourne court, Jebel tente de tuer Nolan, mais c’est ce dernier qui, bien que blessé, a le dessus. La randonnée vengeresse de Nolan va continuer, suivi qu’il est par Valberg qui est un ancien policier qui a été défiguré dans la confrontation avec les truands et qui a perdu un peu la tête. Bien entendu, une fois qu’il aura tué les quatre truands, Nolan sera mis devant le fait qu’aucun ne l’a vraiment donné. Ultime retournement, Nolan sera piégé par Valberg.

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    Nolan revient à Paris

    C’est un scénario sans beaucoup de surprise, mais assez carré et logique. Roger Pigaut joue sur le fait qu’il a rassemblé une distribution prestigieuse. Même les petits rôles, ceux de Léa et de Juliani, sont tenus par Simone Signoret et Charles Vanel. Nolan c’est Serge Reggiani qui a cette époque était redevenu, grâce à la chanson, une vedette. Bozzufi joue Zampa, un truand madré et solide, comme toujours dans les rôles de truand corse, il est très bon. André Pousse est Gilbert. Le docteur est interprété par Jean Dessailly et Madeleine, l’ancienne maîtresse de Nolan c’est Jeanne Moreau. Amidou complète la distribution. Michel Bouquet joue Valberg, l’ancien flic déjanté, mais ce n’est pas une surprise, à cette époque il y était habitué.

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    Les truands vont essayer de régler leur différend chez Léa et Juliani

    Sur cette trame sans surprise on trouve cependant quelques bonnes idées. Ainsi, Léa et Juliani en essayant d’aider Nolan, en se rangeant ouvertement de son côté vont engendrer l’irréparable. Ils représentent le milieu à qui il reste un peu du sens de l’honneur. Ou encore Macias, le garde du corps de Zampa qui le trahit, au nom d’un code de l’honneur tout autant abstrait. Typique des années soixante-dix, la photo est sans grâce, mais c’est compensé un peu par les choix judicieux des décors, que ce soit les quartiers populaires de Paris, ou que ce soit le repaire de Léa et Juliani. Presque tous les polars français de cette époque sont filmés de la même manière, avec le même générique en lettres rouges, les mêmes maisons isolées dans une zone un peu à l’écart de la ville.

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    Nolan et Madeleine veulent partir ensemble

    Les acteurs font leur numéro. Serge Reggiani joue les mutiques et Michel Bouquet fait  du Michel Bouquet avec ses petites lèvres serrées sur une mâchoire tendue et une nuque raide. Simone Signoret cabotine gentiment. A signaler tout de même la musique  de Georges Delerue qui donne un petit côté nostalgique à l’ensemble.   

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    Hubert Cornfield est un réalisateur méconnu dont les films n’ont eu guère de succès. Pourtant il a tourné plusieurs films noirs qui sont comme une étape dans la voie d’une stylisation de ce genre. The night of the following day est une des rares œuvres de Cornfield qui est encore dans les mémoires à cause de la présence au générique de Marlon Brando.

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    La fille de Monsieur Dupond arrive à Orly 

    Les films précédents de Cornfield n’ont jamais eu beaucoup de succès, celui-ci n’en aura pas plus. Sorti en 1968, Marlon Brando est au creux de la vague et il n’arrivera pas à relancer sa carrière avant Le parrain et son immense succès. C’est pourtant un film intéressant qui cherche à utiliser les codes du film noir dans une approche esthétique un peu nouvelle. Réalisé en France, cette volonté d’épurer le récit s’inscrit dans cette tendance inspirée de La Nouvelle Vague et qui mise sur un côté plus intimiste des relations entre les différents protagonistes plutôt que sur un suspense dont l’issue est évidemment prévisible.

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    Bud contacte le père 

    Pourtant le scénario est une adaptation d’un ouvrage de Lionel White, Rapt, publié en France à la série noire. Un auteur spécialisé dans les histoires de truands et qui a donné de nombreux sujets pour le grand écran, notamment The killing de Stanley Kubrick, ou Bande à part de Jean-Luc Godard. Lionel White est un grand auteur de romans noirs au style épuré. Un peu oublié aujourd’hui, au moins la moitié de ses romans n’a pas été traduite et c’est fort dommage car il y a dans ses histoires quelque chose de profondément désespérée et surtout une absence d’empathie pour ses héros.

