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    L'Empire state building, construit pourtant au moment de la Grande dépression, est devenu un symbole du capitalisme triomphant, son  nom même semble renvoyer aussi à l'empire américain. Pourtant c'est un ouvrage sombre et mélancolique qui n'a rien de triomphant.

    Mais d'emblée Thomas Kelly annonce la couleur en dédiant son ouvrage aux ouvriers qui sont morts justement dans ce travail dangereux, et les conditions dans lesquelles il a été construit sont celles d'une société corrompue. Dans Le ventre de New York Thomas Kelly racontait la dangerosité du travail des ouvriers du caisson qui creusaient des tunnels en dessous de la ville dans des conditions difficiles. Ici c'est dans les airs que ça se passe puisque l'édifice s'élève à près de 400 mêtres de hauteur. S'il ne fallait pas être claustrophobe pour travailler sous la terre, il ne fallait pas non plus avoir le vertige pour s'employer à édifier cette tour monstrueuse, et comme le dit Broidy, les personnes normales ont le vertige. 

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    C'est donc dans un univers d'hommes, de vrais hommes, qu'on va se retrouver. Un univers qui plaît manifestement à Thomas Kelly. Pas tant qu'il apprécie l'édifice en lui même, mais plutôt parce que cette construction demande de l'habileté, du courage, et aussi de la solidarité entre les équipes. Les conditions d'emploi sont pourtant sauvages, et les ouvriers qui luttent pour leur émancipation sont réprimés par des bandes armées qui vont jusqu'au meurtre. Mais les ouvriers sont bien contents de travailler tant l'embauche à cette époque est rare et qu'il est facile de sombrer dans la misère si on n'a pas de travail.

    C'est un roman difficile à résumer tant les personnages sont nombreux et les péripéties éclatées. C'est un roman choral, organisé autour de la romance entre Briody, ouvrier le jour, mais combattant de l'ombre la nuit pour la cause d'une Irlande libre, et Grace, la maîtrise de Johnny Farrell, l'homme qui fait la pluie et le beau temps à la mairie de New York. Dans l'ambiance de la fin de la Prohibition, il n'est question que de trafics et de rackets. Les bandes mafieuses cherchent à se tailler une place, qu'elles soient italo-américaines, ou d'origine irlandaise, ou encore juive. Et pour cela elles sont prêtes à entrer en collusion avec le capitalisme qui a pignon sur rue et qui évidemment est tout aussi malhonnête.

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    Lewis Hine a pris sur le vif les photos de la construction 

    Au moment où débute la construction de l'Empire state building, Roosevelt prépare sa campagne électorale qui le mènera à la présidence où il sera réélu trois fois, engageant aussi bien une politique nouvelle sur le plan économique, le New Deal, qu'ensuite le pays dans la guerre contre les puissances de l'Axe. Roosevelt est présent dans le livre, dès le début. On voit bien où vont les sympathies politiques de Kelly, homme engagé très à gauche. Pour lui les Républicains ne sont que des canailles qui ont menés l'Amérique au désastre. Cependant il n'est pas naïf, et il sait aussi que le parti démocrate était aussi un parti corrompu. Ainsi au début de notre histoire, on assiste à des scènes de blanchiement d'argent sous la houlette du maire de l'époque James Walker et de son âme damnée le mélancolique Johnny Farrell. Celui-ci a perdu 100 000 $ et une partie de l'histoire tourne autour de la quête de cette somme.

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    Ce sont les années de la prohibition, où pourtant l'alcool coule à flots. Marquées par la violence et la cupidité, c'est une sorte de folie qui aspire ces années newyorkaises, mais la crise est là, et cette cupidité flamboyante va cesser.

    Grace et Briody trangressent les lois, mais ils ne sont pas fondamentalement mauvais, pour des raisons diverses, ils sont entraînés dans une course sans fin qui les transforment en criminels. 

    Thomas Kelly excelle a décrire le travail, son exaltation et sa dangerosité, il n'y a plus beaucoup d'écrivains qui s'y risquent aujourd'hui, mais il a aussi du talent pour exprimer la violence d'une époque tragique.

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    Les droits d'adaptation du livre ont été vendus à Warner Bros, et Guy Ritchie devrait en être le réalisateur, ce qui n'est pas vraiment encourageant.

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    Jimmy Walker maire de New York au moment de la construction de l'Empire State Building 

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    Owney Madden un des rois de la pègre newyorkaise dans les années trente, surnommé le tueur


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    Jim Thompson est une des grandes figures du roman noir. Ses meilleurs ouvrages sont emplis d’une rage et d’une violence rarement égalée, bien moins fabriquée et affectée que ce qu’on peut trouver chez Ellroy par exemple. Ces héros sont en permanence des névrosés, des trautmatisés de l’existence qui ont des rapports douloureux avec la société mais aussi avec le sexe. Ses histoires sont très empeintes d’une critique sociale qui décrit le rève américain comme un cauchemar. La cupidité, la bigoterie et l’hypocrisie sont la toile de fond de ces aberrations qui conduisent inéluctablement au meurtre et à la mort. Jim Thompson possède un public régulier, mais relativerment restreint un peu partout dans le monde. Le manque de complaisance de ses romans ne lui permet pas de toucher le grand public. Si la violence sous-jacente des ouvrages de Thompson ne touche qu’un lectorat restreint, à l’inverse d’Ellroy par exemple, c’est parce que ils nous remettent en question. Souvent écrits à la première personne, ils inquiètent directement le lecteur. La surenchère de violence qu’on trouve souvent chez les nouveaux auteurs de romans noirs américains nous laisse spectateurs. Et c’est probablement parce qu’à l’inverse les romans de Thompson nous impliquent et nous bouleversent qu’ils sont si précieux. Mais bien sûr ce ne sont jamais des romans sans humour, au contraire, mais c’est un humour très grinçant, décapant.


    The getaway, le film de Peckinpah a été un de ses plus grands succès avec The wild bunch. C’est l’histoire de Doc McCoy, un gangster qui sort de prison, grâce à sa femme qui fait intervenir un politicien véreux. En échange, il va réaliser un coup fumant qui doit lui assurer un avenir tranquille. Il vise l’attaque d’une banque avec deux acolytes et sa femme. Si le coup est classique, il s’agit de s’introduire dans la banque et de braquer le coffre-fort, ses acolytes le sont moins, notamment le sinistre Rudy qui ne rêve que de tuer McCoy et sa femme pour s’emparer du magot. Si le hold-up se déroule à peu près bien, le reste ne va pas de soi. McCoy va tuer Rudy, mais le laissant pour mort, celui-ci à une santé de cheval et resurgi d’entre les morts. Il prend en otage un couple, l’un est vétérinaire, sa femme est un rien conasse. Il ficelle le mari et s’envoie la bonne femme qui pense que tout cela est bien émoustillant. Elle jouit autant des coups que lui balance Rudy que de voir son mari dans cette triste situation. Entre temps McCoy s’enfuit avec sa femme qu’il soupçonne d’avoir donné de sa personne pour le faire élargir. Ils traversent tous deux l’Amérique profonde avec leur lourd sac chargé de billets. Mais ce sac est volé par un minable escroc que McCoy doit mettre au diapason après une course poursuite plutôt haletante. Entre temps le politicien véreux s’est lancé à leurs trousses avec une bande de crapules dévouées à sa personne. Tous les protagonistes de cette affaire se retrouvent dans un hôtel dans un règlement de compte presque final qui laisse un grand nombre de cadavres sur le carreau. Ils finissent par fuir la police dans une benne à ordures, puis passent au Mexique où on suppose qu’ils vont se la couler douce avec le produit de leurs crimes : fin de l’histoire. 

    La trame est reprise de l’ouvrage de Jim Thompson qui vient d’être republié dans une version non expurgée chez Rivages. Guérif aimant beaucoup Thompson, ce qu’on comprend facilement, il a décidé de republier toute son œuvre dans des traductions qui respectent à la lettre les ouvrages de Thompson. Il faut dire que les traductions Série noire étaient plutôt désinvoltes, taillant d’un côté, ajoutant de l’autre, sans trop de logique. Mais la force intrinsèque des romans de Jim Thompson fait qu’ils ont bien résisté à ce traitement.

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    Jim Thompson

     Le film de Peckinpah est le seul grand succès issu d’une adaptation d’un ouvrage de Thompson. A priori on se dit que Peckinpah était le mieux à même de le faire : la violence ne lui fait pas peur, ni le sordide de la vie des criminels. La mise en scène est spectaculaire et de grande classe. Pourtant à l’évidence, Peckinpah reste assez en deçà de l’esprit de Thompson. Si cette canaille de Rudy est assez bien décrite dans ses tendances psychopathes, le couple McCoy est plutôt édulcoré. En effet, dans le roman, ils assassinent un grand nombre de personnes, notamment celui qui leur a volé la valise de pognon, même quand il ne s’agit que de protagonistes mineurs. Dans le film de Peckinpah, ils sont plus politiquement correct, ils agissent comme des personnes raisonnables qui poursuivent seulement le but de s’enrichir sans travailler. Leur folie est assez masquée finalement. Je suppose que ce parti-pris vient du fait que les deux vedettes, McQueen et Ali MacGraw, ne voulaient pas prendre le risque de ternir trop leur image auprès de leur public qui à l’époque était considérable. McQueen était une énorme vedette, représentant plutôt l’acteur cool, Ali MacGraw sortait d’un triomphe mondial dans une niaiserie de première grandeur intitulée Love Story qui avait fait pleuré toutes les bonnes femmes de la planète. On sait aussi que Steve McQueen s’était impliqué personnellement dans le scénario qui est signé Walter Hill.