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    Vi sniffe

    La fille de Monsieur Dupond qui revient des Etats-Unis, débarque en France et est kidnappée par une petite équipe de truands américains composée de quatre personnes, Bud, Leer, Wally et sa sœur Vi qui est aussi la maîtresse de Bud. Ils la séquestre dans une petite maison isolée sur une plage de Normandie dans l’attente de toucher la rançon. Cependant les choses s’enveniment assez vite. Leer se révèle brutal, Vi se drogue, mais Bud continue par amitié pour Wally qui dans le temps l’a sorti de prison. La suite va voir non seulement Leer s’opposer au reste de la bande, mais Vi adopter une conduite incohérente qui risque à tout moment de faire échouer l’opération. L’issue sera dramatique puisque pour protéger leur fuite les gangsters devront affronter les armes à la main la police, et Bud devra aussi éliminer Leer.

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    Bud donne ses instructions

    Tout va reposer sur la mise en scène et sur la direction d’acteurs. Les décors sont épurés, quelques images de Paris, la place d’un petit village avec son unique café et la maison sur la plage. L’image est belle, les scènes tournées sous la pluie, et  de nuit, accroissent cette idée d’enfermement des protagonistes du drame. Car c’est à l’équipe de ravisseurs que Cornfield s’intéresse. De la fille été de Monsieur Dupond on ne saura rien. Et si on s’intéresse à la bande des ravisseurs, c’est plus dans leur dynamique interne qu’en ce qui concerne les états d’âme ou la psychologie. La longue séquence de la remise de la rançon suivant un plan extrêmement compliqué est à cet égard significative.

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    Bud fait part de ses inquiétudes à Wally

    L’utilisation des acteurs est également très particulière. Marlon Brando est plutôt mutique. Il est affublé d’une curieuse perruque blonde. On ne sait pas si c’est pour le rajeunir ou pour lui donner une allure équivoque. Est-ce cela qui a dissuadé les spectateurs de venir le voir ? Son jeu est un peu hystérique, certains ont avancé que cela était dû aux problèmes qu’il avait avec l’alcool à cette époque.  Richard Boone évidemment joue Leer, le mauvais méchant. Mais il est étrangement en retrait. Peu présent à l’écran, il figure plus une menace potentielle qu’une réalité objective. Rita Moreno qui joue Vi, l’amante de Bud, était à l’époque aussi la maîtresse de Marlon Brando. C’est manifestement elle qui a le plus de vie, même si elle apparaît tourmentée. Il y a aussi Jess Hahn et sa silhouette massive. Il est bien connu en France pour avoir joué de très nombreux seconds rôles dans des films policiers français. On oublie souvent qu’il était aussi un très bon acteur, bien plus subtil qu’il n’y paraît. Il est très bon ici, navigant entre froide détermination et mélancolie face à l’échec programmé de ce coup qui doit être le dernier.

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    Bud est menacé par le sinistre Leer 

    L’utilisation d’acteurs français dans le reste de la distribution, l’emploie de certains dialogues en français, vise a donné une certaine authenticité au propos, mais également aide à se démarquer du style noir à l’américaine. Il y a une manière de filmer que Cornfield revendique ouvertement européenne et plus spécifiquement française.

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    Bud doit affronter Leer

    Les critiques de ce film sont souvent sévères, trop sévères à mon sens, s’attardant un peu trop sur les invraisemblances du scénario. Pourtant la volonté d’aller vers une autre esthétique du film noir est très intéressante et s’inscrit dans le renouveau de ces films noirs en couleurs qui vont fleurir à la fin des années soixante, comme par exemple le magnifique Point Blank. La psychologie est de moins en moins au rendez-vous, et la volonté de prendre de la distance avec les codes tout en les utilisant donne au propos une singularité évidente. La dernière scène va tout à fait dans ce sens, avec la reprise de l’ouverture du film. Il semble que ce film a inspiré le film de Robert Hossein, Point de chute, film qui, malgré – ou à cause de – la présence de Johnny Halliday n’aura pas plus de succès.

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    Leer possède mille ruses

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    Bud retrouve la fille de monsieur Dupond dans un triste état

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    J’ai souvent salué ici les talents de metteur en scène de cinéma de Robert Hossein, talents auxquels les critiques, ni même Robert Hossein ne semblent croire. Il a tenu un rôle important dans le renouveau du film noir français, notamment avec des films comme Toi le venin ou La mort d’un tueur.