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    Editions américaines de l’ouvrage de Thompson 

    Peckinpah s’entendait plutôt bien avec Steve McQueen, ils venaient de tourner un film plutôt sympathique et atypique sur les hommes libres qui vendent leur peau dans des rodéos, Junior Bonner qui d’ailleurs n’avait pas très bien marché. Tout cela fait que la noirceur du roman de Thompson a bien disparue au profit d’un film d’action extrêmement élégant et sophistiqué. Seul le personnage de Rudy sera le dépositaire de cette violence débridée et suicidaire qui parcourt tout le livre de Thompson.

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    L’ouvrage était d’abord paru en Série noire avant d’être repris par Rivages qui a beaucoup fait pour la gloire de Thompson 

    Car c’est bien de ça qu’il s’agit, Peckinpah a édulcoré la noirceur de l’ouvrage. Dans le roman non seulement les deux époux ne se réconcilient pas vraiment, mais ils envisagent in fine de s’assassiner mutuellement. Du reste la femme de McCoy a un côté hystérique et déjanté qui n’apparaît pas dans le film où au contraire elle est toujours d’un sang-froid à toute épreuve, et finalement d’un bon caractère. Or comme on le sait Thompson avait une méfiance viscérale vis-à-vis des femmes qu’il jugeait toujours un brin castratrices. D’ailleurs la femme de McCoy n’est pas la seule femme mauvaise du roman, l’épouse du vétérinaire ressemble tout à fait à une chienne en chaleur. Là on peut dire que le roman de Thompson est bien respecté. Fran n’est jamais sortie de son trou, et elle s’emmerde avec son époux dans cet univers de bouseux à l’horizon fermé. Aussi lorsque Rudy surgit, elle envoie toute bonne conscience par-dessus les moulins et se jette littéralement dans la gueule du loup.

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    Doc McCoy sort de prison 

    L’autre aspect du roman qui est oublié par Peckinpah, c’est une des obsessions de Thompson : il met en scène des réseaux de criminels qui communiquent de façon souterraine dans toute l’Amérique. C’est certainement quelque chose que Thompson a du connaître d’assez près car il y a une vérité quasi documentaire qu’on retrouve dans de nombreux témoignages américains, par exemple dans Yegg dont nous avons parlé il y a quelques mois. Ces réseaux forment littéralement une contre-société avec leurs codes et leur morale bien particulière. Et c’est d’ailleurs ce qui renforce le côté noir du roman. Si la plupart des bandits sont des crapules sans morale, on en trouve qui conservent une forme d’honnêteté, même quand ils ont choisi de vivre complètement dans la marge, comme cette femme qui va cacher le couple McCoy sous un tas de fumier.

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    Rudy se paye la femme du vétérinaire sous ses yeux

     Le roman de Thompson est donc bien plus complexe, plus noir et plus riche que le film qu’en a tiré Peckinpah, film qui reste dans une sorte de fidélité formelle un peu insuffisante à mon goût. Mais il est probable que sans les coupes et les transpositions qu’il a faites du roman, le film n’aurait pas eu le même succès. Car le noir, au cinéma comme en librairie, se vend bien moins que le thriller ou le polar qui ne se pose pas trop de question. Thompson n’a jamais été un gros vendeur de livres. Contrairement à une légende bien ancrée, ce n’est pas du tout un auteur maudit qui ne serait connu et reconnu qu’en France, et ses livres sont continuellement réédités outre-Atlantique, mais il est vrai qu’il n’a jamais produit de best-sellers.

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    Celle-ci adore tourmenter son mari de toutes les manières possibles 

    Mais bien sûr une fois qu’on a comparé le livre et le film, celui-ci reste un très bon film. Tout était réuni pour que ce soit un grand succès. L’histoire recèle suffisamment de rebondissements pour tenir le spectateur en halène. Rudy n’est pas mort, McCoy se fait voler la valise de billets par un petit escroc qui échange les clés de la consigne de la gare, le vétérinaire se pend, etc. Comme ça jusqu’à la fin quand les McCoy se retrouve dans un camion poubelle.

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    Après la fusillade chez Beynion, le couple McCoy est au bord de la rupture 

    L’autre point décisif est que les scènes d’action sont menées tambour battant, que ce soit le hold-up de la banque, ou la fusillade avec la policve ou encore le règlement de compte final où les armes de gros calibre déchirent tout sur leur passage, les portes, les fenêtres, mais aussi les cables de l’ascenceur qui s’effondrre lourdement. Peckinpah n’est pas seulement un metteur en scène de films d’action, il sait aussi rendre palpable la tension entre les individus, ainsi toutes les scènes où le sadisme de Rudy s’en donne à cœur joie.

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    McCoy assome son voleur puis lit tranquillement le journal 

    Evidemment les acteurs sont excellent. McQueen est égal à lui-même dans ce rôle d’aventurier au sang froid qui sait prendre les décisions qui s’imposent. Ali McGraw semble tout à fait heureuse d’échapper à la niaiserie de Love story, elle ne se gêne pas pour montrer ses seins et participer presque sous nos yeux à des ébats torrides avec McQueen. La vérité de ces scènes paraît devoir beaucoup au fait que dans la vie les deux acteurs entretenaient une liaison torride et plutôt hors du commun. Mais la vraie révélation c’est l’étrange couple formé par Al Lettieri qui triompha la même année dans Le Parrain où il tenait le rôle de Solozzo et qui joue le rôle de l’inquiétant Rudy avec Sally Struther qui incarne cette connasse de Fran, prête à toutes les folies pourvu qu’elles humilient son époux qu probablement elle rend responsable de sa médiocrité. La distribution est complétée par des gueules habituelles du cinéma de Peckinpah, Ben Johnson dans le rôle de Benyon, Bo Hopkins ou encore Slim Pickens

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    Grâce au fusil à pompe McCoy a un avantage décisif sur la police 

    Tourné en écran large, avec une abondance de lumière, les décors vont jouer un rôle important, la chaleur, la poussière, le caractère mesquin des petites villes qu’ils traversent, accablent les deux époux. Une mention spéciale doit être donnée aux scènes dans la gare où la profondeur de champ est utilisée pour rendre compte de la densité de la foule qui empêche momentanément les McCoy de récupérer « leur » argent. Et bien sûr on retrouve toujours cet façon paticulière de Peckinpah pour filmer les objets, les armes, les voitures ou les billets de banque.

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    Les voitures sont immobilisées 

    Quoi qu’il ait été critiqué à sa sortie, The getaway prend aujourd’hui l’allure d’un classique. Les éditions en DVD puis en Blu Ray ne se comptent plus. Et le film a gardé son aspect moderne, il est peu daté.

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    Il faut fuir le lieu du massacre

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    Peckinpah sur le tournage de The getaway

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    Peckinpah et McQueen

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    Une bonne entente semble avoir régné sur le plateau

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    Un remake inutile

     

    C’est probablement ce grand succès qui donna l’idée en 1994 à la Warner d’en tourner un remake inutile avec un autre couple célèbre, Alec Balwin et Kim Bassinger sous la direction de Roger Donaldson. Ce n’est plus une adaptation de Jim Thompson, mais une simple adaptation du film de Peckinpah. C’est aussi le scénario et le découpage de Walter Hill qui seraz utilisé. Le verdict est assez abrupt, Donaldson n’est pas Pekinpah, il filme mollement même les scènes d’action violente, et puis Baldwin n’est pas McQueen. Néanmoins, malgré tous ces handicaps, le remake marchera assez bien.

    Remplacer McQueen et MacGraw par Baldwin et Basinger c’est déjà descendre un cran en dessous. Mais la réalisation est faiblarde, Donaldson n’a pas l’œil de Peckinpah, les scènes d’action restent spectaculaires, mais sans rien de particulier. Ça devient un film d’action un rien béta. Jusqu’à l’affiche du film qui est assez laide.

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    Le remake utilisera les mêmes décors que l’original, notamment l’hôtel

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    La maison sous les arbres est réalisé juste après Le passager de la pluie qui avait été un énorme succès international, et juste avant La course du lièvre à travers les champs qui fut également un très gros succès. C'est pourtant un échec à la fois public et critique. Et cet échec semble d'abord incomber au scénario qui est à la fois assez confus et assez mou. Je ne sais pas si c'est le manque de succès qui explique que ce film est aujourd'hui très difficile à trouver. Pour ma part j'ai pu le revoir dans une excellente version grâce à la gentillesse d'un lecteur de ce blog qui m'en a envoyé une copie.

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    Jill aime à se promener sur la Seine en compagnie des enfants et des mariniers

    C'est l'histoire d'un couple d'américains implantés depuis peu à Paris avec leurs deux enfants. Ce couple ne semble pas très solide et Jill, la femme paraît même perdre un peu la tête et le mari, semble la proie d'un chantage. Les tensions entre le couple sont ravivées par un entourage qui paraît très hostile. Pendant que se préparent les fêtes de Noël, les deux enfants disparaissent. Evidemment c'est pour augmenter la pression sur Philippe. La police va s'en mêler, et quelques temps après les enfants seront retrouvés sains et saufs.

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    Philippe reçoit une proposition difficile à refuser de la part d'un étranger 

    Cette trame en vaut bien une autre, mais le déroulement concret de l'histoire tire un peu trop vers le côté psychologique et moins vers le suspense, un peu comme si Daniel Boulanger et René Clément s'étaient désintéressés de l'histoire proprement dite. Le film est d'ailleurs tout entier centré sur le personnage de Jill, on essaie de comprendre sa solitude, sa fragilité psychologique, son enfermement dans le monde des objets. Ce personnage rappelle assez celui de Mélancolie dans Le passager de la pluie. Sauf qu'ici aucun autre personnage ne compense celui de Jill. Et donc les ficelles du scénario, ses lacunes se voient tout de suite, empêchent finalement de s'intéresser aux personnages.