    Le jeu de la vérité est un simple divertissement policier. Plutôt une pièce de théâtre filmée. Le principe est de construire une continuité où les rebondissements doivent tenir le spectateur en haleine jusqu’à la fin, sans que ça paraisse artificiel.

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    Le jeu de la vérité est redoutable 

    Un écrivain célèbre réunit chez lui une dizaine de convives tous issus de la bourgeoisie. Désœuvrés, ils vont jouer au jeu de la vérité qui consiste à se dire le maximum de méchancetés d’une voix polie et feutrée, mais avec la volonté de blesser. Cette première approche évidemment identifie la haute bourgeoisie avec cette forme de dégénérescence. Les secrets et les mœurs sont étalés devant tout le monde et donnent l’image d’une décadence avancée. Jusqu’au moment où l’arrivée de Portrant semble interrompre ce petit jeu malsain. C’est le plus redoutable de tous. Il leur promet d’ailleurs des révélations saignantes en leur montrant une enveloppe qui est sensée contenir de lourds secrets. Mais il y a l’orage et tandis que les lumières s’éteignent, Portrant est assassiné d’une balle derrière la tête. Il faut appeler la police, et tandis qu’ils attendent son arrivée, le déballage continu. Entre haine et nécessité, ils essaient de trouver une conduite adéquate. D’accord sur rien, ils sont surpris par un inspecteur qui commence par examiner le cadavre, les fouille, les suspectes et les maltraite. Ils les domptent les uns après les autres, jusqu’au moment où ses manières louches amènent les suspects à lui sauter dessus, à le tabasser. Le faux inspecteur va révéler qu’il a été payé pour commettre le meurtre. Reste évidemment à savoir par qui. Entre temps, Guy l’a tué. De nouveaux rebondissements interviennent quand la fameuse enveloppe est découverte dans le sac de Françoise. La vérité va bien finir par apparaître, même si elle est décevante elle reste assez cohérente.

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    Portrant est venue avec une jeune asiatique 

    C’est un film choral où si chacun a son caractère, c’est l’ensemble du groupe qui est en question. Les hommes sont en smoking, les femmes en robe du soir. C’est une atmosphère de luxe et de turpitudes, où la vivacité des réparties tient lieu d’intelligence. Le décor est unique, un grand salon, dans une demeure luxueuse.

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    Cynique, il met en pièce un peu tout le monde 

    La réussite d’un tel projet repose pour une grande partie sur la distribution. Celle-ci est prestigieuse, Paul Meurisse, Jean-Louis Trintignant, Jean Servais, Nadia Gray, etc. Les acteurs sont bons, et au moins ils nous évitent de trop cabotiner.  Aucun ne domine vraiment. Peut-être donnera-t-on une préférence à Jean-Louis Trintignant qui a le personnage le plus complexe à porter. Il est en effet le gigolo de sa grande sœur, hésitant à tomber vraiment amoureux de Françoise qui pourtant lui tend les bras. Si l’ensemble du groupe représente un monde cynique et corrompu, tous les protagonistes ne sont pas complètement mauvais, et dans l’épreuve, on en trouvera quelques-uns qui sont capables de générosité. C’est en effet un film sur la cupidité, ces nécessités bourgeoises de trouver en permanence de l’argent pour essayer de garder son rang.

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    L’inspecteur va employer des méthodes inhabituelles 

    Filmé en écran large, Robert Hossein contourne l’obstacle d’une approche statique et théâtrale en multipliant les mouvements de caméra, de façon à donner de la profondeur de champ, même dans un espace finalement assez réduit. Le montage est resserré et l’intrigue ne traîne pas. Le film dure à peine une heure et vingt minutes. C’est filmé proprement, avec une photo de qualité qui s’attarde sur les visages et les émotions. On retiendra quelques scènes intéressantes d’un point de vue purement filmique, les fouilles des invités par exemple, ou encore la façon dont Portrant donne à manger à la jeune asiatique.

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    Il va jusqu’à menacer les invités 

    Cela reste cependant une fantaisie policière dans la tradition française. Certes on ne s’ennuie pas, mais cela ne nous laisse pas un souvenir impérissable. Il semble que cela donna lieu en 1994 à une pièce de théâtre, La nuit du crime, mise en scène par Robert Hossein, mais je n’en suis pas sûr. Si quelqu’un pouvait me donner des informations sur cette pièce j’en serais ravi.

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    Françoise à peur

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    Guy a une attitude à la fois provocante et louche

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    L’inspecteur reçoit une raclée

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