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     Philippe semble s'être éloigné de Jill et de sa famille

    Bien sûr il y a Faye Dunaway, mais elle n'est pas très crédible, quand à Frank Langella qui tient le rôle de son mari, une sorte de faux Anthony Perkins, il est assez mauvais, guère intéressant. René Clément s'est souvent distingué par sa direction des enfants, mais ici il n'y a rien de particulier à en dire. Ça reste des enfants, et même quand le petit garçon tue sa gardienne d'un coup de revolver, on ne ressent guère d'émotion. Le film est bourré de scènes inutiles, notamment le personnage du psychanalyste qui n'apporte rien à l'histoire.

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    Les tentatives de Philippe pour se rapprocher de Jill sont maladroite

    Il me semble que c'est le plus mauvais film de René Clément qui n'en a pas fait tant que ça. On retiendra qu'un certain nombre de thèmes ressortent d'une thématique personnelle, le rapport des adultes aux enfants, la solitude d'une femme qui s'ennuie et qui peint pour tromper le temps. Mais également le thème de la baby sitter perverse, thème qui sera repris justement dans le dernier film de Clément, La baby sitter.

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    L'accident de Jill renforce l'idée qu'elle perd la tête

    Du point de vue cinématographique, on a de la peine à reconnaître la patte de René Clément. Bien sûr il y a une utilisation intéressante des décors, des écluses, des escaliers qui plongent vers la Seine, mais cela est plutôt maigre comme satisfaction.

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    Son analyste ne lui est de guère d'utilité

    Le film n'a pas eu de succès, ni même l'indulgence de la critique. Il semblerait qu'il ait été victime de la production elle-même. On aurait pu croire que René Clément était sur le déclin. Mais ce n'était qu'une impression fausse car l'année suivante, il allait tourner La course du lièvre à travers les champs qui, bien que ce ne soit pas son meilleur film, lui permit de retrouver aussi bien un vaste public que les honneurs de la critique, il est vrai qu'ici le scénario avait été construit avec Sébastien Japrisot.

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     Jill a acheté deux fois la même robe jaune, du moins c'est ce qu'elle croit

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     Les enfants s'amusent au guignol

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     Les enfants ont disparus, Jill les cherchent frénétiquement

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     La trouble Cynthia sera tuée après qu'elle ait récupéré les clés de la maison où sont retenus les enfants

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     C'est dans cette maison sous les arbres que les enfants seront retrouvés

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    Excellent, Tomorrow is another day, croise plusieurs sous-genres qui ont fait la gloire du film noir. C'est à la fois un film sur la difficile réinsertion des anciens prisonniers, également deux amants qui fuient devant la fatalité, mais c'est aussi une opposition violente entre la ville qui pervertit et la campagne qui permet d'accéder à une vie simple et normale par le dur labeur quotidien. 

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    Bill Clark sort de prison

     Bill Clark vient de passer  plus de 18 ans en prison pour avoir assassiné son père alors qu'il avait seulement 13 ans. Il se retrouve donc en liberté sans rien connaître de la vie et de ses pièges. Il se retrouve rapidement à New York où il croise la route de Kay qui est taxi-girl dans un dancing. Il en tombe amoureux d'une façon bien naïve, et Kay est émue par cet empressement, seulement elle est plus ou moins maquée avec un flic Conover qui prend sa liaison avec Clark comme un affront. Une bagarre s'ensuit, Kay blesse mortellement Conover et les deux amants s'enfuient, Kay laissant croire à Bill qu'il est le meurtrier. Cette fuite les amène à rencontrer la famille Dawson qui leur propose de les accompagner à Salinas. Voyant là la possibilité de refaire une vie saine et neuve, ils acceptent. Tout se passerait assez bien, si Dawson ne tombait pas sur une revue à sensation qui offre 1000 $ de récompense pour qui dénoncera Bill Clark. Si la femme est très rétive à pratiquer la délation, le mari y plongerait sans vergogne puisque cela lui permettrait de trouver un peu de confort. Bill sent l'atmosphère s'alourdir et est effrayé par l'idée de retourner en prison : il est toujours persuadé que c'est lui qui a tué Conover. Dawson ayant eu un accident, sa femme, la mort dans l'âme, va finir par dénoncer Bill Clark pour toucher la prime car elle n'a pas les moyens de faire face aux dépenses nouvelles occasionnées par l'accident. Clark va être arrêté, mais cependant tout finira bien car en réalité la police avait abandonné les recherches suite aux aveux mêmes de Conover qui expliquait que Kay avait tiré en légitime défense. 

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    Kay est une taxi girl un peu cynique

     Si ce n'est la fin qui est un peu tirée par les cheveux, le scénario de Guy Endore est excellent. Malheureusement cet auteur talentueux a payé son engagement politique et se fit blacklister, il vendit des scénarios sous le nom de Harry Relis, prenant pour l'occasion le nom de sa femme, mais il travailla aussi sous le nom de Hugo Butler pour Menaces dans la nuit, l'excellent film noir de John Berry avec John Garfield. Après ce film, il resta une dizaine d'années éloigné des studios. A l'évidence le scénario contient des allusions implicites sur la chasse aux sorcières à Hollywood, et les hésitations à la dénonciation constituent un des meilleurs moments de ce film qui en contient beaucoup. 

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    Bill hésite à tirer sur Conover

     Les décors sont ceux de la vie ordinaire, ancré dans le monde du travail et de la vie simple, des difficultés ordinaires de la vie de tous les jours, c'est pour partie ce choix qui fait de ce film une réussite. Certes, ce n'est pas un film sur la condition prolétaire, mais celle-ci est toujours présente, que ce soit quand Kay se rend compte à quel point Bill a été exploité quand il était en prison, ou encore quand ils ramassent les salades en se cassant le dos. la récompense de tous ces efforts c'est une méchante cabane en bois. Mais les amants vont en faire leur intimité en découvrant un véritable amour. 

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    Bill et Kay s'enfuient dans un camion transportant des voitures

     La fuite des deux amants ressemble à beaucoup de films de ce genre, et plus particulièrement à Jenny femme marquée de Douglas Sirk, dont le scénario était de Samuel Fuller. Mais il y a des moments plutôt originaux, comme cette fuite dans un camion transportant des voitures, ou encore ces passages sur la route en train de se faire des confidences. Beaucoup d'idées du film noir sont recyclées : à commencer par le malentendu qui fait que les deux héros croient être chacun le meurtrier de Conover. Ou encore cet égoïsme latent supporté par le besoin de cupidité. Sauf que dans ce dernier cas, il y a une sorte de rationalisation de la dénonciation : la femme acceptera de vendre Clark parce qu'elle y est poussée par la nécessité de soigner son mari, et que les soins justement coutent cher.

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     Une longue errance commence pour les deux amants

     L'interprétation est excellente. Steve Cochran joue Bill Clark. Il est comme à son ordinaire très bien, un mélange de naïveté et de violence. C'est d'ailleurs une figure bien connue des amateurs de films noirs, mais aussi un acteur un peu méconnu dont la filmographie vaut un peu plus que le détour. Ruth Roman, en blonde ou en brune est aussi très bien, passant d'un personnage de garce plus ou moins assumée à celui d'une fille ordinaire, recherchant l'amour à travers une vie ordinaire aussi.

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    Dawson a été blessé 

    Certes la mise en scène de Felix Feist n'est pas toujours très rythmée, mais l'ensemble est soutenu et fait de Tomorrow an another day un excellent film noir dans la tradition.  

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    C'est la mort dans l'âme que Stella va dénoncer Bill Clark à la police

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    Film emblématique du film de casse, Asphalt jungle est le troisième film noir de John Huston, presque dix ans après la réussite du Faucon maltais et deux ans après le très controversé Key Largo. Et à mon sens il est encore plus réussi que les précédents. Entre 1941 et 1950 John Huston s'est un peu dispersé, à part Key Largo et Le trésor de la Sierra madre il n'a pas réalisé grand chose d'intéressant. Mais cette fois, la réussite est là, tant auprès de la critique que du public. Il faut dire que John Huston s'est donné les moyens, il sera son propre producteur pour la MGM. Il s'est appuyé d'abord sur le très bon roman de William R. Burnett qui fut un des grands pourvoyeurs de scénarios d'Hollywood. Et évidemment on ne saurait oublier ce détail, si le film est si bon, c'est parce qu'au départ il y a un très bon scénario. Du reste, malgré la renommée du film, le roman continue de se vendre et d'être réédité aux Etats-Unis, mais aussi un peu partout dans le monde.  

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    L'histoire raconte comment une bande de voleurs sans envergure va mettre à sac une grande bijouterie. C'est l'occasion de dresser le portrait des protagonistes qui sont à la fois semblables dans leurs ambitions, et différents dans leur caractère. Il y a d'abord Dix Handley, une grande brute un peu instinctive, mais pas si stupide que cela. Direct dans sa vie, il va à l'essentiel aussi bien dans l'action que dans le dialogue. Ensuite Doc Riedenschneider, il vient de sortir de prison et veut prendre sa revanche sur la vie. Calme et froid, c'est le cerveau du gang : toujours poli et tranquille il ne s'affole jamais. Ensuite il y a Gus, c'est l'ami de Dix, bossu il tient un bar un peu louche dans un quartier sordide. Ciavelli est le vrai casseur, c'est le spécialiste de l'ouverture des portes et des coffre-fort. Mais cette petite bande doit aussi s'appuyer sur ceux qui vont la financer. Il y a d'abord le petit bookmaker Cobby, il brasse pas mal de pognon, mais il est un peu peureux. Il aimerait bien être un vrai truand. Il va se tourner vers l'avocat Emmerich. Celui-ci s'est ruiné pour mener un train de vie dispendieux et entretenir sa jeune maitresse Angela. Bien qu'il ne puisse pas financer directement le casse, il flaire la bonne affaire qui lui permettra de tout quitter et de vivre une fin heureuse. C'est bien sûr du côté de Cobby et d'Emmerich que les embrouilles vont arriver. 

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    Dix essaie d'échapper à la police

     Et puis il y a la police. Dès le début du film elle est là, traquant Handley. Elle est représentée par le très corrompu Ditrich qui touche de l'argent pour fermer les yeux sur les affaires de Cobby et qui n'hésitera pas à le balancer à la première occasion. Mais la police c'est aussi Hardy, le chef qui vise non seulement à faire baisser la criminalité, mais aussi à la rendre plus conforme à un code moral. Il représente clairement la société dans toutes ces dimensions, la puissance de la société face aux individus, mais aussi la défense de ses valeurs morales, la propriété et l'ordre. C'est lui qui gagnera finalement.

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     Scène de tapissage dans The Asphalt Jungle 

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    La même reprise dans Le samouraï de Melville

    C'est donc un film choral, même si l'attention est plus portée sur Dix et sur Riedenschneider qui sont manifestement les personnages les plus sympathiques du film. Pour autant ça ne part pas dans tous les sens bien au contraire et l'unité de ton est maintenue de bout en bout. Cela est dû aussi bien à la rigueur du découpage qu'à celle de la mise en scène de grande classe. Car il faut bien dire que si Huston a réalisé une grande carrière, il n'a pas toujours fait preuve de la même constance dans la qualité. L'ouverture est magnifique, une voiture de police dans la ville à l'aube qui recherche un voyou qui a commis une attaque à main armée. Et celui-ci se cache, sans trop s'inquiéter d'ailleurs, se réfugie chez Gus après avoir emprunté des ruelles étroites et délabrées. 

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    Cobby va aider Doc à monter le casse 

    On comprend tout de suite que Dix est un solitaire qui n'a pas peur de grand-chose. La police l'interpelle et l'embarque au commissariat où on va le confronter à un témoin. Mais celui-ci a peur et laisse le repartir libre. Cette scène a fortement marqué les esprits au point que Melville la reprendra dans sa forme et dans ses intentions dans Le samouraï. D'ailleurs on peut dire qu'Asphalt jungle est une des principale références de Melville. La scène du casse, mais aussi ses conséquences vont se retrouver dans Le cercle rouge.

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     La bande prépare le coup

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     La même scène reprise dans The killing de Stanley Kubrick en 1956

    La scène du casse est parfaitement filmée. Le tempo est parfait. Huston ne traîne pas, et grâce à un montage serré sait faire monter la tension. D'autres réalisateurs se sont inspirés de cette scène, Jules Dassin, Melville, mais le plus souvent ils en ont rajouté, traîné en longueur, pour bien montrer que les casseurs étaient des professionnels aux gestes sûrs. D'ailleurs tout le film d'Huston est fait de cette manière, il est rapide dans la description des mœurs et codes des voyous, préférant s'attarder sur leur comportement. Car pour Huston ces criminels ne sont que des gens ordinaires qui ne valent ni plus ni moins que les autres, mais qui se trouvent dans des circonstances et des déterminations particulières. C'est du reste ce que confessera Emmerich avant de se faire sauter le caisson. C'est pour cette raison qu'Huston n'appuie pas sur l'intelligence de Riedenschneider. D'ailleurs est-il vraiment intelligent ? Il se laisse bien facilement berner par Emmerich, et il se fera prendre pour s'être attardé à regarder une jeune fille qui aime danser devant lui, c'est pourquoi il va laisser passer l'heure et les policiers qui l'ont repéré vont l'arrêter. 

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    Le casse de la bijouterie est réussi  

    C'est donc en premier lieu la rigueur qui caractérise ce film. La rigueur dans l'équilibre des personnages et la rigueur dans la réalisation. Il ya une manière très nuancée de faire s'avancer l'histoire d'amour entre Doll et Dix. C'est seulement un geste un regard qui nous fait comprendre la progression de leur histoire. Et pourtant cette relation est pathétique. Doll qui travaillait dans un cabaret a perdu son travail et elle se retrouve à la remorque de Dix. C'est une fille simple qui ne cherche en rien à s'imposer. Mais elle est prête à tout pour Dix, même lorsqu'elle comprend qu'il na plus aucun avenir. Si une première vision de ce film laisse voir qu'il s'agit d'un film d'hommes, les portraits des femmes n'en sont pas moins intéressants. Doll bien sûr, mais aussi la jeune Angela qui vit aux crochets d'Emmerich sans trop comprendre ce qu'elle fait. Ou encore la femme de Ciavelli qui pleure son mari en train de mourir.

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     Dix et Doc pensent qu'Emmerich va leur acheter le butin

     L'intérêt d'Huston pour les caractères se retrouve encore dans cette mise en scène de l'amitié silencieuse entre Gus, le bossu, et Dix Handley. Ils n'ont pas besoin de mots pour se comprendre. Et ceux-là ne se trahissent pas. D'ailleurs Handley ne peut pas trahir. Il a un code de l'honneur très particulier que probablement Huston identifie à ses origines irlandaises, qui le pousse à rembourser une dette de jeu, alors qu'il pourrait tout à fait s'en passer, vu la peur qu'il inspire à Cobby. Emmerich, avant d'être un traître, est d'abord un homme faible qui s'est laissé aller à un train de vie ruineux et qui ne sait plus comment s'en sortir. C'est pourquoi, même si sa trahison est décisive, on le comprend aussi.

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    Mais Emmerich aux abois les trahit

    On a beaucoup écrit, justement à partir de ce film et du Trésor de la sierra madre que John Huston était un cinéaste de l'échec. Ce n'est pas faux bien sûr, mais il me semble qu'il est plus encore celui de la faiblesse humaine, cette faiblesse humaine qui nous entraîne finalement vers des situations que nous ne maitrisons plus. Même Dix qui par ailleurs est tout à fait droit, à la faiblesse de perdre au jeu tout l'argent qu'il gagne si difficilement en attaquant les commerçants. 

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    Doc perd son temps à contempler une jeune fille, un temps qui comptera

    Film fondateur d'un sous-genre du film noir, Asphalt jungle met en scène les oppositions entre la ville qui corrompt et la nature vers laquelle Dix voudrait bien revenir. Il met également en lumière l'opposition entre la nuit et le jour. Il y a cette scène où on voit Dix surveiller ce qui se passe en face de la bijouterie et qui sera reprise dans le magnifique film de Robert Wise, Odds against tomorrow. On pourrait ainsi continuer longtemps à célébrer les mérites d'Huston, et à relever tout ce que les autres cinéastes lui doivent. Mais il faut aussi souligner la qualité de la distribution et la qualité de la direction d'acteurs. Tous les acteurs sont excellents. A commencer biens sûr par Sterling Hayden qui incarne Dix et dont c'était le premier film important. C'est ce rôle qui l'a marqué pour toujours, rôle qu'il reprendra pour The killing, copie presque conforme d'Asphalt jungle. Mais c'est aussi dans ce film que Marylin Monroe obtient son premier engagement significatif. Elle n'est pas si remarquable que cela, et ce n'est pas elle qui a le premier rôle féminin, c'est Jean Hagen. Celle-ci qui incarne Doll, une fille marquée par la vie, est tout à fait remarquable. C'est une actrice qui n'a pas fait une grande carrière et  qui pourtant avait le potentiel pour le film noir, tant elle avait cette capacité à incarner les déceptions de la vie. 

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    Doll est heureuse que Dix l'emmène avec elle 

    Si la composition de Sam Jaffe est un peu trop surfaite dans le rôle de Doc, en revanche celle de Louis Calhern dans celui du trouble Emmerich est tout à fait nuancée et de grande qualité. Il passe facilement de l'ironie à la peur, de la fourberie au pathétique, d'un haussement de sourcil, d'un mouvement d'épaule, trimbalant une élégance désabusée  dans la vie, ayant finalement assez de mépris pour ses propres faiblesses.  Et puis il y a le formidable James Withmore qui incarne le bossu Gus. On ne devrait voir ce film que pour lui, tant sa prestation est étonnante et forte. Il a une capacité de passer de la douceur à la rage, de la tristesse à l'illumination que lui procure son amitié avec Dix avec une grande facilité. Il prouvera par la suite toute ses grandes qualités qui en feront un second rôle recherché pour des genres très différents allant du film noir au western, du film de guerre au thriller. 

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    Dix veut revoir son Kentucky natal avant de mourir

    Cet ensemble de qualités condensées dans un seul film font de celui-ci un des chefs-d'œuvre du film noir. Pour ma part je l'ai classé parmi les dix films noirs préférés. Les années passent et c'est toujours un grand moment que de revoir ce film. On attend une version en Blu ray qui peut être nous permettra d'apprécier encore mieux la photographie par ailleurs excellente de Harry Rosson, vieux routier de la MGM qui s'illustrera plus tard dans la mise en images d'Ulysse de Mario Camerini avec Kirk Douglas.

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     John Huston et Marylin Monroe sur le tournage

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    Louis Calhern et Marylin Monroe préparant une scène d'Asphalt Jungle

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    John Huston dirigeant Sterling Hayden et Jean Hagen

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    John Huston dirigeant Louis Calhern 

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